Géopolitique au Jour le Jour

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20 septembre 2001

....On n'entend pas que des sottises, dans les medias, en particulier à la radio. J'ai entendu un homme sur Europe1 qui s'appelle, je crois, Guillaume Bigot. Là encore, on soulignait deux points. Le premier est que les extrêmistes auxquels les humains sont actuellement confrontés sont loin d'être des abrutis complets. Le second est qu'il suivent une logique qui a sa propre cohérence. Nous y reviendront plus tard. En règle générale, il y a quand même pas mal de voix qui s'élèvent pour dire "nous devons mettre fin à tous les intégrismes". Et, dans cette phrase, il fallait entendre aussi bien des intégrismes religieux que des intégrismes civils. On n'échappe pas à une adhésion pour un système de valeurs morales. Celles-ci sont réunies dans un ensemble appelé "loi" ou "lois" au pluriel. Les Taliban ont la leur, mais les gens de Wall Street ont aussi leurs lois. Bigot évoquait le procès qu'une société pharmaceutique occidentale avait intenté à des gens qui tentaient de fabriquer une sorte de clone d'un médicamentanti-sida, pour essayer de le rendre abordable pour les pays Africains, par exemple. La société s'abritait derrière des prises de brevets, une propriété industrielle, derrière des lois, assurant la protection de ses intérêts. Or, ajoutait Bigot, si la loi donne raison à cette société et si ces "pirates-biologistes" sont condamnés et si leur production d'un produit voisin est interdite, cela causera peut être un million de morts. Ce procès, c'est de l'intégrisme, un intégrisme à l'occidentale.

...Et Bigot d'ajouter : quelles sont nos valeurs morales, à nous, en Occident ? Sur quelle logique nous fondons-nous ? Les juristes qui débutent, à l'université, apprennent d'emblée la célèbre phrase "le droit n'est pas l'équité". C'est lourd de sens. Ainsi le droit, la "justice" peuvent donner raison à l'assassin, au bourreau, à l'affammeur, parce que ses actes sont "légaux".
...Il y a les lois reconnus par plusieurs pays et il y a les lois spécifiques de pays déterminés. Dans la sphère capitaliste, il existe des "paradis fiscaux", des "pavillons de complaisance", des "sanctuaires bancaires". Est-il possible de continuer à vivre ainsi ? La Suisse pourra-t-elle continuer à garantir aux clients de ses banques la confidentialité de leurs tractations, la possibilité d'héberger de l'argent sale, de provenance doûteuse ou destiné à des financements criminels ?

...Un autre point, évoqué lors de l'émission, nous ramènent aux idées du psychologue Français rené Girard (qui vit aux USA). Celui-ci met l'accent sur deux axes psychologiques important, en tant que moteurs des comportement humains. Il s'agit d'abord de la dualité "désir-haine" et du thème du bouc émissaire. Ches les gens défavorisés, depuis les gosses de nos banlieues jusqu'aux gens de favellas, des bidonvilles, tout est fait pour exciter leur désir. Grâce à la planétarisation des médias, ils peuvent être informés de ce qui se passe dans le reste du monde. Ils peuvent découvrir qu'aux USA il y a des hôtels de luxe, et même des bordels pour animaux de compagnie. Sur le plan de la sensualité, des gens qui vivent sous une contrainte de fer, découvrent qu'ailleurs le luxe le plus criant, la liberté sexuelle la plus débridée peuvent exister. Or chez eux, le moindre faux pas peut leur valoir la corde, la balle dans la tête ou même l'égorgement en public (reportage récent sur l'Afganistan sous la férule des Talibans). On imagine leur frustration et à la limite leur envie, consciente ou inconsciente, envie de sexe, de nourriture, de liberté, de consommation des choses les plus diverses. D'où cette pensée :" Je ne peux pas m'offrir tous ces plaisirs (car c'est bien le mot qu'il convient d'employer). Alors ceux qui peuvent s'offrir tout cela doivent être châtiés".

...Les pays riches se sont montrés extrêmement imprudents, en exhibant leurs richesses et leurs libertés. Ils sont aussi restés sourds aux hurlements des gens écrasés par toutes les misères. Dans l'émission d'Europe1, quelqu'un évoquait la réaction d'un lycéen, dans un collège Français, à qui on demandait une minute de silence à la mémoire des victimes Américaines et qui aurait alors dit : je propose qu'on consacre cette minute de silence à la mémoire de toutes les victimes de la violence et il cita des conflits inter-ethniques Africains qui avaient fait un nombre beaucoup plus important de morts, et dont personne ne s'était soucié. C'est bien de compassion qu'il s'agit. Mais qui a eu droit à la nôtre ? Ne s'est-elle pas montrée bien sélective ?

...L'Amérique est devenu le bouc-émissaire de toutes les frustrations. Elle sert de cible mais, ne nous y trompons pas, tous les pays riches sont visés, et responsables. Paradoxalement les émirs d'Arabie Saoudite ou ceux du Koweit passent à l'arrière-plan, eux qui dilapident des fortunes considérables dans un luxe grotesque. Mais "il pratiquent l'aumône" et surtout financent secrêtement l'armement des terroristes. La situation de Ben Laden le démontre de fait. D'autres opèrent ces financements de manière discrète, soit par conviction, soit parce qu'ils sont menacés.

...J'ai été extrêmement étonné de voir la réaction de Bush, d'après ce que j'ai entendu, entrant dans une Mosquée pour essayer de calmer le jeu, en disant, sauf erreur, "que le but de l'Amérique était de mettre fin à des violences et de punir des coupables, non de déclarer la guerre à l'Islam". Ce geste, politiquement fort et osé, semble inespéré.
...Actuellement, les Américains feront-ils l'erreur de créer une boucherie aveugle et sans nom? Il me semble que cela serait un grave erreur stratégique qui leur ferait perdre l'avantage payé au prix de cinq ou six mille morts civils. Bien sûr, demander à ds gens qui ont subi une telle blessure de conserver leur sang-froid, c'est facile à dire. Aujourd'hui (20 septembre) des discussions auraient lieu entre digniraires religieux Talibans. Certains suggéreraient que Ben Laden quitte le pays "de son plein gré". Mais si aucune information n'est donnée sur le pays qui alors, l'hébergerait, quelle garantie aurait-on que l'homme aurait effectivement quitté le pays ? Ces mêmes medias disent que tout dépendra par la suite de la décisin du Mollah Omar. Si on cautionne les actes d'un homme, on lui donne l'asile politique. C'est ce que les Talibans avaient fait jusqu'ici. Si Ben Laden se touve contraint de quitter le pays, cela ferait de lui un hors-la-loi. Qu'il soit ou le véritable responsable des attentats est à la limite secondaire. Il a suffisamment multiplié les déclarations médiatiques prônant les attentats visant des victimes civiles pour s'être identifié à l'image de ce terrorisme suicidaire. Ben Laden n'est plus un simple individu, mais un symbole. En lui demandant de quitter leur pays, les Talibans le déjugeraient, se refuseraient à se montrer "caution-solidaire" avec lui, le prix à payer pouvant s'avérer trop élevé. Mais le feront-ils ? Et si c'est le cas, maintenant, quel accepterait officiellement d'accueillir cet homme ? Il est facile de hurler dans la rue que c'est un héros, moins facile de se mettre en situation de prendre des éclats de la grenade qui pourrait le frapper.

