Le mystère des Mées

8 août 2015

 

Le village des Mées. Dans le rond bleu la grotte, à 65 mètres de hauteur. Au loin, la Durance

 

C'est d'abord une curiosité géologique. En face du village se trouve la vallée de la Durance. Jadis, celle-ci était un puissant glacier qui s'étendait loin vers le sud. Le massif des Mées est ce qui reste de ses moraines, mélange de terre et de galets, que que les géologues appallent du "poudingue" (déformation francophone du mot anglais "pudding"). La moraine a été érodée par les pluies et le vent. Curieusement, dominant le village est restée cette étrange falaise dont les "capucins" atteignent 117 mètres de haut et se dressent, en surplonb, au dessus de la vallée.

A gauche, vous voyez l'amorce d'une vallée verdoyante, qui se comporte en fait comme un bassin de collecte des pluies. Avant la révolution française de 1789 ce bassin était exempt de végétation. Quand de fortes pluies déboulaient, le village était noyé. A cette époque les Méens ont demandé à la jeune république d'arranger cela. Ses ingénieurs on alors fait creuser une galerie de 450 mètres de long, dont vous découvrirez aisément la sortie à l'aplomb de la grotte. C'est une balade amusante, à faire avec une simple lampe de poche et des baskets, en famille. Ce tunnel débouche dans la vallée, où les ingénieurs avaient disposé des barrage pour briser la violence des flots et rediriger toute cette eau vers cette "conduite forcée". Elle se prolongeait par un viaduc, dont il reste quelques fragments, et qui renvoyait l'eau vers la Durance. Comme ce dispositif a empêché les pluies d'emporter tout sur son passage, la végétation s'est développée et maintenant barrages et conduite forcée deviendraient inutiles.

Ce qui est étrange, dans cette falaise, c'est ceci :

 

Cette anfractuosité, se situant à 65 mètres de hauteur.

 

Rapprochons-nous un peu.

 

Gros plan

 

Qu'est-ce que fiche cette croix là-haut, qui l'a posée, quand et comment ?

Le problème n'est pas simple car, même avec les moyens d'aujourd'hui le poudingue est impossible à grimper. Cette croix, on trouve sa trace dans des chronique du XV° siècle. J'ai été le premier à l'approcher, il y a 48 ans, en descendant en rappel. Impossible de la toucher : la falaise est en surplomb, et c'est d'ailleurs cette situation qui a pu protéger ces bois de la pluie. Quelques années plus tard un grimpeur, Patrice Cordier, a pu la toucher pour la première fois en descendant en rappel le long d'une coulée latérale, puis en effectuant une traversée en plantant force pitons dans ce matériau problématique. Ce faisant, il en a ramené un fragment.

J'ai approché l'objet plusieurs années plus tard. Pour s'accrocher au "poudingue" la technique consiste à forer sur 50 cm de profondeur avec une longue mèche de 2 cm de diamètre, actionnée par une perceuse à accu, puis de sceller une tige filetée dans ce trou avec de la résine. Avec une telle technique, qui a été mise en oeuvre et a permis une nouvelle fois de toucher cette croix, il serait alors possible d'installer un praticable et de permettre à des archélogues de travailler à 65 mètres de hauteur, en les hissant avec un treuil et un harnais. J'expliquerai tout cela.

Si vous regardez la photo précédente, vous verrez qu'il y a une formation bizarre, au somment de cette anfractuosité. Voici une vue au télé-objectif :

 

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On distingue en bas et à droite des trainées blanchâtres qui sont des fientes de corneilles, lesquelles nichent là-haut et disparaissent ... on ne sait où.

Depuis que je me suis intéressé à cette croix j'ai vite émis l'hypothèse qu'elle pourrait avoir été installée ... par en haut. D'en bas on ne voit pas comment des gens, en ces époques reculées, aurait pu procéder à sa mise en place. Ce disque sombre serait alors la partie visible d'une dalle faite de poudingue. Quant à la croix, eh bien il faut que l'ange qui, le jour du jugement dernier, ira chercher la dépouille du gazier enterré là-haut ne l'oublie pas.

Quand j'étais moniteur d'escalade en Belgique, il m'est arrivé de trouver, dans un falaise près de Dinant, une grotte avec une tombe cresée dans le calcaire, parfaitement taillée, parallélépipèdique, mais vide. Des hommes se faisaient donc enterrer en falaises (comme les Dogons). Mais celui-là n'avait pas eu de chance. Sa tombe avait du être pillée et ses restes dispersés.

La grotte des Mées et sa croix signaleraient-elles la présence d'une tombe ? Si oui, l'accès aurait été ménagé à l'aide d'un tunnel (le poudingue se creuse très rapidement et facilement). Dans ce cas, quel meilleur moyen d'en masquer l'entrée que de construire une chapelle dessus ? Ci-après la chapelle Saint Roch, à 250 mètres à vol d'oiseau, ou chemin de taupe, de notre croix.

 

La chapelle Saint Roch

 

Et pour terminer la disposition présumée du tunnel d'accès :

 

 

Indiana Jones près de chez vous ....

 


 

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