Des images d'une tristesse insondable

25 septembre 2005

Ce Dimanche 25 Septembre, à l'occasion de la journée "Nation-Défense" et "Nationale du Réserviste" organisée par le Ministère de la Défense français.
Manifestation nationale organisée dans plusieurs grandes villes de France, comme ici, à Lyon.

 

Notez le vernis à ongles.



27 septembre 2005 :

Je crois que c'était Flammarion qui avait écrit " On croit mourir pour la patrie et on meurt pour les banques ". Si l'argent est le nerf de la guerre, le mensonge est le nerf de l'histoire. Allez jeter un oeil à cette brève évocation des confidences faites par Delouvrier, bras droit de de Gaulle, Haut Commisaire en Algérie pendant cette guerre sans nom. Des phrases où, pour soulager sa conscience, au seuil de la mort, il confesse avoir arrosé le FNL pour qu'on ne plastique pas le gazoduc qui amenait le gaz algérien jusqu'à la côte méditerranéenne, argent avec lequel les combattants pouvaient acheter des balles avec lesquelles de jeunes français seraient tués. Qui ressortira cette "affaire" ? Combien d'affaires de ce genre dans nos guerres à la française, récentes et ... futures.

Je me souviens d'une émission de " Cinq colonnes à la une" où des journalistes suivaient des convois partant de France, de la société Lucher si mes souvenirs sont exacts, transportant des obus. La moitié partait pour l'Irak et l'autre ... pour l'Iran.

Voilà ce qu'il faut apprendre aux jeunes Français. Que toutes les guerres sont sales et qu'elles le sont et le seront de plus en plus. Une arme, ça n'est pas un jouet. Cela s'approche avec gravité. C'est un domaine que je connais. J'ai été officier de tir pendant mon service militaire.

J'ai découvert "la sale guerre" à vingt ans et j'ai eu la chance de ne pas y partir. Elle s'est achevée juste à temps. A Supaéro, comme une douzaines de mes camarades je suivais une instruction militaire " PN ", personnel navigant. Finalité : devenir pilote de chasse, sur T6, des avions d'entraînement rachetés aux Américains, que les français avaient équipés de mitrailleuses de 12,7 et de bombes au napalm.

Nord Americain T6 rééquippé par les forces aériennes françaises pendant la guerre d'Algérie

J'étais entré à Supaéro par passion des avions et tout de suite j'avais profité des possibilité qui nous étaient offertes pour compléter ma formation de pilote, commencée à treize ans. Lâché sur ces merveilles qu'étaient ces Piper Cubs jaunes, sans radio, que l'on posait à l'aveuglette comme on tire sur les rênes d'un petit cheval ( la traduction de " Piper Cub " et " bébé Piper " ).

L'aviation, c'était cela, plus l'odeur d'herbe coupée sur le terrain de Guyancourt. Et puis un jour j'ai vu arriver un garçon de mon âge. Il avait les cheveux courts, disparaissait presque entièrement dans un blouson kaki qui doublait de volume sa maigre silhouette. Il avait deux ans de plus que moi. Il était en AFN, en "Afrique du Nord", de l'autre côté de la Méditerranée.

- Et là-bas, que fais-tu ?
- Du straffing
- C'est quoi, le "straffing" ?
- Tu descend près du sol et tu avoines les "fells" dans les mechtas.
- Mais comment tu sais que ce sont des fells ?
- C'est tout des fells, là-bas. On largue aussi sur les mechtas des bidons spéciaux.
- C'est quoi les bidons spéciaux ?
- Ben c'est du napalm. Comme on n'a pas de vrai viseur de bombardement on se sert du phare d'atterrissage, sur l'aile, pour viser. On se met en léger dérapage et on largue. Au bout de quelque temps on chope le coup.

Il avait l'ait éteint, tassé, prématurément privé de toute jeunesse. Le lendemain, à l'Ecole, j'ai dit à mes compagnons du groupe PN :

- Mais qu'est-ce qu'on va foutre là-bas, dans cette guerre à laquelle aucun de nous ne comprend rien ?
- Tu t'en fous, on volera.
- Oui, on volera, mais on tirera sur des types. Et ça, ça ne vous pose pas de problème ? Je veux bien faire une guerre, mais j'aimerais au moins comprendre les enjeux. Ca devient de plus en plus glauque, là-bas, ce truc ( on était en 1960 ). Si c'est pour voler, moi je préfère me payer des heures dans un aéroclub civil, en, dehors de ce bordel.

J'ai démissionné du groupe PN, qui conduisait à l'aviation de chasse. J'en avais la possibilité, c'est une chance. Le colonel Davy, chef du bureau militaire de l'Ecole ne comprenait pas.

- Enfin, vous êtes un bon pilote. Vous vous débrouillez très bien sur Stampe.

Cette guerre-là s'est vite achevée. Une autre prenait la suite, celle de l'OAS, de "l'organisation de l'armée secrète". J'étais à l'époque, le temps d'un service militaire de dix huit mois en charge de l'enseignement du tir pour toute une base aérienne. Je partais régulièrement avec un arsenal conséquent, faire tirer mes trouffions en pleine campagne. J'avais sous mes ordres deux adjudants mécaniciens qui avait servi sur des bases aériennes en Algérie et deux sergents des "commandos de chasse"".

Mes adjudants étaient nostalgiques.

- Ah, mon lieutenant, la vie sur une base opérationnelle, c'était autre chose, vous savez .....