...Nous sommes sur le fil du rasoir. Nous sommes, historiquement, face à des choix essentiels. Rien ne pourra plus être comme avant. La donne stratégique a changé. Les pays riches ne peuvent plus laisser les pays pauvres agoniser, être ravagés par le sida, la faim, insulter la pauvreté en affichant le luxe. Il y a plus de vingt ans, un Américain, ou deux auteurs Américains (il y a des fous partout) avaient publié leur propre analyse de la géopolitique en empruntant des expressions extraites de la médecine militaire de terrain. Quand un affrontement a eu lieu, les médecins passent sur le champ de bataille et effectuent un tri rapide, en fonction des possibilités d'évacuation et de traitement. Toutes les armées du monde, même les plus sophistiquées, n'ont pas des équipes de réanimation à leur disposition pour chaque blessé. Ainsi, rappelaient ces auteurs, les médecins aposent-ils des étiquettes sur les blessés en les classant par catégories (éventuellement à l'aide d'un code). Une des catégories est "shall not survive" (ne survivra pas). Celui-ci : inutile de s'en occuper, d'essayer de l'évacuer. Tout au plus quelques doses de morphines pour abréger ses ouffrances. A l'autre extrêmité, les "walking wounded" (blessés, mais pouvant marcher). Entre ces deux extrêmes, toute une palette. Les deux auteurs Américains s'étaient servi de cette classification pour analyser les situations des différents pays. L'Inde, autant que je me souvienne, était classée parmi les "shall not survive", étant donné la très forte natalité. Et le tout à l'avenant.
...Il est vrai qu'il se publie... n'importe quoi de par le monde et que les Américains n'ont pas l'apanage de la sottise humaine. Je cite simplement cette anecdote pour situer le niveau d'aberration que la "pensée humaine" peut parfois atteindre. La classification nazie comprenait des "sous-hommes", parmi lesquels étaient rangés, en bloc, les Slaves. Les Juifs devaient être exterminés. Mais les Slaves devaient céder leurs terres aux conquérants Aryens et leur servir d'esclaves. C'est avec de tels préceptes qu'Hitler lança ses hordes vers l'Est. Von Paulus, général en chef, reçut des consignes à distribuer dans les unités. Les soldats Allemands ne devaient pas hésiter à supprimer les prisonniers et à éliminer des populations civiles, si celles-ci pouvaient représenter une gêne, un poids, ou un risque dans leur action. Hitler espérait ainsi terroriser ces "sous-hommes", amener les Soviétiques, au départ extrêmement désorganisés, que l'opération "Barberousse" avait pris totalement de court, à un effondrement plus rapide. Or le résultat inverse fut obtenu. Sachant quel sort leur értait réservé, les Soviétiques se battirent jusqu'à la mort, pratiquèrent la technique de la terre brûlée, ravageant leur propre pays. Il n'y eut pas de commandos suicides (le concept n'avait peut être pas été encore inventé) mais des unités défendirent leur carré de terrain en se faisant tuer jusqu'au dernier. Et il y eut Stalingrad. Les Allemands espéraient ouvrir la route vers le pétrole de Bakou, dont ils avaient urgemment besoin. Ils ne purent passer et cette défaite marqua pour eux le commencement de la fin.

...La situation actuelle démontre une chose : la brutalité, l'égoïsme, qui poussent les peuples au désespoir (et dans les bras des intégristes) ne payent pas. L'arme terroriste est redoutable sur deux plans. Un : les auteurs ne sont pas localisables. Deux : les pays pratiquant des actions terroristes peuvent infliger aux pays riches des dommages plus importants que ceux qu'ils subissent. En matière de terrorisme, nous n'avons encore rien vu. Techniquement, tout est possible. Un des participants à l'émission d'Europe1 faisait remarquer qu'un avion de ligne bourré de kérozène avait un pouvoir destructeur cent ou mille fois supérieur à celui d'un missile de croisière. Or, pour transformer cet avion civil en bombe il aura suffi de quelques cutters.
...Bien sûr, des mesures vont être prises. On mettra des doubles portes dans les avions, avec un sas. Mais d'autres choses suivront. Pourquoi pas une bombe atomique dans le tunnel sous la Manche ? Si le terrorisme suicidaire se généralise, les gens n'oseront plus prendre un transport en commun. Si cette angoisse se traduit par une flambée de racisme, par des lynchages, tout deviendra incontrôlable.

...Il y a des gens qui profitent des guerres. Rappelez-vous le conflit Iran-Irak et les nombreuses sociétés Européennes qui fournissaient... les deux belligérants en obus, mines, etc. Rappelez vous ces spécialistes, mercenaires-scientifiques occidentaux, dont Saddam Hussein s'était assuré à grand frais le concours. Les "Grands" ont joué aussi à ce jeu. Les Russes ont soutenu des pays Arabes, les Américains ont soutenu les Talibans. Aujourd'hui, de toute évidence, ce jeu est devenu éminemment dangereux, l'allié d'hier pouvait devenir l'ennemi de demain, éventuellement en sous-main. Il est même devenu dangereux de s'acharner sur un adversaire. Les Américains ont mis les Russes à genoux économiquement, c'est un fait. Ceux-ci, qui ne pouvaient s'offrir de front "le beurre et les canons" se sont effondrés. On a dit qu'il y avait eu des aides économiuques, qui avaient disparu entre les mains de la maffia de l'Est. Possible. On passe difficilement d'une "économie planifiée", d'un fonctionnariat généralisé à une économie de marché. Une reconversion était a priori extrêmement délicate. Le résultat, c'est quoi ? L'Empire ex-Soviétique s'est fragmenté en ethnies incontrôlables. La maffia Russe est partout. Certaines ethnies ont des armes nucléaires, des missiles. Mettez-vous aussi à la place d'un Russe qui voit son pays ravagé, qui voit ses filles transormées en prostituées dans la gare de Moscou, et à qui un intégriste propose l'achat de quelques secrets techniques liés au nucléaire, voire de dispositifs opérationnels. Mettez vous à la place d'un Sud-Américain qui voit son pays pillé par ces entreprises style "United Fruit". A ces pays-là, l'Amérique est prête à envoyer des hélicoptères de combat, pour lutter contre les narco-tranfiquants. Il aurait peut être mieux valu assurer leur développement en créant des ensembles routiers permettant aux paysans d'acheminer leurs productions. Il aurait peut être mieux valu, quand c'était encore temps, soutenir leurs économies en leur fournissant des équipements leur permettant de se moderniser, en leur achetant leurs productions, même si, vis à vis des équivalents Américains, celles-ci étaient "non-rentables".

...Courte-vue, partout. Sur le simple plan de l'intelligence, c'était une erreur. Ne parlons même pas de "valeurs humaines" puisque ces mots ne sont pas encore passés dans les moeurs.

...Le monde Arabe est gigantesque. C'est aussi une poudrière. Les occidentaux ne pourront jamais tuer trois milliards d'individus. Ceci étant, les Arabes ont un point faible, stratégiquement : ils n'ont pas de "base arrière". Ils n'ont pas d'industrie lourde, de source autonome de haute technologie. Si les Russes décident de refuser d'envoyer des pièces de rechange à Khadafi, en deux ans son aviation sera clouée au sol, même s'il nage dans le pétrole. Si les pays technologiquement développés décident de couper aux pays Arabes tout accès aux autoroutes de l'information, et si personne ne leur vient en aide, ça n'est pas en attachant des messages aux pattes de rapaces qu'ils pourront combler ce vide. Sans satellite, plus de propagande, même plus d'information. L'information est devenue une arme, aujourd'hui. Les terroristes auraient, paraît-il, utilisé largement le Web pour planifier leurs actions. Mais que se passerait-il si le monde Arabe se voyait privé d'ordinateurs, s'il se trouvait exclu du monde du Web ?

...Cette situation est étrange et nouvelle. Jusqu'ici, le rebelle avait toujours une base arrière quelque part, une source d'approvisionnement. Aujourd'hui, qui assurera le soutien logistique des intégristes ? Pour couper leur soutien financier il faudrait s'en prendre aux paradis fiscaux, dont les spécialuistes disent que la moitié des transactions financières passeraient pas ces canaux d'une totale opacité. Or, si les occidentaux, qui profitent de ces structures, ne s'attaquent pas celle-ci, vraiment, ces cloisons étanches empêcheront les enquêtes de progresser. A l'inverse, la levée du secret permettrait de remonter rapidement aux sponsors des actions criminelles. Bush, au moment de son investiture, s'était refusé à s'en prendre à cette "liberté des pays de choisir son système fiscal". Changera-t-il d'avis ?

...Simple digression qui ne doit pas nous faire perdre de vue le problème essentiel : mettre l'éclairage sur tous les intégrismes, religieux ou... laïcs, sur toutes les formes d'oppression, d'exploitation, d'escroquerie et de pillage. Les responsables politiques (et religieux) sauteront-ils ce pas, accepteront-ils de reconsidérer les conséquences des "textes fondateurs" qui servent de base à leur "civilisations" ? Le monde entier retient son souffle.

