Après sa diffusion le 7/1/05, mes commentaires
sur le 70 minutes de Michel Carré
consacré au naufrage du Koursk

 

14 janvier 2005

Le film du réalisateur Michel Carré "Un sous-marin en eaux troubles", consacré au naufrage du Koursk, "grand comme un terrain de football", survenu en août 2000 dans la mer de Barentz a été diffusé sur France 2 le 7 janvier 2005. Certains de mes lecteurs ont été très contents de voir mon nom figurer au générique, en tant que conseiller scientifique, au côté de celui de Jean-René Germain, ancien rédacteur en chez de Science et Vie. Ils ont pensé ainsi que j'avais suivi toute la réalisation du document et que mes relations avec la presse s'étaient améliorées. .

La réalité est très différente.

Carré s'était mis en contact avec moi fin 2002 en me demandant de monter à Paris pour visionner certains documents vidéo qu'il avait collecté en commençant une enquête sur le naufrage du léviathan russe. Nous nous sommes vus en tout et pour tout deux heures. Le lui ai offert mes services de scientifique et d'expert (gratuits) pour les questions de plongée sous-marine. Je lui ai proposé d'accompagner son équipe de tournage à Mourmansk en figurant "comme dessinateur". Je lui ai même suggéré de m'envoyer à Moscou avec un journaliste pour rencontrer Vélikhov, conseiller militaire de Poutine et vice président de l'académie des Sciences de Russie. Vélikhov, élève de Sakharov, fut un des pionniers de la MHD. J'ai dit à Carré qu'en branchant Vélikhov sur la question des avions hypersonique ( aux USA, l'Aurora et en Russie le projet Ajax) je pourrais peut être en apprendre un peu plus, au détour d'une phrase, sur la MHD sous-marine russe. J'ai bien connu Vélikhov dans le temps, en 1965-67. Tout cela gratuitement, bien sûr. Mais Carré n'a donné suite à aucune de ces propositions. Avant d'évoquer le détail de ce qui a pu être échangé au cours de notre conversation, quelques précisions sur le calendrier de ces échanges.

En 2003 une collaboratrice de Carré m'a appelé au téléphone en me disant :

- Michel Carré voudrait que vous nous fournissiez la liste des questions que l'équipe de tournage devrait poser aux experts anglais que nous allons bientôt rencontrer au musée de la marine de Londres, où le tournage sera réalisé.
- Est-ce qu'il ne serait pas plus utile que je me joigne à votre équipe de tournage et que je pose moi-même ces questions. Ce sont des problèmes assez pointus, vous savez, et même si je fournissais une liste de questions il n'est pas certains que les gens de l'équipe sauraient interpréter correctement les réponses qui leur seraient fournies. Ma prestation serait bien entendu gratuite.
- C'est que ... nous n'avons pas de budget pour vous faire monter là-bas....
- Vous savez, je peux monter jusqu'à Douvres par le train, et je paye demi-tarif, vu mon âge. Là-bas, il suffirait d'une chambre d'hôtel supplémentaire à Londres.

Aucune suite.

Entre temps j'ai essayé de me mettre en rapport avec Jean-René Germain, dont je savais qu'il avait déjà commencé à jouer le rôle d'expert pour la préparation du film. Aucune réponse. Normal. Germain faisait partie de l'équipe des "Anti-ovnis" de Science et Vie.

Fin novembre Carré m'a appelé au téléphone :

- Je commence à me demander si vous n'avez pas raison. L'émission avait été programmée du France 2 pour le 10 décembre. Elle vient d'être déprogrammée. Je pensais que c'était à cause de ce qui était dit sur Poutine Mais il semble que la chaîne ait été sensible à des pressions des Américains.
- Est-ce que le film passera ?
- C'est un soixante dix minutes. Je vais vous en envoyer une copie en VHS. De toute façon, je vais organiser une projection en avant-première devant des collègues journalistes. Je connais du monde et ça ne se passera pas comme ça ( cette projection eut effectivement lieu le 10 décembre à Paris ). Je suis en pourparlers avec la chaîne. Ils ne sont pas d'accord avec certains aspects techniques....
- Voulez-vous que j'intervienne ? Vous n'avez qu'à rajouter une courte interview. Je monte sur Paris quand vous voulez. Demain si vous voulez.
- Je vous tiens au courant (...)

Aucune suite. Cependant, quelques jours plus tard je reçois effectivement une copie VHS du film, que je visionne. J'y décèle pas mal de choses incorrectes et même franchement fausses, comme l'idée que le réacteur nucléaire du Koursk serait "identique à celui de Techernobyl". J'appelle Carré en réitérant ma proposition d'intervention sous la forme d'une interview qui pourrait être jointe au film. Pas de suite à cette proposition.

Il y a l'histoire du Koursk, qui gardera de nombreux points d'ombre, et il y a "l'histoire dans l'histoire", c'est à dire les informations collectées par Carré et évoquée lors de notre premier coup de fil, confirmées par d'autres sources, mais éliminées au montage du film. Il y a une inénarrable rencontre avec des correspondants de la DGSE, dans un restaurant Parisien, puis ce qui a pu émerger au fil des mois, transmis par des correspondants par e-mail, certaines informations émanant même directement de Russie.

Avant de conter tout cela et d'émettre des critiques, un coup de chapeau à Carré. Son film nous aura tenu en haleine pendant 70 minutes. C'est très bien fichu, très bien monté, cinématographiquement parlant. La voix de Girodeau est bien posée, les phrases bien tournées. Carré a pu mettre la main sur des images choc exceptionnelles. Cela commence par le "sacre de Poutine", qui, du haut de ses un mètre soixante huit foule le tapis rouge du Kremlin en franchissant des portes plaquées or, qui évoquent un dessin animé de Walt Disney. Il nous montre par la suite un clip pro-Poutine où deux superbes créatures vantent sa ... virilité. Nous devons aux recherches de l'équipe de Michel Carré des scènes hallucinantes, poignantes, dont l'une montre une femme de marin, anesthésiées par une femme-médecin, en civile, seringue à la main, au moment où elle invective un responsable gouvernemental venu "entendre les familles". Carré a sacrément bien choisi ses images. Je repense à la tête du procureur chargé d'instruire le dossier après renflouement du sous-marin avec ses petits yeux bleus et sa tête de faux-frère de la côte, à faire froid dans le dos. Un bonhomme poupin que j'avais vu, dans un film précédemment présenté, s'agenouiller avec emphase devant l'épave du Koursk avant de commencer son enquête, en signe de respect vis à vis des victimes. Un homme qui annoncera tout tranquillement que la perte du submersible est due à "l'explosion accidentelle d'une torpille d'essai". Carré nous a également sorti une phrase de l'ingénieur de la société Rubine, qui a conçu le Koursk et qui dit simplement "que pour une raison inexplicable le système enregistreur des données du Koursk n'a pas été enclenché.