Mais les jeunes sergents étaient plus dangereux. Deux tueurs, deux "hommes léopards", des sections paras de Bigeard qui montraient les photos de leurs tableaux de chasse aux soldats. C'était la coutume, de l'autre côté de la Méditerranée. On organisait un montage macabre avec les victimes d'une opération et on faisait "la photo-souvenir". En face, les gens du FNL égorgeaient et mettaient les testicules des victimes dans leur bouche.

J'avais immédiatement interdit ce genre d'exhibition et confisqué son poignard à un des sergents, qui s'en servait pour se curer les ongles pendant les cours de combat qu'il donnait.

- Sergent, donnez moi votre poignard !
- Oui, mon lieutenant
- Je vous le rendrait à la fin du stage.

Bonjour le regard.

Chaque semaine le journaux rendaient compte d'un coup de main opéré à travers lequel les membres de l'OAS récupéraient de l'armement. Les jeunes lieutenants de réserves comme moi étaient des proies toutes désignées. Je le sentais venir gros comme une maison. J'ai alors pris des dispositions en installant un fusil mitrailleur en batterie en permanence, sur un pratiquable, couvrant tout le stand de tir, qui était en plein air et en annonçant que si des gens s'avisaient de vouloir embarquer mes armes, je ferais immédiatement ouvrir le feu.

Mes deux lieutenant désertèrent, puis se firent arrêter en braquant .. la caisse d'un cinéma, pour alimenter celle de leur groupement. Sur eux, une liste de bonshommes à éliminer. J'y figurais.

La guerre, le terrorisme, les barbouze, les services secrets ça ne me passionne pas. Au bout du voyage il n'y a plus aucune victoire, aucune libération mais du sang, des larmes, des odeurs de pétrole, d'argent sale, des peuples qu'on écrase et quelques histoires minables. De l'honneur, point.

Ca ne signifie pas qu'il faille baisser la garde, tendre l'autre joue. Mais il ne faut se contenter de regarder le monde comme le fait ce gamin sur la photo, à travers un viseur, prolongement tangible de son jeu vidéo préféré, à la maison. Réalisez vous ce que nous mettons dans la tête de nos jeunes enfants avec notre machine à décerveler, la télévision ? Comptez-vous le nombre de meurtres dont ils sont témoins chaque jour ? Etait-il opportun de rendre de tels contacts possibles ?

Un lecteur me disait : " Moi, je suis dans un club de tir. J'apprends à mes enfants à ne pas avoir peur des armes".

Une stratégie qui peut mener fort loin. Songez au film de Moore " Bowling for Colombine ". Qu'est-ce qui a poussé ces deux jeunes à tirer sur leurs camarades avant de se donner la mort ? Le désespoir. Ce même sentiment qui a fait se jeter du haut d'un immeuble deux adolescentes, main dans la main.

Hitchkock a fait jadis un court métrage fantastique. Dans celui-ci un père de famille reçoit un jour son frère, militaire de carrière. Il a un fils qui a l'âge de ceux qu'on voir sur les photos. Son oncle paternel lui avait dit "je te ramènerai un cadeau, quand je viendrai".

Les trois adultes sortent. Le gamin monte dans la chambre de son oncle, avise sa valise et l'ouvre. Il y a trouve son colt à barillet avec une boite de balles. C'était donc ça, le jouet ! Inconscient, il glisse une balle dans le barillet et sort de la maison, habillé avec sa tenue de Cow-Boy. Il croise l'épicier. Il le vise.

- Pan ! Pan ! Tu es mort !

Jouant le jeu l'épicier fait mine de s'effondrer en riant. Le gamin fait rouler le barillet dans ses doigts. Le cliquetis l'amuse. C'est .. la roulette russe, mais il l'ignore totalement. A chaque fois qu'il croise une connaissance du quartier la même scène se reproduit, la même pantomime.

- Ah, je suis mort... dit le marchand de chaussures.

Entre temps les parents ont découvert la disparition du colt. Affolés, ils préviennent la police. Une "chasse à l'enfant" s'organise, avant qu'il ne soit trop tard. Celui-ci est découvert au moment où il vise la bonne. La mère hurle. Le coup part, descend la suspension. L'enfant, terrorisé, se met à pleurer.


28 septembre 2005 : Message d'un lecteur.


Monsieur Petit

Votre aversion pour l'armée prend des proportions qui tient de l'hystérie... Je dirais que ça devient même du domaine de la pathologie.
Je ne vois pas à ce vous avez à reprocher à ces images ou l'on voit deux enfants avec des armes. Dans leur yeux je vois c'est sûr une différence. Chez l'un on voit de la haine et chez l'autre de la curiosité voir de l'amusement.
Qui n'a pas joué au cow- boy ,au soldat ou au bandit quand il était gosse! Je me souviens de vacances passées dans le Var où avec mes enfants, nous avions assistés a une journée porte ouverte dans un centre de l'armée de terre à Fréjus. Tous les gosses s'étaient précipités sur les AM, chars AMX , et autres blindés en assaillant les soldats de questions. Alors voyez, il n'y a pas quoi en faire un fromage!
De plus arrêtez de nous bassiner sans arrêt avec la guerre d'Algérie, que j'ai vécue en tant que civil, et où j'ai perdu beaucoup d'amis civils massacrés par les égorgeurs du FNL
Ne vous déplaise, je dois la vie à la gégène de Massu et à ses paras...
En tous cas une chose est sûr, si un jour la France était en guerre, ce ne sont pas des gens comme vous qui la sauveraient.
C'est plus confortable de faire la guerre derrière un bureau armé d'un porte-plume.
Dommage, dans d'autres domaines je vous apprécie beaucoup.
Salutations

G. P. ( j'ai enlevé le nom )



 

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