21 sept 2001 :

Hier, alerte au virus. Cible visée : les systèmes bancaires et les systèmes de gestion des entreprises. Le coût aurait été, paraît-il, particulièrement important. En fait, la guerre informatique existe, potentiellement. Les Chinois ont annoncé ouvertement qu'ils comptaient investir puissamment dans cette direction. L'expérience a montré que n'importe qui pouvait avoir accès à pratiquement n'importe quoi, n'importe où, à partir de n'importe quel point du globe (dont un de ces célèbres "cybercafés"). La défense des systèmes repose sur les stockages multiples de données dans des unités déconnectées du réseau (CD-rom). Dans le cas de l'attaque récente de banques et d'entreprises, il a fallu du temps pour identifier le virus. Son programme avait déclenché des transactions bancaires anarchiques, de compte à compte. La parade a consisté à à remettre les systèmes dans un état antérieur, en utilisant les stockahes sur CD-Rom après avoir vérifié que le virus avait été éradiqué. Un virus ne se propage que quand l'ordinateur fonctionne. Il saute, de proche en proche, de fichier en fichier et comme tout virus, se duplique ailleurs, exponentiellement. Nous avons tous subi de telles attaques, plus ou moins violentes. La première chose que nos logiciels anti-virus proposent c'est "une mise en quarantaine des fichiers infectés". Les dommages financiers que subissent entreprises et systèmes bancaires chaque année sont considérables. Dans ce domaine, la discrétion est de mise, sinon la fiabilité de telles structure serait aussitôt remise en cause. L'arsenal juridique, répressif, a une efficacité qui dépend du nombre de délinquants. En nombre trop élevé, ils créeraient un mouvement impossible à réprimer. On soupçonne d'ailleurs les société vendant, à un prix relativement modéré, des logiciel antivirus, d'en produire eux-mêmes. Mettant la maladie en circulation, ils conforteraient leur efficacité en mettant aussitôt sur le marché "le médicament". Ceci impose une remise à jour des logiciels antivirus, très bon marché (30 F par an). Mais personne ne saurait s'y soustraire. Les logiciels antivirus sont difficilement "piratables". De plus leur prix relativement modique en font des accessoires aussi banalisés qu'une souris ou qu'un lecteur de disquette. Il est moinscompliqué d'acheter pour 500 F un logiciel antivirus que de s'échiner à le pirater et de courir après les dernières versions.
... Le système commercial, bancaire et industriel, utilise les transferts "d'argent électronique" intensivement. Une attaque virale généralisée pourrait à la limite saturer les possibilités de défense. Mais l'arme est à double tranchant. Les financiers des attentats sont pour beaucoup des spéculateurs. Ceci étant, il est possible que cette attaque récente soit le signe avant-coureur de l'accentuation du phénomène. On pense d'ailleurs que les informaticiens des pays de l'Est auraient fait figure de pionniers en matière de création de virus, celui-ci devenant "l'arme informatique du"pauvre", de même que le terrorisme a été comparé à "l'arme nucléaire du pauvre", le premier visant la désorganisation des paradis bancaires et commerciaux occidentaux, le chantage, l'extorsion de fonds ou la désorganisation de vastes systèmes de défense.

27 septembre 2001

...Les Etats-Unis viennent de lancer une opération "justice sans limite" (infinite justice). Le 23 sept lors d'une émission de télévision (Capital) se trouvaient confrontés notre actuel ministre des finances, Laurent Fabius et un enquêteur Suisse qui milite de longue date pour la transparence fiscale. Je n'ai pu capter que la fin de l'émission. Toujours est-il que ce Suisse souriait devant les déclaration du sieur Fabius, lequel prétendait déceler dans les sphères politiques, et pour la première fois, "un début de volonté" pour que la clarté soit faite sur l'argent sale, les paradis fiscaux, etc. Et le Suisse de rétorquer sans ménagements :

- Je ne crois pas à une telle évolution, ni en matière de transparence fiscale et financière, ni en matière d'extraditions. La moitié des transactions financières actuelles passent par ce système des paradis fiscaux (et de montrer une cartes où la Mer des Caraïbes, entre autre, semblait constellée de lieux paradisiaques de ce genre. Lorsque Bush était devenu président, il avait tout de suite annoncé la couleur en déclarant "que les pays avaient le droit de choisir les systèmes fiscaux à leur convenance"). Or le grand banditisme international, les cartels de la drogue (dont l'Afghanistan est le premier producteur mondial) et le terrorisme utilisent ces circuits, qu'ils connaissent à fond. Monsieur Fabius, vous savez très bien qu'en France n'importe qui peut se faire ouvrir demain un compte bancaire dans n'importe quelle banque, dont les titulaire pourrait avoir une domiciliation "off shore " (hors des eaux territoriale). Il reste impossible de remonter, juridiquement, aux réels "ayants droits" des comptes et on ne peut savoir qui sont les réels donneurs d'ordres.

...Autrement dit, si on peut avoir accès aux volumes des transactions elles-mêmes, aux montants des avoirs, on ne peut pas savoir qui se cache derrière quoi. Tout notre système bancaire planétaire s'abrite donc derrière des murailles de secrets qui sont autant de complicités actives. Il est impossible d'imaginer que ce système pourrait changer d'un coup, car tout le monde s'y trouverait aussitôt mouillé. A la limite, des politiques qui réclameraient haut et fort "que toute la lumière soit faite" recevraient immédiatement un choc en retour révélant des détournements de fonds ou des circuits peu reluisants concernant le financement de nombreuses opérations, ne seraient-ce que celui ... de leur campagnes électorales. Il est plus facile d'envoyer des boys en Afganistan que d'aller mettre son nez dans les comptes de l'internationale financière mondiale.

...Un second point concernait des précisions qui étaient données à propos du gazoduc destiné à acheminer le gaz naturel, récemment découvert en abondance au sud est du Turkménistan, près de la ville de Mary. Voir la carte ci-après :

...Celle-ci permet de voir comment les différents pays se trouvent enclavés, imbriqués les uns dans les autres, dans cette région du monde, les "Balkans de l'Asie". Au center, l'Afghanistan avec deux de ses villes : Kaboul et Kandahar. Problème : comment acheminer ce gaz naturel vers les pays consommateurs, les "pays clients", essentiellement les pays occidentaux.

- Par le nord, c'est à dire par la Russie, rongée par sa maffia, de plus en plus instable et incontrolable ? Non.

- Par l'Iran ? Impensable.

...Restait la route sud, passant à travers l'Afghanistan et le Pakistan (voir trajet fléché).

...Le Pakistan était tout à fait preneur parce que ce transit du gaz sur son terrtoire pouvait lui assurer une ressource en énergie et qu'il constituerait également une source de revenus, sous forme de royalties. L'Afghanistan est un véritable patchwork d'ethnies. Il s'est trouvé que celle constituée par les Talibans se trouvait sur le trajet du gazoduc, au sud-ouest du pays. Les grands capitalistes sans visages ni nationalités, l'internationale capitaliste, a donc décidé que le pouvoir politique tomberait entre les mains des Talibans. Si le commandant Massoud, récemment assassinés par une action terroriste-kamikaze avait occupé le sud-ouest de l'Afghanistan, ce rôle lui aurait été dévolu. Hélas il campait à l'est du pays. On voit donc à quoi tiennent les choses. Les capitalistes de tous pays (par quel autre nom pourrait-on les désigner ?), totalement aveuglés par leur recherche de profits, semblent passer totalement à côté des possibles contre-coups politiques. La France a jadis donné refuge à l'Ayatollah Khomeny, à Naufles le Château. Pourquoi ? Pour jouer sur différents tableaux et espérer peut être un jour, si celui-ci devenait chef de l'Etat Iranien, récupérer en retour un petit quelque chose sur le tarif du pétrole ?

...Allez donc savoir.

1° Oct 2001

...J'ai des doutes sur le caractère accidentel de la catastrophe de Toulouse. La coincidence est quand même très troublante. Rien ne semble plus facile que de faire sauter un tel dépôt de nitrate d'ammonium (ou une citerne d'hydrocarbure, ou n'importe quel entrepros à risque majeur, de ce type). Deux solutions : tirer une roquette avec un vieux LRAC (Lance Roquette Anti-Char) de récupération, sans système autodirecteur. On ne compte pas, en France, les sites entourés d'habitations qui sont entièrement vulnérables à de tels tirs, surtout si l'arme est manipulée par un homme qui se moque de sauver sa propre vie. A propos des sites nucléaires, on a pensé à ce type d'attentat. La cuve contenant les produits radio-actifs est elle-même entourée d'une enceinte de béton. Par contre l'ensemble est totalement vulnérable à un impact d'avion de transport, étant donné que nos installations nucléaires ont été dimensionnées de manière à pouvoir encaisser l'impact d'un avion de ... 9 tonnes.

...En revenant sur le drame Toulousain : cette explosion aurait aussi très bien pu être déclenchée à distance, par radio, après qu'un complice ait placé contre cette installation une charge d'apparence banalisée, éventuellement avant l'attaque perpétrée le 11 septembre contre les twin towers, à une époque où personne n'aurait pu se douter qu'une telle action puisse être entreprise.