Ben voyons...

Même s'il y a à redire sur le film de Carré, ça reste une bombe, un sacré document. Je regrette que certains aspects techniques, que je jugeais importants, aient été ignorés, mais ce qui se dégage du film c'est l'immensité du mensonge d'état et l'évidence d'une intervention américaine, occultée à travers des négociations secrètes.

Venons-en à l'historique. Au cours de notre unique rencontre à Paris Carré me déballe en bloc ce qu'il a appris de sources diverses. Il y a eu deux explosions, parfaitement enregistrées, y compris par une station sismographique norvégienne. La seconde est beaucoup plus forte. Il y aurait eu un général chinois à bord. Avant les manoeuvres navales de la mer de Barentz la chambre des torpilles du Koursk aurait été modifiée pour pouvoir accueillir des torpilles de plus grand diamètre (détail que Carré n'a pas évoqué dans son film). Des SOS frappés sur la coque auraient été entendus pendant des jours.

Un autre détail, beaucoup plus intrigant, évoqué part Carré, dont il ne parlera pas dans son film : On aurait retrouvé sur l'un des marins morts un billet, griffonné au crayon, où l'homme aurait mis "Nous sommes dans la chambre d'évacuation située à l'arrière". Deux sous-officiers qui sont familiers de la manoeuvre du sas d'évacuation tentent vainement de le manoeuvrer. Pour une raison qu'ils ne comprennent pas celui-ci semble totalement bloqué". Carré parle également d'une approche d'un sous-marin de poche qui aurait vainement tenté de s'amarrer sur la coque de l'épave. On aurait retrouvé, après renflouement du sous-marin, l'officier chargé de garder la porte de l'amurerie tué d'une balle dans la tête et cette porte grande ouverte. La Marine russe aurait refusé de laisser les familles voir les corps, qui ne leur ont été rendus que 400 jours après le décès, est-il précisé dans le film. Carré dit avoir appris que les Russes aurait prétendu avoir perdu l'épave pendant des dizaines d'heures (ce qu'il rappellera dans son film), alors qu'il est aisé de localiser une telle masse dans un fond aussi faible, simplement en faisant survoler la zone par un avion de type Lookeed Neptune (doté d'un magnétomètre détectant les masses métalliques et équipant le Royale, en France. Toutes les marines du monde ont des appareils équivalents). Selon Carré (ce qu'il rappelle dans son film) quand le navire amiral "Pierre de Grand", commandé par l'amiral Popov, aurait été averti du naufrage, au lieu de se porter sur les lieux il se serait au contraire éloigné du site !

Toutes ces informations sont largement suffisantes pour que je me mette à gamberger. Plusieurs détails clochent. La profondeur à laquelle le Koursk repose est ridiculement faible : 108 mètres. Vue sa hauteur, le pont supérieur est à 80 mètres de la surface. Je me renseigne auprès d'un spécialiste des sous-marins, que je connais. Pendant la guerre de 39-45 des évacuation à 60-80 mètres de profondeur étaient courantes, avec des systèmes individuels très simples. Aujourd'hui tous les sous-marins disposent d'équipements individuels permettent d'évacuer un sous marin à des profondeurs atteignant 600 mètres de fond. En Angleterre ces système sont fabriqués par la société Beaufort. Je me procure assez rapidement de la documentation :

 

Remontée à trois mètres par seconde (voyez le sillage de bulles)

Le détail de la procédure d'évacuation a été décrit dans le dossier que j'ai installé sur le sujet depuis deux ans. En août 2000, pendant que Christine Okhrent plasmodiait les notes qu'on lui donnait à lire où il était dit "qu'on attendait les secours", n'importe quel journaliste connaissant un tant soit peu la plongée sous-marine aurait été à même de se rendre compte de l'absurdité de cette "attente fiévreuse" mis en scène par les journalistes. On peut alors se demander :

- S'ils sont à ce point incompétents
- S'ils sont complices ou se gardent bien de dire ce qu'on ne peur a pas expressément demandé de colporter.

C'est sans doute un mélange des deux. Tout est absurde dans de naufrage. Je n'arrive pas à imaginer qu'un sous-marin à double coque ( il s'agit en fait, structurellement parlant, de deux sous-marins nucléaires accolés. Le Koursk est propulsé non par un réacteur nucléaire, mais par deux, et ils ne sont pas "identiques à celui de Techernobyl". Les réacteurs équipant les sous marins sont fondamentalement différents de ceux qui équipent les centrales. Je suis sceptique sur le fait qu'un sous marin de cette taille de possède qu'un seul sas d'évacuation. Il y en aurait au moins deux, puisqu'il est fait de deux coques accolées, sinon plus. Par ailleurs un journal allemand reproduira ( &&& si quelqu'un a ces images ! ) l'agencement intérieur du Koursk. C'est une unité digne d'un roman de Jules Vernes. D'après mes souvenirs l'énorme cockpit contientrait deux sous-marins d'évacuation, auto-propulsés par un ensemble moteur électrique-batteries, disposés côte à côte, qui seraient susceptibles de contenir tout l'équipage et permettre des sauvetages à des profondeurs atteignant mille mètres (la profondeur d'évolution du Koursk). Selon la thèse officielle "l'explosion de la chambre des torpilles aurait été si violente qu'elle aurait ... bloqué toutes les issues". Mais comment imaginer qu'une explosion de la partie avant, sur ce submersible de 154 mètres de long, ait pu bloquer le verrouillage du (ou des) sas d'évacuation situés à l'arrière.

Simple remarque en passant : Sur cette image le Koursk ne possède pas d'hélices carénées. Quand on remonte l'épave son système motopropulseur a été démonté, au fond. Je suis sceptique sur le fait que cette machine n'ait pas été équipée d'hélices avec carrénage, moins bruyantes. Ca n'est pas un secret d'Etat. Allez au musée de la Marine au Trocadéro et demandez à voir la maquette du dernier submersible français mis à la mer. Il est est équipé. Ceci pour rappeller qu'on ne doit pas prendre pour argent comptant tout document qui vous arrive sous les yeux, d'où qu'il vienne.