29 octobre 2001

Les semaines s'égrennent. Vu hier une émission à la télévision, assez bien faite. La conclusion n'est guère encourageante. Lorsque les Soviétiques se sont trouvés en difficultés, avec un soulèvement en Afghanistan, les Américains ont simplement souhaité se venger de ceux qui, dans le passé, avaient aidé leurs ennemis communistes, en particulier au Vietnàm, qui n'aurait pu venir à bout des B-52 sans une aide extérieure. La phrase exacte était "nous voulions faire saigner l'Amérique". Les Afghans, rebelles contre Moscou, ont donc bénéficié d'armes très rapidement et en grand nombre. Pour ce faire les Américains ont utilisé le Pakistan où, disent des responsables de la CIA, jamais plus d'une demi-douzaine d'Américains se sont trouvés présents, qui ont fait transiter plus d'un milliard de dollars d'aide militaire hi-tech. Les Soviétiques se sont donc assez rapidement trouvés en difficulté. Cette situation s'est aggravée lorsque les Américains ont pris la décision de fournir en masse aux Moujahidines des missiles autoguidés par infrarouge Stinger, à la fois très sophistiqués et simples d'emploi, capables d'attendre sans coup férir un hélicoptère de combat Soviétique à trois mille mètres de distance. Du jour au lendemain, les Soviétiques perdirent la maîtrise de l'air et furent donc dans l'incapacité de fournir un appui sol à leurs troupes motorisées, qui furent décimées dans les étroites vallées des contre-forts montagneux Afghans, propices aux embuscades. A ce jeu-là, la partie était perdue d'avance.
Un ancien membre des services secrets Pakistanias montra, à l'occasion de cette émission, une cassette viédo sur laquelle on voyait, en visite exceptionnelle, le directeur même de la CIA, coiffé du classique bérêt Afghan, venu se rendre compte sur place, avec une visible satisfaction, des dégâts infligés aux Soviétiques.

Au fil de cette émission, on apprend nombre de choses importantes. Il existertait, paraît-il, un "texte du prophète", sur lequel s'appuient les intégristes Saoudiens, selon lequel nul soldat d'une armée étrangère ne saurait séjourner en "Terre Sainte". Or, au moment de la Guerre du Koweit, ce fut une nécessité. Ménageant la chèvre et le chou, le roi Fouad avait signé un protocole selon lequel, à l'issue de l'intervention, les Américains repartiraient. Or deux-ci, négligeant le souhait du Prophête, restèrent sur place. D'où un nouveau sujet de colère suite à une violation d'un traité à implications religieuses, dont nous, occidentaux, aurions bien du mal à mesurer l'impact.

Les questions de gros sous furent évoquées. Les spécialistes admirent qu'en matière de politique étrangère, l'Oncle Sam ne faisait guère de différence entre la géopolitique et les intérêts de J.R.Ewing, menant ainsi souvent une politique à courte vue. la question du passage du gazoduc, déjà évoquée ici (voir carte) paraît centrale. Mais, outre cette découverte de gisements de gaz au Turkmenistan, c'est en fait l'ensemble de la région qui se présente de plus en plus comme un second "moyen-Orient", riche de toutes sortes d'hydrocarbures et à fort peuplement Islamique. Il semble qu'un caprice du destin ait fait que si on excepte les champ pétrolifères Texans ce serait surtout dans des régions à forte présence Mulsulmane que l'or noir aurait choisi de fleurir. Quand les Soviétiques décidèrent de se retirer d'Afghanistan, les Américains en furent satisfaits mais ne firent strictement rien pour aider ce pays, ravagé par dix années de guerre, à se reconstruire. Celui-ci fut alors le siège de conflits tribaux sanglants, dont personne ne se soucia, jusqu'à ce qu'on apprenne, de très loin, que des gens appelés "Talibans" avaient investi Kaboul, après un long siège et une guerre civile sans pitié. Un régime "fort, majoritaire", selon une appréciation Américaine de l'époque, dont le territoire avait de plus le bonheur de se trouver sur le passage du futur gazoduc. Tout était donc pour le mieux dans la meilleure des géopolitiques possibles.

Lors de l'émission on apprit que les Américains, qui venaient de subir plusieurs attentats de la part d'un certain Ben Laden, avaient pendant de longs mois tenté de négocier avec les ethnies Afghanes, et les Talibans, et ce bien avant les attentats du 11 septembre 2001. Ils souhaitaient que ces derniers leur livrent le célèbre terroriste, "en échange de quoi une aide financière substantielle pourrait irriguer le pays". Au début de 2001, lors d'une de ces réunions très informelles, en Allemagne, le Talibans ne vinrent pas. Le Américains firent alors planer la menace d'une intervention militaire, selon un Pakistanais, présent lors de ces rencontres (alors que ce fait fut par la suite démenti par un "responsable" Américain). Des experts revinrent par la suite sur l'évaluation de la fortune personnelle du milliardaire Saoudien en mettant en doute le fait qu'il puisse à lui seul financer tant de choses d'envergure. Ce qui semble de plus en plus évident c'est que l'Arabie Saoudite, Wahabite (une tendance Ilsamique dure qui, bon an, mal an, opère dans les soixante dix décapitations au sabre de criminels, et cloître ses femmes, appliquant ainsi la charria), soutiendrait les mouvements intégristes en sous-main, en utilisant avec art les systèmes bancaires étanches précisément mis en place par les nations capitalistes elles-mêmes.

Ce qui semble surréaliste, c'est l'absence de réalisme des Américains, hélas légendaire, dans leurs appréciations de géopolitique. Ils sont alliés avec des gens qui, visiblement, les trahissent ou ne demandent qu'à le faire. On les a vus sympathiser avec leurs ennemis mortels d'hier, les Russes. Les voilà en Chine. Une journaliste nous disait que dans le Moyen-Orient actuel les ..Iraniens pourraient constituer pour eux des alliés potentiels, étant donné que ceux-ci ne s'entendent guère avec les... Talibans, pour des questions ethniques et religieuses. Personnellement, nous sommes convaincus que la composante religieuse, en tant que ferment puissant dans un inconscient collectif musulman, toujours des plus fertiles et turbide, reste sous-estimée par les Américains, et les Occidentaux en général. Pas plus que la lutte des classes, les théories de la libre entreprise et de la démocratie parlementaire ne sont peut être pas la clef d'analyse de toutes les situations d'une planète en proie à de puissantes dischronies.

9 Novembre 2001

L'Amérique souffre, et nous compatissons. Qui pourrait ne pas s'émouvoir du drame atroce qu'elle a connu le 11 septembre 2001? Mais, le médias nous l'ont parfois montré, il existe beaucoup de drames dans le monde dont on ne parle pas. Il y a des régions où on tue des gens à la machette, pour économiser les balles, d'autres où la faim fait simplement son oeuvre. Il y a eu plusieurs génocides. Des génocides de droite et des génocides de gauche, en attendant les génocides du centre, les génocides modérés.
Ca n'est pas bien de crier "haro sur le baudet !", de fustiger ceux qui payent lourdement leurs erreurs. On devrait simplement se demander, si on arrive une fois de plus à redresser une situation très difficile, à passer au travers, comment ne pas rééditer ces erreurs du passé.
Il y eut, au Chili, un homme qui s'appelait Salvator Allende. C'était un homme honnête, un homme de bien, un démocrate. Mais, pour un JR Ewing, un tel homme semblait difficilement contrôlable. L'honnêteté est toujours inquiétante car elle ne se monnaye pas. Un jour, Allende reçut Castro : une erreur politique majeure, rencontre qui inquiéta fort JR Ewing. "Voilà un communiste !". Le communiste est le Grand Satan pour un Américain. Qu'est-ce qu'un communiste ? Si vous le demandiez à un américain croisé dans la rue d'une grande ville, ou rencontré au fin fond du Middle West, il ne serait sans doute guère capable de vous répondre. L'Amérique est manichéiste. Les pays qui tendent à lui ressembler sont par essence des pays démocratiques, "épris de liberté". Ceux qui semblent se détourner du modèle américain sont d'emblée suspects, potentiellement susceptibles de se transformer en "pays communistes". Cela s'arrête là. En fait l'homme de la rue, aux USA, est fondamentalement incapable d'imaginer une seule seconde que "l'american way of life" puisse ne pas être le modèle vers lequel tout être humain censé devrait tendre. Dans l'esprit de tout américain le pays où il vit est le symbole même de la liberté. D'ailleurs une statue qui symbolise cela se dresse à l'entrée du port de New-York. Du temps où on arrivait sur ce Nouveau Monde par bateau, c'était la première chose que l'émigrant, ou le touriste, voyaient surgir à l'horizon. Une vision saisissante, pour qui a eu cette chance, avant que les avions transatlantiques ne la fassent définitivement disparaître.

Après la guerre, l'Europe a connu le plan Marshall. L'Allemagne de l'ouest en a bénéficié. Après avoir été ravagée par les bombes, elle put se reconstruire, pour devenir par la suite une puissance économique de premier plan. On ne la condamna pas, comme dans le traité de Versailles, à payer des dommages de guerre écrasants. L'Amérique distribua des cartes aux joueurs et leur fournit une petite pile de jetons pour qu'ils puissent se refaire. C'était aussi un geste indispensable pour éviter que ces pays ne soient attirés par le chant des sirènes des pays de l'Est. On peut dire que cela fonctionna.

Digression sur la révolution Cubaine et l'affaire de la baie des cochons.

Alors qu'elle prône la démocratie, l'Amérique s'en méfie comme de la peste, lorsque celle-ci tend à s'instaurer à l'extérieur de ses propres frontières. Disons qu'elle accepte à la limite qu'un pays devienne démocratique, à condition que celui-ci ne se ferme pas instantanément aux investisseurs américains, c'est à dire à un néo-colonialisme raisonnable. Si on laissait les pays bénéficier de l'exploitation de leurs richesses locales, où irait-on ? Il fut un temps où l'Egypte était encore "gouvernée" par un roi, un certain Farouk. Politiquement incompétent, celui-ci fut renversé par un groupe de militaires, menés par le général Néguib. L'Amérique laissa faire. Une junte militaire, en principe, se laisse corrompre assez facilement. Ce sont des gens qui acceptent les comptes en Suisse et avec qui on arrive en général à s'entendre. Mais l'Egypte passa vite sous le contrôle d'un nationaliste progressiste passionné : Abdel Gamel Nasser et l'Amérique se prit à regretter le bon vieux temps du roi Farouk. Pragmatiques, les Américains décidèrent d'apporter désormais leur soutien en Orient aux représentants politiques les plus conservateurs. L'Arabie Saoudite est un exemple de produit fini de cette politique. De même un appui américain important fut accordé au Shah d'Iran Reza Palevi. En sautant les années, on passe à l'appui américain accordé au régime des Talibans, déjà évoqué plus haut. Encore une fois, la priorité absolue était donnée à tout ce qui pouvait faire barrage au communisme. En ce sens, une aide à des régimes à forte assise religieuse avait sa logique : constituer un rempart contre un marxisme fondamentalement athée. Le problème gît dans le caractère potentiellement incontrôlable de certains régimes, comme ce fut le cas par exemple pour l'Iran. Dès que le Shah, pour raison de santé, fut contraint d'abandonner le pouvoir, l'Ayatollah Khomeny, dont nous, français, avions pris soin à Naufle-le-Château pendant des années, s'en empara aussitôt en transformant le pays en république islamique et en propulsant l'Iran dix siècles en arrière. En appuyant les régimes les plus conservateurs et les plus intégristes, les Etats Unis ont eux même forgé des armes susceptibles de se retourner contre eux, de la manière la plus violente qui soit : à travers le terrorisme. Nous en sommes là.

Lorsqu'il prend la parole derrière cet édifice de bois frappé de l'aigle américain, Bush a des côtés pathétiques, de même que les sénateurs yankees chantant, le lendemain des attentats du onze septembre "God bless America" : Dieu bénisse l'Amérique ! Lorsqu'il se trouve filmé dans son fantastique PC volant à haute altitude au dessus de l'Afghanistan, le secrétaire d'Etat à la Défense américain suggère encore l'incroyable naïveté américaine, comme si, d'un tel poste d'observation, bourré d'électronique, les yankees étaient incapables de voir les réalités du monde qu'ils survolent.

Nous vivons une époque-clef de l'histoire du monde, mais personne ne semble réellement comprendre la voie à suivre. Tout se passe comme si les forces en présence cherchaient à mettre en oeuvre les bonnes vieilles solutions. Malheureusement, on ne gagne pas à tous les coups, comme au Chili. On assiste alors à des chassés-croisés diplomatiques qui défient l'imagination, comme cette rencontre entre les dirigeants américain, russe et chinois. Chacun semble être à la recherche d'une recette qui pourrait fonctionner. Est-ce une affaire de haute technologie ? Qui faut-il acheter ? Sur qui pourrait-on s'appuyer ?

Stratégiquement, les américains semblent totalement dépassés et manquer totalement d'imagination. Ils naviguent (et bombardent) à vue. Ils recherchent dans les montagnes de l'Afghanistan celui qui leur semble être le responsable de l'attaque dont ils viennent d'être l'objet, sans réellement s'apercevoir qu'ils ont maintenant sur leur territoire quelques six millions de musulmans et que des congrès axés sur le Jihad international, réunissant les chef des factions terroristes les plus connues et les plus actives, se sont tenus sur leur sol même, tous ces gens ayant obtenu un visa d'entrée sur le territoire américain sans la moindre difficulté. Lors de ces congrès les propos les plus extrémistes ont été émis, de véritables appels au meurtre, en toute impunité puisqu' apparemment, parmi les vingt mille agents de la CIA en activité, aucun ne semble connaître l'arabe. Des associations "à but humanitaire" se sont mises à fleurir sur le sol américain à partir des années quatre vingt. Sur leurs papiers à en-tête, à gauche, en anglais : "Association d'aide aux orphelins palestiniens" et à droite, en arabe : "Comité de recrutement des guerriers du Jihad". Le tout était d'y penser.
Six mois avant l'attentat du World Trade center on arrête sur le sol américain un imam, meurtrier d'un rabin. Curieusement, ce chef d'inculpation ne sera finalement pas retenu contre lui, sans doute à cause d'une des multiples bizarreries des lois américaines. La police perquisitionne quand même au domicile de cet extrémiste religieux et saisit un grand nombre de notes écrites de sa main, en arabe. Pensant qu'il s'agit de documents "à caractère culturel" elle néglige de les faire traduire. Six mois plus tard, après les attentats meurtriers elle découvre, en prenant enfin connaissance de ces documents, que ceux-ci lui aurait permis de prendre la mesure des projets ourdis contre la nation américaine et même de comprendre quelles étaient les cibles retenues.