Ci-dessus une maquette de sous-marin avec propulseur caréné

Un propulseur caréné vraie grandeur, d'origine non identifiée

 

Deux vues d'un "Seawolf" montrant son propulseur caréné

Sur le site où j'ai récupéré ces images on voit même des systèmes à "système de propulsion vectorisé" où l'ensemble du propulseur caréné peut pivoter, en conférant ainsi au sous-marin ( à un sous-marin de chasse ) une maniabilité exceptionnelle. Des avions sont de longue date équipés de tuyères rotatives, capables d'orienter le jet, avec l'accroissement de maniabilité qui en résulte. Au passage ce système de pilotage permet, à toute vitesse, de se passer d'empennage.


Ajout en date du 19 janvier 2005 : Envoyé par un lecteur, Nicolas Huber. Les hélices carénées d'un Typhon russe ( appréciez la taille ).

Submersible russe Typhon vue de l' arrière, montrant les carénages de ses propulseurs ( augmentation du rendement et réduction du bruit )


L'affaire du Koursk m'intéresse. Début 2003 j'installe sur mon site, l'espace d'une matinée, pendant deux heures tout au plus, un dossier signalant quelques incongruités et où j'évoque, thèse que Carré reprendra dans son film, l'idée que le Koursk, passé en immersion périscopique, s'apprétait à effectuer devant des observateurs chinois des essais d'une torpille à haute vélocité. Je lance même l'idée que cette torpille pourrait être l'équivalent de celle dont j'ai appris l'existence en janvier 2001, lors d'un colloque se situant dans une station balnéaire anglaise, de la bouche d'un spécialiste américain, c'est à dire une torpille MHD. Sur ce des lecteurs me disent "quelles preuves avez-vous ? Ne croyez vous pas que vous prenez des risques de vous discréditer en avançant de telles spéculations ?"

Je décide de retirer le dossier de mon site. Immédiatement, je reçois un e-mail de la ... DGSE. En clair, tout simplement. Ces gens me demandent de les appeler sur un numéro de portable.

Je tiens à préciser que je n'ai ni l'habitude de rencontrer ce genre de gens, ni un goût prononcé pour ce genre de milieu, vis à vis duquel j'aurais plutôt développé au fil d'années une allergie assez intense. J'aime bien l'aventure, mais pas à n'importe quel prix. Il y a des façons de la vivre que je n'apprécie guère. De plus j'ai été suffisamment emmerdé par des "taupes liées aux services" dans mes activités professionnelles que je ne garde pas un excellent souvenir des action de cette faune. Mais cette fois-ci, je ne sais pas trop pourquoi, je décide de faire une entorse à mes principes. Je décroche mon téléphone, j'appelle :

- Nous avons pris contact avec vous parce que nous sommes de votre avis. Nous aimerions échanger des informations. Pouvez vous monter sur Paris ?

Je décide d'accepter le rendez-vous que me proposent ces gens. Le rendez-vous est pris dans un café-restautant de Montparnasse. Deux hommes arrivent. Quarante, quarante cinq ans. Ils sont envoyés par Alliot-Marie, ministre de la défense, dont ils disent que "depuis quelques temps elle passe pas mal d'heures le nez collé sur mon site". Evidemment, entre les armes à micro-ondes, les arme météorologiques, les armes sismiques et le reste, elle a de quoi faire (la scène se passait début 2003). C'est clair, ils veulent des tuyaux sur la torpille MHD russe. En échange ils sont prêts à lâcher quelques autres informations. C'est du donnant-donnant. Ca peut être intéressant. De toute façon Alliot-Marie ne le sait peut être pas, mais les données relatives à cette torpille sont dans ma bande dessinée des Aventures d'Anselme Lanturlu, intitulée " Le Mur du Silence " depuis ... 1983. Le reste est dans mon livre "OVNIS et armes secrètes américaines. En voyant ces deux zigues je pense aux Shingouz des bandes dessinées de Valérian et aux rencontres se situant au "Point Central".

Je leur fournis les détails du fonctionnement de la torpille et quelques chiffres, qu'ils notent. Le mieux est de reproduire, de mémoire, des éléments de cette conversation. Désignons par la suite de lettres HCDSE ce qui se traduirait par "Honorable correspondant de la DGSE".

JPP - Vous confirmez qu'il y avait bien des Chinois à bord du Koursk ?
HCDSE - Oui, ils avaient rejoint de sous-marin en hélicoptère après son départ de Mourmansk. L'un d'eux était général. Nous confirmons l'information donnée par Michel Carré. Il y avait aussi, semble-t-il, des Arabes, mais nous ne savons pas de quelle nationalité ils étaient.
JPP - Comme savez-vous cela ?
HCDSE - Vous savez, eu Russie, il y a un KGB pro-Poutine et un KGB anti-Poutine. Nous échangeons des informations avec le second service.
JPP - Bon. Des observateurs avaient donc été amenés à bord pour constater de visu l'efficacité d'une torpille hypervéloce MHD, de "La Grosse".
HCDSE - Comment savez-vous que le nom de code de cette torpille est "la Grosse" !?!
JPP - Ecoutez, vous avez vos sources, moi aussi j'ai les miennes. On sait que c'est pour cela que des tubes de la chambre avant du Koursk avait été modifiés et que c'est aussi pour cela, non seulement qu'il avait été spécifié aux plongeurs étrangers qu'il leur était interdit de se rendre à l'avant du sous-marin, mais que c'est aussi pour cela que "pour des raisons techniques" on a par la suite découpé tout l'avant avant de remonter l'épave et que ces restes ont été par la suite dynamité
(ce que Carré montre dans son film)
HCDSE - Exact.
JPP - Vous allez peut-être me dire à quel diamètre les chambres lance-torpilles avaient été portées.
HCDSE - Un mètre.
JPP - Il y a une chose que je ne comprends pas. Quand le Koursk a coulé, le Croiseur Amiral Pierre le Grand s'est éloigné au lieu de se porter immédiatement sur le lieu du naufrage. C'est ce que m'a dit Carré. Mais... pourquoi ?
HCDSE - La présence des Chinois à bord devenait une affaire d'état. Il ne fallait absolument pas que ça se sache. Le croiseur Pierre le Grand a alors envoyé au Koursk un ordre codé, par ultra-sons, qui a verrouillé toutes ses issues.
JPP - Vous voulez dire que le commandant du Koursk n'a même pas été mis au courant ?