Revenons sur le terrain. Face aux guerriers Talibans, les américains semblent faire des erreurs semblables à celles qui leur firent perdre la guerre du Vietnàm, c'est à dire au premier chef de ne pas comprendre à quel type de guerre ils sont confrontés. Lorsqu'ils décidèrent de lancer une vaste opération de bombardement au Viet-Nàm du nord, avec les célèbres B-52, ils pensèrent que leur technique de bombardement en tapis allait mettre rapidement leur adversaire à genoux. Mais, encore une fois, les services de renseignements US ignoraient totalement les changements profonds qui avait été menés à bien par Ho Chi Mihn et le général Giap : à savoir la transformation de la quasi intégralité du pays en une vaste termitière. Hanoï, bien avant la chute des premières bombes américaines, était déjà devenue une ville quasiment souterraine, comportant des galeries s'enfonçant jusqu'à trente mètres de profondeur, associées à des systèmes d'aération. Ignorant ce point de détail les américains ne comprirent pas pourquoi l'écrasement d'un si petit pays avec un tonnage de bombes équivalant à tout ce qui avait été largué pendant la seconde guerre mondiale ne semblait pas amoindrir de façon sensible ses capacités de résistance et son moral. De la même façon quel américain serait à même de comprendre comment fonctionne un guerrier Taliban, pour qui il n'est pas de destin plus enviable que de mourir au combat, les armes à la main. C'est écrit dans le Coran : celui qui meurt "sur le sentier d'Allah", c'est à dire dans le Jihad, voit ses péchés du même coup effacés. Il accède alors à ce paradis si délectable, si sensuel, abondamment décrit dans l'ouvrage, un paradis où, dans un décor de rêve, soixante dix vierges pures, aux yeux baissés, les fameuses "houris", attendent le guerrier transfiguré, sous les ombrages. Dans un pays où la frustration sexuelle est intense, en dépit d'une polygamie instituée, comment rêver d'une meilleure fin ?
En 1944 les américains furent totalement dépassés par le "vent divin", autrement dit le phénomène Kamikaze. Dans les premiers moments de cette attaque totalement imprévue, la flotte américaine subit de très lourdes pertes. Heureusement pour les Etats-Unis, les choses étaient déjà trop avancées pour que cette riposte japonaise puisse réellement influer sur le sort des armes. La reconquête des îles avait mis le Japon à portée de bombardiers américains. Celui-ci se trouva assez rapidement sans matières premières, sans carburant, sans moyens de production de guerre, ses principales usines ayant été consciencieusement ravagées. Les bombardements massifs des des derniers moments de la guerre (dont le terrible bombardement de Tokyo à l'aide de bombes incendiaires), suivi de la spectaculaire démonstration des capacités destructrices du nucléaire entraîna la capitulation de la junte militaire japonaise, véritable pouvoir en place, l'Empereur n'étant réduit qu'à un rôle de figuration symbolique.
En Afghanistan, la guerre est très difficilement jouable. En se fondant au milieu des populations et en implantant leurs casernes et leurs moyens de défense au coeur de concentrations urbaines et villageoises, c'est à dire en prenant en otage leur propre population civile, les combattants Talibans rendent la poursuite des bombardements difficilement soutenable, chacun action étant suivie par la diffusion de séquences télévisées montrant des enfants tués, alignés. Les actions sur le sol Afghan n'ont pas l'air non plus très faciles, étant donnée la nature du terrain. Le seul instrument guerrier efficace serait l'hélicoptère de combat. Hélas les Talibans ont hérité de milliers de missiles Stinger, offerts par les Américains lorsque l'idée directrice étant de faire payer aux communistes l'appui apporté viet-congs. Des missiles que n'importe quel analphabète peut utiliser, qui sont stockés dans des grottes, de manière très dispersées, et qui interdisent tout déplacement aérien à moins de trois mille mètres d'altitude. Les américains n'ont donc pas la maîtrise du ciel, bien qu'il n'existe plus aucun avion Afghan en état de prendre l'air. Celle-ci appartient à ces engins sans pilote que sont les missiles Stinger, capables de mettre au tapis toute machine volante distante de moins de trois kilomètres du tireur. Quant à aller pourchasser les guerriers Afghan à pied, sur leur propre terrain, truffé de caches, cela tient du suicide. Reste la fameuse "Alliance du Nord". Mais celle-ci ne compose qu'un petit nombre de tribus (mille cinq cent tribus au total en Afghanistan !). Depuis l'élimination du commandant Massoud, l'intelligence politique des guerriers du nord ne semble pas des plus fiables. Il s'agit de gens chez qui le concept de "représentation démocratique" reste sans doute assez obscur.

Bin Laden a récemment lancé sur les ondes un message où il disait que le monde était désormais le théâtre d'affrontements à caractère religieux. Les chef d'Etat occidentaux ont aussitôt affirmé le contraire, de même que les représentants arabes, s'empressant de déclarer que le terroriste désormais mondialement célèbre ne parlait pas au nom des musulmans. Je ne suis pourtant pas sûr qu'il ait totalement tort. Le monde actuel vit tout un ensemble de crises convergentes. L'une d'elle a une dimension spirituelle. Les hommes ressentent le besoin de savoir pourquoi ils résident sur cette planète, dont ils sont les locataires. Un occidental dirait "qu'il cherche un sens à sa vie", aspiration parfaitement légitime. Appelons cela une recherche d'un système de valeurs morales si on a peur de la dimension métaphysique du questionnement, peu importe. Or, regardons quelle est l'image du système de valeur que le monde occidental offre au reste du monde. On y voit le gâchis, la corruption, l'égoïsme, le cynisme et l'écrasement de l'autre ou l'indifférence vis à vis de ses souffrances.
Ne faisons pas de démagogie facile. Les mêmes "vertus" sont également à l'oeuvre dans les pays arabes riches ou au sein des castes privilégiées, des oligarchies des autres pays musulmans. La désignation du "Grand Satan" tombe à pic pour focaliser la haine résultant des frustrations des masses arabes en direction des pays occidentaux et occulter les graves manquements de musulmans riches à milliards.

On est face à une "guerre d'images" et en disant cela je ne limite pas ce discours aux seuls aspects médiatiques. Il est urgent que les pays occidentaux restaurent auprès des pays pauvres une image déjà très dégradée. Pourtant, si on assiste à des chassés croisés diplomatiques qui sont censés démontrer la solidité de la "coalition" on entend aucun chef d'état évoquer par exemple l'éradication des paradis fiscaux. En même temps qu'ils arrosent l'Afghanistan de bombes intelligentes fort coûteuses (six milliards de centimes pour un missiles de croisière !) les américains lâchent des petits paquets jaunes contenant de la nourriture. Je serais curieux de connaître le rapport des coûts des deux opérations. Tout cela a des aspects proprement surréalistes.
Au plan national, le justice a décidé de placer momentanément au dessus des lois le Président de la République Française. En voyant cela, on serait tenté de dire à Chirac : "savez-vous que votre malhonnêteté imbécile, même si elle reste un phénomène très courant dans la caste politique française, est hélas terriblement intempestive. Tout cela tombe très très mal, vous savez".

Quel leader religieux occidental serait en position de prendre la tête d'une "croisade morale" à échelle planétaire ? Même les occidentaux ont cessé de croire aux leurs.

En face, par exemple, les princes saoudiens, champions toutes catégories du double-jeu, alors qu'ils effectuent périodiquement et en toute discrétion, dans les bras de call girls suffisamment rémunérées pour pratiquer un secret professionnel sans faille, des petits stages de défoulement dans les pays occidentaux, se débrouillent pour apparaître comme "les gardiens des lieux saints" et les "garants d'une orthodoxie musulmane" (wahabite). Mais tout n'est qu'une question d'image.

Les musulmans disent ne pas avoir de clergé susceptible de les représenter. C'est bien dommage et les voix des modérés semblent bien faibles au moment où des imams psychopathes, prêts à transformer des gosses de douze ans en commandos-suicides, surfent sur des vagues de haine créées et alimentées par des frustrations de tous ordres. En vérité nous ne savons pas combien d'armes et de stocks d'explosifs ont été introduits sur notre propre territoire par les intégristes durant les dix dernières années. Nous avons pourtant une expérience douloureuse : celle de la Guerre d'Algérie où, avec le recul du temps et surtout l'échec final de la révolution Algérienne on s'aperçoit que tout n'était pas "blanc ou noir" comme beaucoup avaient voulu nous le faire croire. Il reste qu'il est techniquement extrêmement facile, comme cela a été démontré dans les faits, de dresser deux communautés l'une contre l'autre, dans une lutte à mort; avec quelques attentats bien négociés. En vérité, tous les pays Européens sont devenus de véritables poudrières.

Personne n'a de solution-miracle, de potion magique. Mais une chose semble sûre : à une époque où une marche vers une moralisation de la politique, vers un nouvel humanisme pourrait constituer simplement un atout pour le "camp occidental", la religion dominante reste concentrée sur le culte au veau d'or, alias Dow Jones, Cac 40 ou indice Nikkei.