HCDSE - Non. Il est mort avec le reste de l'équipage.
JPP - Carré m'a parlé le tentative d'amarrage d'un sous-marin de poche sur la coque du Koursk. Ca n'aurait pas marché, à cause du courant....
HCDSE - Ah, ça explique pourquoi on n'avait plus qu'un seul sous-marin de poche sur le pont du bateau qui en portant deux, la veille, et qui était arrivé sur les lieux.
JPP - Quel bateau ?
HCDSE - On a des images de satellite. A un moment les Russes ont amené un bateau qui portait deux sous-marins de poche, sur le pont. Puis, le lendemain, il n'y en avait plus qu'un.

JPP - Ils l'avaient mis à l'eau pendant la nuit, je suppose.
HCDSE - C'est la seule explication. Après, ils l'ont récupéré, toujours avec des manoeuvres de nuit.
JPP - On peut penser que ce sous-marin se serait arrimé au Koursk. Mais il ne pouvait pas évacuer tout l'équipage.
HCDSE - Non, ces engins peuvent emmener au plus dix-douze types.
JPP - On peut imaginer que l'arrimage s'est fait et que le commandant du Koursk a dit à ses gars : "on va évacuer les Chinois, puis on viendra vous récupérer après". Mais ils n'ont pas été d'accord. Ca expliquerait les blessures par balles évoquées par Carré et ses sources
(fait seulement évoqué dans le premier contact avec Carré. Dans son film il n'en a pas dit mot). Une mutinerie avec des blessures par balles...
HCDSE - Peut être.

JPP - Ca n'explique pas comment le Koursk a coulé. La torpille au peroxyde d'hydrogène ( avec pour comburant l'eau oxygénée, citée par Carré dans son film ) moi je n'y crois pas. Ca a été viré des tous les sous-marins il y a plus de trente ans. L'explosion accidentelle d'une torpille d'essai, je n'y crois pas non plus. je ne crois pas non plus à des essais de torpille Sqwal.
HCDSE - La Sqwal a plus de trente ans.
JPP - Et elle a son équivalent aux USA : la "Surpercav". Revenons au naufrage du Koursk.
HCDSE - Vous savez, nous allons peut être vous apprendre quelque chose, mais depuis le début des années soixante les Américains et les Russes se livrent à une guerre sous-marin très active. Il y a eu des tas de bâtiments envoyés à fond, en général russes, et c'était mis sur le compte de "collisions".
JPP - Pourquoi cette guerre secrète ?

HCDSE - Les Américains ne craignent qu'une chose, maintenant : que les Russes dotent les Chinois en technologies de pointe, qu'ils accélèrent leur développement. Ils sont assez actifs au plan du renseignement. Quand des trucs doivent être transportés, c'est par sous-marins. Quand les Américains veulent contrecarrer cela, ils coulent le sous-marin russe, carrément.
JPP - Mais comment ? Ils le torpillent ?
HCDSE - Il semble que ça soit par abordage, ou une technique particulière d'abordage. On n'a jamais enregistré de signal correspondant à la course d'une torpille.
JPP - Revenons au Koursk. Il aurait donc été coulé par abordage, par un sous-marin américain. Et ça serait pour cela que dans les premiers communiqués on avait carrément parlé d'une collision avec un sous marin américain. Je me souviens.
HCDSE - Il y en avait plusieurs sur le site des manoeuvres.
JPP - Mais pourquoi deux explosion, une relativement faible et une autre, plus puissante.
HCDSE - On n'en sait pas plus que vous.
JPP - Et le sort des marins du Koursk ?
HCDSE - Ils les ont laissé crever. Le Pierre le Grand a lancé un avertissement : "le premier qui s'approche du Koursk, on le coule".

JPP - Et la balise de détresse, les messages ?
HCDSE - Avec leur ordre sonar les Russes ont fait du Koursk une épave. Les gars n'avaient aucun moyen de communiquer avec l'extérieur.
JPP - Sauf en cognant sur les parois.
HCDSE - Sauf en cognant sur les parois...
JPP - Alors qu'il aurait été facile d'intervenir sur l'épave, accessible par des plongeurs autonomes, avec des scaphandres alimentés en mélange oxygène-hélium, dont disposent toutes les équipes d'intervention sur les navires de guerre d'aujourd'hui. .
HCDSE - Bien sûr.

On s'est quitté après avoir échangé quelques propos sur d'autres sujets. Dans cette rencontre il y avait un peu plus qu'une simple démarche de prise de contact. Mon livre venait de sortir. Les Etats Majors français savaient maintenant que l'armée avait loupé le train de la MHD. Maladroitement, les Français s'efforçaient de remonter quelques équipes. Je savais qu'ils n'iraient pas bien loin, non seulement parce qu'ils avaient perdu tout un lot de précieuses connaissances pendant trente années mais parce qu'entre leurs projets et la réalisation de ceux-ci se dressaient des écueils qu'ils ne soupçonnaient même pas. Il était exclu, et c'est toujours le cas, que je participe à un quelconque projet de MHD militaire. Il n'y a pas de MHD civile. C'est un mot qui n'a pas de sens. C'est comme le nucléaire civil. Tôt ou tard un pays qui entre dans le club de l'atome aura ses bombes. L'énergie n'est qu'un prétexte. En France il n'y a même pas le prétexte d'une MHD à application civile. J'ai dit à ces messieurs en les quittant :

- Ah, je suppose que vous ferez votre rapport à Alliot-Marie. Je ne sais pas s'il y avait démarche ou non. Mais, en cas, voilà ma réponse.
- Et c'est ?
- Vous lui ferez une grosse bise de ma part.

Ils rirent et sur ce nous nous quittâmes.

Il est regrettable que Carré ne m'ait pas cru à propos de la torpille MHD. Je pense qu'il a du se fier à l'avis de Jean- René Germain qui n'a pas oublié le lien MHD-OVNI, qui fut révélé pour la première fois en 1975 dans ... Science et Vie, qui en fit même sa couverture avec le titre " Un moteur à Plasma pour OVNI ". Ce mois-là le journal doubla ses ventes. A moins que Carré n'ait écouté les avis de ses experts étrangers. La torpille Sqwal est un modèle ancien, qui date de 30 ans. Carré en fait un armement de pointe et suggère que les Américains n'aient pas ce type d'armement. Alors qu'ils disposent non seulement de l'équivalent du Sqwal ( leur torpille Supercav, qui date aussi de 30 ans ) mais il ont aussi des torpilles MHD, aussi rapides que les engins Russes. Ce qu'ils craignaient dans cette histoire ça n'était pas de se trouver surclassés mais de voir les Russes vendre cette technologie aux ennemis de demain : les Chinois.

Le créateur d'images de synthèse de Carré a produit des séquences très suggestives. Aucun des deux n'a compris que la vapeur entourant cette fusée était produite par une l'émission de gaz à haute température, à la pointe avant. Ce sont de "belles images", sans plus. C'est vraiment ce qu'on peut appeler de la "réalité virtuelle".

Quand Carré passe à son hypothèse sur la destruction du Koursk, car c'est la sienne, cela devient un peu n'importe quoi. Le clou est le tir qui aurait été opéré par un des sous-marins Américains sur le Koursk. On voit filer une fusée propulsée par poudre. Le commentaire évoque un modèle américain MK-48 alors que, renseignement pris, la MK - 48 est un modèle antédiluvien, à hélice. Il est impossible que le Koursk ait été coulé par une torpille à poudre, simplement parce qu'on n'a pas enregistrée le bruit infernal fait, avant impact, par ces engins quand il crachent du gaz à haute température, très turbulent, dans l'eau. Dans la première version de son 70 minutes, cherchant à expliquer le trou rond à bords nets observé sur la partie tribord de l'épave, d'un mètre de diamètre, Carré commençait par parler d'une torpille équipée "d'une tête en uranium appauvri". Je lui avait dit, au téléphone, lors de notre échange de la fin novembre 2005 que ce trou ne pouvait avoir été fait qu'à l'aide d'un système à charge creuse, décrit dans mon dossier. Je m'offrais à expliquer cela devant sa caméra, crayon en main. Un technique liée au "tir de contact", pratiquée par les sous-marins américains. Dans les systèmes à charge creuse une surface faite de cuivre est mise en mouvement très rapide par un explosif et se constitue en onde de choc. Dans le système que j'avais suggéré et décrit la couche de cuivre, en forme de rigole, se transformait en onde de choc de forme cylindrique agissant comme un "ouvre boite". Au lieu de reprendre mes schémas Carré demanda à son créateur d'image de lui bricoler une tuyère portant une pointe d'uranium appauvri et un "anneau de cuivre". Ca devenait ... n'importe quoi. Mais il aura quand même eu le mérite d'insuffler l'idée selon laquelle le Naufrage du Koursk, présenté comme un accident, fut en fait le résultat d'une attaque américaine visant à dissuader les Russes d'exporter des technologies avancées en direction de la Chine.

L'essentiel est que son film soit passé. J'espère que ceux qui l'auront vu auront pu prendre un peu plus conscience du mensonge généralisé qui domine actuellement la planète et de la distance colossale qui sépare les faits réels de ce qui peut leur être servi dans les médias, part des journalistes complices, manipulés, stupides, incompétents ou le tout à la fois.

Un mot pour finir sur les missiles Granit ( six de chaque côté de la tourelle du Koursk, inclinés à 45° ). Ce qui va suivre vous montrera que les Russes sont loin d'être largués sur le point de la haute technologie militaire. Ce sont des missiles de croisière bisoniques. On les voit ici un après avoir qu'il ait été extrait de son logement cylindrique.

Ils sont propulsés par un booster situé à l'arrière, à droite sur la photo, pendant quelques secondes. L'avant, à gauche, porte une coiffe, qui masque l'entrée d'air d'un turboréacteur. Les ailes et l'empennage sont ... repliées sur les côtés. C'est vraiment " Le secret de l'Espadon ", pour les amateurs de Bandes Dessinées.

Quand il est en configuration de vol, on obtient ceci :

Le missile de croisière Granit

On appelle le Koursk le "tueur de porte-avions". Le Granit fait partie de sa panoplie d'armements ultra-moderne (qui comporte évidemment les torpilles MHD capables de filer à deux ou trois mille kilomètres à l'heure). Le Granit est un missile de croisière capable de filer à Mach 2. En air dense et à Mach 2 la traînée d'onde est très forte. Aucun avion à ces altitudes ne dépasse mach 1,2. Le Granit dévore son carburant à très grande vitesse. Sa portée doit être limitée. Deux cent kilomètres, peut être. C'est faible pour un missile de croisière. C'est un missile mer-mer. Quand les satellites renseignent le Koursk sur la présente de la flotte ennemie celui-ci peut tirer ses missiles Granit en immersion. Ceux-ci connaissent la position de leurs cibles. Ils peuvent les approcher en adoptant des trajectoires pré-programmées qu'aucun avion de saurait suivre et même pratiquement aucun missile (ils vont aussi vite que les missiles classiques !). Il reste les défenses ultimes des porte-avions, les principales cibles, leurs armes à énergie dirigée. mais celle-ci sont encore peu efficaces en air dense. C'est réservé à la défense spatiale et mis en oeuvre en air raréfié à partir de 747 transformés en stations de tir.

Equipé d'un système électromagnétique à compression de flux le Granit peut saturer les sytèmes de détection des navires. Evoluant au ras de l'eau il échappe aux radars jusqu'à ce qu'il apparaisse au dessus de l'horizon et que son écho puisse être discriminé de celui émis par les vagues. Par ailleurs, si l'information fournie par Carré est exacte "sa charge serait équivalente à 50 fois Hiroshima", soit plus d'une demi-mégatonne par missile. A ce compte-là, pas besoin d'exploser au contact. Le Granit peut être mis à feu à distance. Tout cela fait qu'on voit difficilement comment, actuellement, un porte-avion pourrait parer l'attaque combinée par un système " repérage satellitaire - approche par sous-marin, destruction par missile bisonique évoluant au ras des flots ".

Une chose me revient en mémoire. Quand j'avais discuté avec Carré, fin 2002, celui-ci avait évoqué tout le travail qui avait été fait après remontée de l'épave du Koursk. Comme il l'a bien mis en évidence dans son film ce n'étaient pas des considération humanitaires qui avaient amené les Russes à renflouer le Koursk. Il fallait récupérer les missiles Granit et leurs charges thermonucléaires, même si certains, destinés à des tirs d'essais pouvaient avoir des têtes inertes. Il y avait aussi la ou les torpilles MHD ainsi que les tubes de tir, élargis à un mètre de diamètre. Mais un correspondant de Carré avait également évoqué "le démontage des lasers". Que pourraient faire des lasers à bord d'un sous-marin ? On peut penser à des systèmes implantés sur la tourelle, destinés à protéger le sous-marin contre une attaque aérienne, voir à effectuer des frappes de surfaces contre des objectifs. Mais on peut songer à autre chose. Un laser est un système où un corps quelconque, gazeux, solide ou même liquide peut stocker de l'énergie sous forme d'excitation métastable, puis la restituer en un temps très bref. Il est existe des laser fonctionnant dans le visible, des laser à rayons X. On peut théoriquement concevoir des "grasers", émettant des rayons gamma, utilisant un stockage sous forme de niveaux d'excitation métastable de neutrons dans certains noyaux. Mais des "lasers à ultra-sons" sont tout aussi envisageables. Intérêt : détruire à distance les torpilles de l'adversaire avant qu'elle ne vous atteignent. Simple spéculation.