14 nov 2001

Les médias évoquaient, dans les jours précédents, une contre-attaque possible des Talibans. En fait ils ont déserté Kaboul sans tirer un coup de feu. Les habitants mâles se font raser la barbe, les femmes sortent de leurs tentes de camping bleues et grillagées, les "bourka", des hauts-parleurs diffusent de la musique, des images de pin-up réapparaîssent derrières les vitrines de magasins. Impensable vingt-quatre heures plus tôt. On se souvient encore des exécutions capitales, d'hommes, de femmes, au fusil, par pendaison ou égorgement, dans les stades, en public, après discours du Mollah de service. Sur les écrans de télé, le nombre des provinces passées sous le contrôle de "l'Alliance du Nord", s'accroît chaque jour. On parle de "l'après-Talibans".
L'histoire garde toujours des parts d'imprévisible, mais dans cet imbroglio on retrouve une constante de la saga islamique. Les gens des pays arabes se groupent aisément et massivement derrière un pays-leader ou un homme-leader. Ces mayonnaises humaines montent très vite, et s'effondrent tout aussi rapidement. De nombreux arabes ont été "tous derrière Nasser", puis "tous derrière Saddam Hussein". De nos jours, Oulama Ben Laden, le Mollah Omar et l'Afghanistan en tant que symboles ont joué ces roles de fer de lance, de clef de voûte fragiles. Il ne faut pas avoir beaucoup de mémoire pour se souvenir des étendues du Sinaï, constellées de chars abandonnés et même de .. chaussures, face à l'offensive de Tsahal, l'armée d'Israël. En 91 les armées de Saddam Hussein furent hachées menues par les bombes yankees. En quelques heures, les Irakiens n'avaient plus un radar, plus un avion en l'état de prendre l'air. Les sites des missiles, cibles prioritaires des missiles de croisière, furent l'objet d'attaques intensives.
Là, le rouleau compresseur Américain semble une fois de plus faire effet, en dépit des pronostics réservés. A distance respectueuse des missiles Stinger (offerts gracieusement par l'Oncle Sam aux Afghans et capables de mettre au tapis toute machine volante évoluant à moins de trois mille mètres de distance) les avions ont pilonné les casernes des Talibans, leurs dépôts d'armes et de munition, au prix de quelques "dommages collatéraux". Les parcs de blindés ont été pulvérisés méthodiquement, parfaitement distingués par les bombardiers, deux doigt sur le joystick de leur système de guidage, à l'aide de systèmes accentuateurs de lumière. En principe, les talibans ne peuvent compter sur aucune source pour se réapprovisionner en armements. Difficile de garde le moral dans ces conditions. Leurs lignes de front ont été consciencieusement arrosés par des B-52, volant bien au delà de la portée de la DCA. En dépit des exhortations de leurs mollah, les talibans ont pris leurs cliques et leurs claques ou carrément viré casaque après avoir vu leurs petits camarades réduits en charpies par les bombardements en tapis.
Maintenant, que va-t-il se passer ? Des livres paraissent, où les lecteurs aprennent ce qu'on avait toujours su : que cette situation est la suite logique de la politique menée au Moyen-Orient dès 1930 par le JR Ewing de l'époque, la Standard Oil. Antérieurement, une famille Saoudienne, celle des Abdel-Aziz, avait fait alliance avec un pouvoir religieux local ultra-conservateur, la frange Wahhabite. Grâce à cette symbiose entre pouvoir politique et pouvoir religieux, cette tribu parvint à se rendre maîtresse du pays par les armes. Quand le pétrole fut découvert dans la région, la Standard Oil put passer avec cette famille Addel-Azziz, devenue "représentative", dont l'actuel roi Fahd est issu, des contrats très intéressants pour les deux parties. Ceux-ci démontrèrent la stabilité des accords, grâce à différents aspects : un régime fort, ultra-conservateur, capable de matraquer toute opposition, opérant en totale symbiose avec les instances religieuses. Symétriquement, un pouvoir religieux très actif, dont les caisses étaient puissamment alimentées par les revenus du pétrole, imposant dans le pays et à l'extérieur de l'Arabie Saoudite un enseignement dans des "écoles coraniques". Tous les deux s'imposaient en toutre aux yeux de la communauté musulmane comme "les gardiens des lieux saints".

Les conditions de vie du peuple saoudien, ou des esclaves modernes travaillant pour le compte de "saoudiens de souche" dans un pays où la Charria règlait désormais la vie sociale importaient peu aux états consommateurs de pétrole, qui pouvaient être également des exportateurs de biens divers, dont des armes. Comment les Français auraient-ils pu s'amuser à évoquer la condition de la femme Saoudienne à une époque où l'important était d'emporter la commande de 350 chars Leclerc ? (commande indispensable pour financer le développement de nos propres moyens de défense, nous disait-on).
Il y a quelques jours la télévision présentait un reportage effectué dans un port situé dans le détroit d'Ormuz. Dans cette région, les forts revenus issus du pétrole avaient permis un développement important des installations portuaires, capables de recevoir des cargos de fort tonnage. En bout de chaîne, ces produits étaient ensuite chargés sur des myriades de boutres de bois, ces embarcations typiques de la région, jadis manoeuvrés à la voile, aujourd'hui dotées de solides diesels, capables de disperser toutes ces marchandises dans des ports dans lesquels les cargos seraient incapables de pénétrer à cause de tirant d'eau trop important. Au delà des docks, des buildings étincelants mais, dans les cales de ces boutres des "travailleurs immigrés", "frères de race" issus des régions voisines, dénués de tous droits, de toute couverture sociale, chargeant et déchargeant les boutres pour l'équivalant de cinq francs par jour. Des hommes qui, leur dure journée de travail finie, devaient couvrir à pied les cinq kilomètres les séparant de taudis où ils devaient s'entasser à quinze oun vingt : simples cours d'immeubles recouvertes de bâches, louées à des prix exorbitants. Le bus : trop cher. Et comment "ramener de l'argent au pays" ? Les gérant de cet import-export, eux, roulent en limousine, ont des montres Rolex en or, des djellabah de lin. Décidément, les JR Ewing et les Ben Laden se ressemblent bigrement. En matière d'exploitation et de cynisme, aucun n'a de leçon à donner à l'autre.
La télévision se focalise actuellement sur les aspects politiques en Afhganistan, tandis que les radios sont là pour nous rappeler les dessous économiques de toute cette affaire : les immenses richesses en hydrocarbures situées en Asie Centrale, au Turkménistan ou ailleurs, qu'il s'agisse de gaz ou de pétrole. Il nous semble que, plus que l'issue dite "politique", les "décisions de surface", le choix de la voie d'acheminement de ces richesses sera déterminant pour l'avenir d'une bonne partie de la planète. Si la voie sud est maintenue (à travers l'Afghanistan), puis le Pakistan, alors une forte proportion de la production mondiale d'hydrocarbures mondiale passera, sinon sous contrôle des pays musulmans, du moins à travers leurs territoires. Or, l'expérience l'a cruellement démontré, le choix du régime le plus "stable" n'est pas forcément le meilleur.
L'acheminement par le nord impliquerait une collaboration plus étroite de l'occident avec son ex-ennemi, la Russie et, retombée indirecte, une aide au développement de l'ex-géant, tombé à terre, ne serait-ce qu'à l'aide des royalties perçues. Là encore, le fait d'avoir priorisé l'effondrement économique "des rouges", si cette statégie s'est révélée efficace, a entraîné un terrible choc en retour. Nord ou Sud, pile ou face ? Quid d'accords secrets que les Américains pourraient avoir passés avec les Pakistanais, en échange du libre survol de leur territoire ?
J'entendais hier 15 novembre que l'OPEP avait, une fois de plus, essayé de faire monter le prix du brut en réduisant sa production : chantage classique à la production pétrolière, avec incidence sur les économies occidentales. Mais, si j'ai bien entendu, c'est ... la Russie qui aurait déjoué cette manoeuvre en accroissant ses propres exportations. Plus que jamais, l'économie est une arme puissante. Maintenant que Ben Laden et le mollah Omar se terrent, le maniement des robinets pétroliers reste un moyen d'action mais (conséquences d'accords entre Bush et Poutine ?) "l'occident" réagit.
Au delà, peut-on continuer à pratiquer le laisser-faire en matière de ressources énergétiques mondiales ? Quand les républiques d'Asie Centrale ont réclamé leur indépendance, les Russes, après avoir surtout puisé là leurs ressources pétrolières pendant des décennies ont dit : "très bien, mais on vous laisse tomber maintenant, démerdez-vous". Alors des installations vétustes se couvrirent de rouille. Arrivèrent les "carpet-baggers" de toutes nationalités, désireux de devenir les "nouveaux riches" de ces pays flottant sur des réserves d'or noir, mais devenus incapables de les exploiter et de les acheminer eux-mêmes. A côté de ces nouveaux nababs, des gens qui errent, dans un pays en pleine décomposition ou des réfugiés issus de pays voisins, en guerre, qui tentent de survivre, où les magasins de luxe cotoient la vermine. C'est tout le développement anarchique, dans des régions disposant de richesses, qui se trouve remis en question. L'ONU et la Banque Mondiale devraient étendre leurs prérogatives et, dans certaines régions du globe, se substituer à ce libéralisme sauvage, trop dangereux parce qu'irresponsable par définition.