Pour la petite histoire, quand, quittant mon métier de graveur sur pierre et sur cuivre avec lequel je ne parvenais pas à vivre je me suis résolu à devenir un ingénieur d'essai, j'ai trouvé une place en 1965 à la SEPR, la Société de la propulsion par réaction.



Erreur d'aiguillage. JPP ingénieur d'essai de missiles pendant quelques mois, à Istres, en 1965.

Ca, c'est une simple pétard. Le MSBS ( missile quadri-tuyères pour sous-marin nucléaire ) emportait dix tonnes de poudre. Quand je voyais ces engins fonctionner, à 200 briques l'essai, j'avais l'impression de voir les billets de cinq cent balles sortir par la tuyère.


Fin décembre 2004. Source : le Journal du Réseau Voltaire.

CONFIRMATION DU RAPPROCHEMENT MILITAIRE SINO-RUSSE


A l'occasion de la visite à Pékin du ministre russe de la Défense, Sergeï Ivanov, le président Hu Jintao a annoncé que la Chine et la Fédération de Russie organiseront leurs premières manœuvres militaires communes en 2005. L'exercice se déroulera sur le sol chinois, mais sa localisation exacte, les unités qui y participeront et son ampleur n'ont pas été précisés. Les deux grandes puissances, souvent rivales pendant la Guerre froide, entendent resserrer leurs liens militaires
pour faire face à une éventuelle confrontation avec les États-Unis dans la prochaine décennie. En 2001, elles ont créé ensemble l'Organisation de coopération de Shangaï et, il y a trois mois, le président Hu Jintao a exhorté l'Armée populaire à se préparer à la guerre.

Prenons un peu de recul. A un moment de son histoire, Gorbatchev décide de baisser le bouclier de l'URSS, d'opérer un désarmement unilatéral. Bien sûr, peut-on dire, l'URSS est à bout de souffle. Les Etats-Unis sont en train de gagner une guerre économique sans merci qui dure depuis l'après-guerre. Contrainte de maintenir la parité sur le plan stratégique l'Union Soviétique n'est plus qu'un immense complexe militaro-industriel. Au delà de l'Oural, le beurre et les canons, ça n'est pas possible. Gorbatchev l'a bien compris. Alors c'est la débâcle. Le mur de Berlin est mis à bas. L'Empire explose en une multitude de conflits ethniques. A ce moment là les Etats-Unis auraient pu jouer la carte de l'ouverture, envisager un super plan Marshall dont les pays de l'Est auraient été les bénéficiaires. Mais ça ne se fait pas, pour des tas de raisons, ne serait-ce que parce que l'Empire n'est pas capable de prendre un tel virage. L'inertie est trop importante. On ne passe pas d'une bureaucratie préhistorique à une économie libérale sans une phase où la corruption mène le jeu. Dans un autre ordre d'idées l'Algérie a été incapable de réussir sa révolution, pour des raisons un peu similaires (absence de gestion intelligente, natalité explosive, corruption). Nous consacrerons un dossier à ce sujet.

Après Gorbatchev vient Estsine, l'éponge à Vodka. Dans le pays, la corruption expose. Actuellement (2004) on estime, à l'Est qu'entre 500.000 et 5 millions d'enfants et d'adolescents vivent "à l'état sauvage", sans domicile fixe, sans couverture sociale, n'importe où, dehors, dans des squats, dans des caves. La gare de Moscou est de jour comme de nuit le siège de tous les trafic, à commencer par celui de la prostitution et de la drogue. C'est ainsi qu'en abattant le mur de Berlin l'Occident a apporté "la démocratie" à l'Est. Et c'est exactement ce qui se passera à Cuba le jour où les Américains rétabliront "la démocratie" dans l'île et que la maffia pourra sy réinstaller en toute tranquillité. Cuba ne tardera pas à redevenir ce qu'elle avait été du temps de Battista : le bordel de l'Amérique.

Les Russes ne savent plus à quel saint se vouer. Après le KGB, l'état policier : la misère et le chaos. Essayons alors de comprendre Poutine. C'est un ancien du KGB. Il est sans illusion sur les habitants de son propre pays et sur les visées des Américains. Selon le choix qu'on fait, on peut appeler cela du réalisme ou du cynisme. Les gens de différents pays commencent à comprendre que l'humanisme américain, le temps des belles idées généreuses, celles d'un Lincoln, a vécu. Aujourd'hui c'est J.R.Ewing qui est aux commandes. L'état d'esprit qui règne dans un pays peut changer au fil des décennies. Des régions jusque là paisibles peuvent se muer en foires d'empoigne. Des pays plein de richesses peuvent basculer dans la misère. Des fanatismes peuvent enflammer des millions d'hommes. Aujourd'hui, partout dans le monde c'est "chacun pour soi et Dieu pour tous", sauf que le dieu n'est pas le même partout. Aux USA le veau d'or essaye de ressembler à un christiannisme revisité. God bless America. "Dieu bénisse l'Amérique".

In gold we trust....

Alors les grands états se cherchent des alliés. L'URSS ayant vécu, la Russie sait qu'elle n'a pas les épaules assez larges pour faire jeu égal avec le colosse américain. D'un autre côté la Chine s'éveille de son sommeil millénaire, forte de son milliard d'êtres humains. L'accord se profile :

- Je t'apporte ma force de travail considérable, la puissance de ma masse humaine et tu m'apportes ton savoir faire et ta haute technologie ainsi que ... tes ressources en pétrole et en matières premières.

L'Amérique domine le monde par sa technologie, en particulier au niveau des armements. Mais c'est un colosse aux pieds d'argile. Les Européens forment aujourd'hui une cohorte de vingt cinq pays. Il n'y a pas que la productivité, il y a l'aspect monétaire. Après la guerre de 39-45 les différents pays du monde avait décidé d'indexer leur monnaie sur l'or, "étalon de référence". Mais au début des années soixante-dix Nixon réussit à imposer le dollar. Qu'est-ce que cela veut dire ?

Nous vivons depuis bien longtemps à l'ère du papier monnaie. Ce qui rythme les échanges est symbolique. Le lecteur non averti se dira alors : mais, fichtre, qu'est-ce qu'une monnaie ? Je lui conseillerai alors de s'initier à tout cela en lisant ma bande dessinée L'Economicon.

A quoi sert la monnaie ? A opérer des échanges entre les gens. On peut la comparer au sang qui court dans les artères. Prenons un être humain. A toute époque de sa vie, au cours de sa croissance celui-ci dispose d'un certain volume de sang pour assurer ses échanges, acheminer ses nutriments, oxygéner ses tissus. Au fur et à mesure que le corps grandit, le volume sanguin s'accroît dans les mêmes proportions. C'est pareil pour la monnaie. Un pays qui connaît un boom économique réel, avec un accroissement tangible de sa production, de sa consommation, de son "métabolisme économique" doit accroître la masse monétaire en circulation. A l'inverse, si son économie s'effondre, sa monnaie se déprécie. Tel fut le cas du mark allemand dans l'après-guerre. Les problèmes monétaires évoquent un étrange problème cybernétique, avec des feed-back nombreux.

A moins d'être "le" pays dont la monnaie est choisie comme monnaie de référence, les monnaies des autres n'ont qu'un valeur fiduciaire. Elles n'ont que la valeur qu'on leur prète. Plus une monnaie est recherchée, plus son cours monte, et vice-versa. Avant l'apparition de l'euro, les monnaies européennes, comme les monnaies du monde entier pouvaient subir des fluctuations. Que signifie "monnaie de référence" ? C'est tout simplement la monnaie dans laquelle les facturations son établies dans les échanges internationaux. Jusqu'à une date récente on facturait systématiquement "en dollars", parce que le dollar était ... stable. Pourquoi le dollar avait-il réussi à s'imposer de cette façon ? Parce qu'il faut une monnaie de référence. Spéculer contre le dollar aurait été comme scier la branche sur laquelle tout le monde était assis. Par ailleurs la puissance économique représentée par l'Amérique lui permettait de mieux encaisser les offensives des spéculateurs.

Comment une monnaie peut-elle se trouver en difficulté ? C'est comme en bourse : parce que les gens perdent confiance en elle. Plus il y avait de transactions qui étaient réalisées sur la base du dollar et plus cela stabilisait cette monaie, sur un simple plan fiduciaire.

Les bénéfices des spéculations monétaires ne rapportaient ... qu'aux spéculateurs. Les Européens ont finit par se doter un "serpent monétaire" c'est à dire d'une sorte de masse de monnaie de réserve, dans toutes les monnaies possibles, prompte à se porter au secours d'une monnaie défaillante, au cas où celle-ci subirait un attaque de la part de spéculateurs. Spéculer contre une monnaie comme par exemple la lire, c'était demander à ce qu'un nombre important de lires puissent être échangées contre une contrepartie en francs, en livres, en dollars, en marks, ent out sauf... des lires. Alors la confiance en la lire vacillait, comme pour des actions en bourse. Se serpent monétaire a un peu atténué ces fluctuations, en rendant impossible la spéculation au jour le jour avec cette possibilité de racheter en masse le flot de la monnaie "mise en circulation". La mesure s'avéra dissuasive. Spéculer peut rapporter gros, mais si l'opération échoue, le spéculateur paye sa note, dont les frais des transsactions.

L'Europe est un patchwork. C'est avant tout l'Europe du grand capital, sans foi, ni loi, ni frontières. C'est l'Europe des "délocalisations", fruit empoisonné du libéralisme. Jour après jour des employés des entreprises des pays européens "riches" se retrouvent du jour au lendemain devant des locaux vidés, l'outil de production s'étant envolé à l'étranger, là où la main-d'oeuvre est meilleure marché.

Serge Dassault, dans une interview récente, que je n'ai pas voulu reproduire, jette un cri d'alarme. Le socialisme, selon ce brave fils à papa qui n'a jamais foulé autre chose que d'épaisses moquettes, c'est la ruine assurée. Si la France veut survivre il faut supprimer des acquis sociaux disproportionnés. Si les salariés français ne se montrent pas raisonnables et n'acceptent pas des salaires alignés sur ceux des Polonais "nous courrons à la ruine certaine". C'est touchant. Entre deux discours de ce genre Serge ira inspecter les nouveaux modèles de ses jets privés en essayant les fauteuils en cuir immaculés, en inspectant les aménagement et accessoires qui donnent à son entreprise compétitivité et dynamisme. Sachez-le; l'avenir du marché, ce sont les nouveaux riches. Les nouveaux pauvres, eux, n'ont pas un sou et ne présentent aucun intérêt. Tout cela est frappé du bon sens.L'avenir, c'est l'indistrie de luxe. J'ai d'ailleurs vu un reportage montrant la fantastique croissance d'une société française produisant des Yaccht de 30 mètres de long et qui avait 300 commandes. Elle avait du, en quelques mois, doubler son personnel. Ceux qui parlent de crise de l'emploi ne savent pas où porter leur regard. Côté luxe, c'est le boom.

Au delà de cette redistribution des cartes (de travail) il y a l'aspect monétaire. Avec l'euro tous les pays constituant cette Europe bien disparate ont fait monnaie commune. On ne peut plus spéculer contre le franc, ou la lire, le mark, puisque ces monnaies ont cessé d'exister. De facto, toutes les monnaies européennes sont devenues solidaires, puisqu'elles se sont fondues en une monnaie unique : l'euro. La monnaie reflète l'état d'un économie. Quand l'Europe était fragmentée, certaines monnaies flambaient, tandis que d'autres fléchissaient, le système était turbulent. Là, l'euro représente, par simple ... inertie une force de frappe monétaire qui devient comparable à celle du dollar. Avec une population double les activités européennes, très diversifiées, commencent à faire jeu égal avec celles des USA.

Conséquence :

Des gens, et même des pays entiers ont de plus en plus tendance à "facturer en euros", vue la stabilité de cette nouvelle monnaie, devenue une "devise forte". Corellativement : la confiance dans le dollar baisse. Une information d'importance ( source : Réseau Voltaire ) : Avant que les Etats-Unis ne lancent leur opération de police contre l'Irak, pour y "démanteler des sites où étaient élaborées des armes de destruction massive", dont on a su par la suite qu'il s'agissait d'une foutaise complète, ce pays avait commencé à facturer ses livraisons de pétrole en ... euros ! Or il faut savoir que les Etats-Unis, soucieux de ne pas trop tirer sur leurs réserves importent si je ne m'abuse 75 % de leur consommation de pétrole. Que les pays exportateurs se mettent tous à facturer en euros et que, la confiance se mettant à fondre, le dollar se mette à chuter c'est la balance des paiements US qui pourrait s'en ressentir. En résumé notre planête est le siège d'une guerre monétaire, depuis que le dollar a, de facto, dessé d'être la monnaie de référence.