15 nov 2001

   Nous avons appris que le Mollah Omar avait "ordonné le retrait de ses troupes de la ville de Kandahar. Les occidentaux, en particulier les Français sont tous soulagés que les Américains aient fait la guerre à leur place et il ne s'élève plus de voix pour protester contre les bombardements des villes Afghanes. Les reportages effectués à Kaboul ont montré des choses étonnantes. Les Américains ont visiblement effectué des frappes sur des cibles situées en pleine ville, à l'aide de bombes, larguées depuis des chasseurs bombardier ou, ce qui serait à vérifier, de B-52 volant à 9000 mètres d'altitude. De toute manière la précision de ces frappes, quasiment au mètre près, impliquent un guidage de la bombe dans sa phase de descente. Le bombardier dispose à bord, d'une vision (monochrome, de nuit) du site à bombarder. Lors d'opérations nocturnes ces images sont obtenues par accentuation éléctronique de la lumière provenant du sol, quand il n'y a pas de couverture nuageuse. A l'aide d'un joystick le bombardier désigne alors à la bombe l'objectif sélectionné, qui peut être un entrepôt, un parc pour réparation de chars ou une simple villa. Ce site, "éclairé" en lumière non visible, attire alors la bombe autoguidée vers lui. Ce système de bombardement a permis aux américains de bombarder avec précision des convois Talibans. Plus question de déménager la nuit à la cloche de bois.

   La presse a décidé d'opter pour la thèse de l'accident dans l'affaire de l'Airbus qui vient de s'écraser à new York, dans le quartier du Queens, faisant 260 nouveaux morts. On évoque les "turbulences" créés par un avion qui aurait décollé deux minutes et demie plus tôt. En tant qu'ancien ingénieur de l'aéronautique (je suis issu de Supaéro) je reste personnellement assez sceptique sur cette explication. Ce phénomène de vortex créé par de gros avions de ligne est bien connu depuis des décennies. Un 747 est effectivement capable de laisser une forte turbulence résiduelle après son décollage ou passage à proximité. Les compagnies aériennes ont donc décidé que les vols ne pourraient pas se succéder à moins de deux minutes d'intervalle. Ainsi l'Airbus d'Américan Airlines avait décollé deux minites et demie après l'avion précédent. Ces turbulences auraient alors eu tout leur temps pour s'atténuer et disparaître, en tout cas perdre assez de violence pour ne pas pouvoir endommager un appareil comme cela a été prétendu. De plus l'arrachement de l'empennage vertical semble peu plausible.
   Effectivement, un avion de ligne qui perdrait son empennage vertical deviendrait assez instable. Les moteurs sont accrochés aux ailes en "porte-a-faux", à des "pods", qui ne supportent guère de glissage latérale. Une démarche zig-zagante, "en crabe" pourrait provoquer leur arrachement. Mais il reste beaucoup de coincidences :

- Un accident présenté comme rarissime (en fait, sans précédent connu), qui provoque la chute immédiate de l'appareil, sans possibilité de dégagement latéral.

- Se produisant de telle façon que l'appareil s'écrase sur New York (...).

- Peu de temps après la prise de Kaboul.

   S'il s'agissait d'un attentat, le fait serait gravissime, car la seule personne qui aurait pu le commettre devrait appartenir à l'équipe de maintenance de l'appareil. Quand ces appareils sont vérifiés, ces équipes ont accès à de nombreux éléments structuraux des appareils grâce à des trappes de visite. Parmi ces éléments structuraux : les attaches de l'empennage vertical et des moteurs. La personne qui effectue ces contrôles est alors parfaitement à même de fixer sur ces attaches des bombes de la taille d'un poing, déclenchables par radio à partir du sol (ou actionnée par un "passager-kamikaze" présent à bord de l'appareil). L'affaire devient alors imparable.
   Si cette piste venait à être confirmée, plus personne n'oserait monter dans un avion. Il est déjà extrêmement difficile de contrôler à 100 % tous les accès à bord. Les bagages ne sont inspectés que statistiquement. Le fait de refuser d'embarquer un bagage sans le passager qui l'accompagne n'est plus un critère de sécurité, dans la mesure où celui-ci, devenu kamikaze, est prêt à accepter de périr dans l'avion où il prend place. Mais contrôler les services de maintenance de tous les avions du monde se présente comme une tâche impossible. Les société de maintenance peuvent avoir été infiltrées par des commandos dormants, depuis des années. Quant aux ordres de passage à l'acte, ils peuvent, nous l'avons vu, être donnés par des messages camouflés dans le réseau Internet. De tels commandos peuvent donc être activés à distance sans qu'il soit possible d'intercepter une quelconque transmission d'ordre. Ceux-ci, totalement autonomes, pourraient aussi agir de leur propre initiative.

   Personne n'avait à ma connaissance imaginé une technique de dispersion d'armes biologiques par courrier. Sa la thèse d'un attentat perpétré par un membre d'une équipe de maintenance Américaine, infiltrée, se précisait, les Américains perdraient toute confiance dans les compagnies aériennes et même à la limite la prtévoyance de leur gouvernement. Ca serait une catastrophe économique totale. La baisse des réservations des places d'avion ne tomberait plus de 75 % mais pratiquement à zéro.

   Il est possible que les Américains aient réagi en privilégiant la thèse de l'accident, pour éviter une panique complète. Possible également que les organes de presse, s'ils ont été saisis par des messages revendiquant l'attentant, aient observé un complet black-out. Mais ce ne sont que des hypothèses. A l'inverse, l'idée qu'un appareil appartenant à une compagnie Américaine, décollant de Kennedy Airport, soit l'objet d'un "accident rarissime et sans précédent connu", le faisant s'écraser sur New York, semble bien étrange.

   Une dernière remarque : depuis le 11 septembre l'état d'esprit des Américains a basculé de manière irréversible. Ceux-ci ont toujours été des champions de l'oubli systématique. J'en avais eu la démonstration lors d'une visite du pays peu d'années après la fin de la guerre au Viet-Nàm. Celle-ci semblait simplement n'avoir jamais existé. On se rappelle que les anciens combattants, amers, étaient parfois traités comme des trouble-fêtes dans leur propre ville d'origine et préféraient vivre en reclus. L'Amérique n'aime pas les "losers", les perdants, même quand ils 'agit de ses propres enfants. La stratégie Américaine a toujour été "on tourne la page et on se tourne vers l'avenir" ou : "the show must go on". Mais là, c'est différent. Quelles que soient les mesures prises, c'en est fini de la tranquuilllité des Américains sur leur propre territoire. Impossible d'oublier un évènement susceptible de se reproduire à tout moment, de manière totalement imprévisible.


21 novembre 2001. La situation reste confuse. Les alertes à l'anthrax semblent avoir baissé de rythme, bien que cela ne veuille absolument pas dire que la menace du bioterrorisme se soit éloignée. Elle reste à une distance ... inévaluable. Kaboul est "tombée", ce qui signifie que les Talibans ont simplement déguerpi pour aller le cacher dans les montagnes environnantes.
   Les troupes disparates de l'Alliance du Nord s'efforcent de débarrasser des régions des Talibans qui s'y sont réfugiés mais il leur arrive, lors qu'ils ne bénéfient pas d'une "appui aérien" solide, de refluer en désordre. On tombe donc sur une situation complexe. A la fois il serait extrêmement dangereux pour les Américains de prendre à leur charge l'ensemble des opération terrestres, et à la fois, sans l'appui aériens yankee, les soldats de l'Alliance du Nord n'aurait guère pu effectuer ces "avancées foudroyantes". Les occidentaux découvrent l'élasticité du fameux "Jihad". Autant Pakistanais et Arabes sont prêts à emprunter "le sentier d'Allah" (c'est le nom du Jihad dans le Coran), autant, comme l'admettait l'un d'eux devant les caméras, lorsqu'on est soumis à un pilonnage aérien intensif les choses ne paraîssent plus aussi évidentes, d'un point de vue purement théologique.
   L'heure est aux "solutions politiques". Pendant que les coiffeurs, à Kaboul, rasent les barbes imposées jusqu'ici par les Talibans et que les gens ressortent des caves téléviseurs et magnétocassettes, des bandes armées appartenant à l'un ou l'autre des deux camps s'emparent des véhicules des "humanitaires" en se contentant d'en arracher les plaques d'immatriculation.
     La prix du pétrole baisse. Normal, avec la baisse de 75 % de la consommation de kérozène. L'OPEP a essayé dé faire monter le cours du brut en réduisant sa production, peut-être pour créer quelque désordre dans les économies occidentales. Mais ce sont les Russes qui auraient compensé aussitôt cette baisse de production.
   Décidément ces attentats du 11 septembre ont changé bien des choses, bouleversé bien des alliances. Une catastrophe historique au sens étymologique du terme (de kata : "à côté" et strophedein : "sillon" ).

Du 20 sept au 11 déc. 2001 : 3024 consultations. Nouvelles consultations :

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