Les mécanismes monétaires sont complexes et je leur consacrerai une future bande dessinée. Avoir une monnaie qui se dévalue fait qu'on pratique alors des prix à l'exportation plus faibles. La baisse du dollar a donc pour effet de relancer les exportations américaine, en freinant celles des Européens. Mais cette faiblesse monétaire n'a pas que des avantages. De plus, les guerres coûtent cher, ne serait-ce qu'en pétrole.

Le fait d'être la monnaie de référence a permis aux USA de pratiquer en toute impunité une politique inflationniste, c'est à dire de faire marche la planche à billets verts et ainsi d'acheter des tas de choses, de par le monde, avec ... du papier. Le gonflement de la masse monétaire, vis à vis d'une monnaie donnée a pour effet de déprécier celle-ci, vis à vis des biens eux-mêmes (à terme : montée des prix, exprimés dans cette monnaie) et par rapport aux autres monnaies ( à terme : une dévaluation ). Ceci a été la règle pendant des décennies, sauf pour le dollar. Déprécier le dollar aurait alors créé une trop grande instabilité, monétaire et économique et les Etats-Unis ont joué à fond là-dessus. Depuis l'émergeance de l'euro ces beaux jours sont révolus. L'économie américaine, la monnaie américaine sont devenues vulnérables. Or on a fait des guerres pour moins que cela. Plus : dans des analyses ultérieures on est souvent arrivé à la conclusion que des problèmes économico-monétaires avaient été à la source de déclenchements de conflits majeurs.

Le bloc de l'Est, tournant en circuit fermé à travers un système économique autarcique, le COMECOM, s'est longtemps situé en dehors des courants et turbulences monétaires planétaires. En d'autres mots : le rouble n'était pas convertible, ni coté. Les économies de l'URSS et des pays "satellites" étaient planifiées et les prix imposés. Aujourd'hui tous les pays de l'Est s'ouvrent au monde extérieur, à l'économie de marché, de même que la Chine. Pour que l'économie planétaire puisse tourner il faut une monnaie de référence. Jadis des ensembles de pays faisaient bande à part, en constituant ce qu'on appelait des "zones". Il y avait la "zone dollar". Aujourd'hui l'économie se mondialise et la logique veut alors qu'une seule monnaie prenne le leadership. Sur ce plan l'euro constitue une menace pour le dollar qui devient "un tigre de papier".

La situation mondiale est étrange. L'Amérique est le plus puissant pays du monde. Au plan stratégique elle est capable de rayer des nations entières de la carte, avec des armes dont nous commençons à suspecter l'existence (armes à antimatière, pudiquement appellées "armes nucléaires de 4° génération"). Sur le plan diplomatique, les Etats-Unis ont réussi quelque chose de sans précédent : se mettre le Monde Entier à dos, si on excepte Tony Blair et quelques membres de son entourage. Le seul allié de l'Amérique, c'est Dieu. Bush l'affirme. Si c'est vrai, ça ne serait quand même pas négligeable. Ce rapprochement Russie-Chine, s'il s'intensifiait, est un phénomène à ne pas perdre de vue. Si actuellement aucun pays ne pourrait tenir tête aux Etats-Unis, le tandem Russie-Chine pourrait y parvenir en une décennie. Le jeu planétaire pourrait être schématisé de la manière suivante :

- Les USA, dotés d'une forte avance technologique, mais ayant réussi à se mettre tout le monde à dos.
- La Russie, un instant déstabilisée par la chute de l'Empire, mais qui se cherche un nouvel allié : la Chine
- La Chine, doté d'un potentiel phénoménal, capable de surclasser le Japon en matière d'essor économique. Ambitions illimitées.
- L'Europe, vieillissante mais forte de "l'union" de ses vingt cinq composants. Beaucoup de monde, des activités diversifiées, et ... une monnaie forte.
- Le Japon, qui se remet d'une crise économique à laquelle il ne s'était pas préparé.
- Les pays arabes, qui détiennent de grosses réserves de pétrole et alignent maintenant une force stratégique d'un nouveau style : leurs kamikazes imparables.

Changeons de sujet : j'ai regardé de nouveau la série " Taken " de Spielberg. Je revois une scène où un scientifique est convoqué devant des experts du Pentagone qui lui déclarent "que les gens réunis autour de cette table dépensent 235 milliards de dollars par an dans leurs projets". Un des responsables raconte que des astronautes chargés de mettre un générateur nucléaire sur orbite, destiné à alimenter les systèmes à énergie dirigée venait de se l'être fait pîquer de manière très mystérieuse. L'homme prononce alors cette phrase :

Ce générateur était indispensable pour alimenter les lasers et les systèmes électrothermiques

Ce mot, je ne l'ai pas entendu prononcer depuis 1967. Il a une signification très précise en physique des plasmas et en MHD, mais je ne suis pas sûr que les Français s'en souviennent encore. L'instabilité de Vélikov, une des clés de la maîtrise des plasmas froids, bitempératures, est une instabilité électrothermique.

Comme dirait la cantatrice chauve : comme c'est bizarre, comme c'est étrange et quelle coincidence !

On n'a pas fini de s'amuser, décidément. J'ai appris que les Israéliens avaient différé leur projet de frappe sur l'Iran de deux semaines. Ca serait pour mi-mars 2005 et non plus février 2005. Donc on a le temps de partir au ski. Si vous lisez le Courrier International de décembre, vous verrez que ce raid est problématique car il nécessite impérativement un ravitaillement en vol, à moins que les Israéliens n'acceptent de perdre leurs appareils et leurs pilotes.

Deux trajects possibles, qui passent par le survol de l'Arabie Saoudite ou de l'Irak, cette seconde option impliquant que les Américains appuieraient le coup (solution intermédiaire : suivre la frontière entre les deux pays). Un journaliste a assisté à un "wargame" aux Etats Unis où des éminents spécialistes du Pentagone se sont réunis en une sorte de brainstorming pour étudier une éventuelle action contre l'Iran. Leur conclusion " On ne fait pas comme en Irak.. On effectue un raid rapide à partir de porte-avions. On dépose le gouvernement en place. On le remplace par d'autres gens, on détruit les installations nucléaires iraniennes et on rentre à la maison".

Un truc simple, quoi.

Dossier Koursk

Retour vers Nouveautés          Retour vers Guide            Retour page d'Accueil

Nombre de consultations depuis le 14 janvier 2005 :