ITER : Le bateau coule normalement

10 décembre 2011

 

A l'automne 2011 j'avais, à la demande de Michèle Rivasi, rédigé une note de 13 pages à l'attention de la Commission Information-Recherche-Energie du parlement européen, qu'elle commença à distribuer à la quarantaine de députés francophones concernés. Depuis, cette note a été traduite en anglais et sa diffusion se poursuit, pour s'étendre au 124 membres de cette commission. Son titre, évocateur :

Iter, chronique d'une faillite annoncée

Peu de temps après, la revue Nexus décide de publier la copie conforme de cette note dans son numéro de novembre/décembre.

A la même époque, Michèle Rivasi reçoit une lettre furibarde de l'étudiant Cédric Reux, auteur d'une thèse de doctorat soutenue en novembre 2011 à l'IRFM, Institut de recherche sur la Fusion Nucléaire, sis à Cadarache, thèse consacrée à l'étude des "disruptions" dans les tokamaks. L'adresse où cette thèse peut être téléchargée :

http://pastel.archives-ouvertes.fr/pastel-00599210/en/

Dans cette thèse j'avais personnellement découvert ce qui était su de longue date (trois bonnes décennies) : que les tokamaks étaient des machines instables, sujettes à des instabilités de grande ampleur, appelées "disruptions", se traduisant par des coups de foudre intérieurs particulièrement rapides, imprévisibles, violents et destructeurs. Très justement, ce garçon disait, dans son préambule et sa conclusion, que ce phénomène devrait être maîtrisé, sous peine de créer des dommages sérieux dans le tokamak géant qu'on s'apprête à construire en France, précisément à Cadarache, le tokamak ITER.

J'avais cité quelques passages extraits de cette thèse dans cette note. Dans sa lettre (qui n'était pas, je pense, de sa main) Cédric Reux s'insurgeait contre le fait que j'aurais, disait-il, utilisé de manière partisane des fragments de sa thèse pour en détourner l'esprit.

Il était visible que cette lettre, qui évoquait sans équivoque l'examen d'un recours en justice, ressemblait fort au préambule d'un procès en diffamation, que le CEA et ITER ORGANIZATIOn auraient puissamment appuyé en fournissant au plaignant force témoignages montrant que mon article aurait été pour lui cause de préjudice professionnel.

Très vite, j'ai publié la version complète de ce document, qui rendait complètement ridicule le contenu de cette lettre, étant donné que dans ce document de 115 pages figuraient 880 lignes extraites de la thèse de Cédric Reux.

Je ne détournais pas son contenu, je me contentais de le présenter. Le lecteur pourra consulter ce document en activant le lien suivant.

Iter, chronique d'une faillite annoncée, dossier complet

Toujours poussé par le CEA, le fantassin Reux souhaita rencontrer dame Rivasi, en lui fixant rendez vous à une adresse parisienne, qu'il indiquait. Au passage, il avait marqué quelque réticence quand la députée européenne avait exigé que je sois présent. La date avait été arrêtée : le 16 novembre 2011, à 19 h 30.

Entre temps, un journaliste, intrigué par la lecture de l'article paru dans Nexus, avait contacté Michèle Rivasi en demandant s'il lui serait possible de filmer l'entrevue, en se proposant de reproduire, sans coupure ni commentaire, l'enregistrement dans son site Enquête et Debat. Elle accepta.

Il restait à avertir le sieur Reux de cette décision. C'est alors que les choses se compliquèrent. Michèle Rivasi découvrit que l'adresse proposée n'était pas, comme elle l'avait cru, l'adresse des parents de Cédric, mais celle ... du siège parisien du CEA !

En même temps, Michèle Rivasi reçut une longue lettre émanant de Bernard Bigot, administrateur général du CEA, lui indiquant qu'un face à face entre Cédric Reux et moi était exclu, que le CEA s'y opposait fermement, et que lui et Alain Becoulet, responsable du département "chauffage du plasma", et directeur adjoint de l'IRFM seraient également présent à cette rencontre, qui ne pourrait se faire qu'au CEA, et sans journaliste.

La députée européenne ne l'entendit pas de cette oreille et maintint le lieu de la rencontre dans un simple bureau de l'Assemblée Nationale, celle-ci devant être filmée.

A trois contre un, cette rencontre aurait dû leur sembler jouable. D'autant plus qu'il n'était nullement question pour moi de lancer des attaques contre le jeune Cédric Reux, mais de le féliciter au contraire pour la clarté et la précision de sa thèse de doctorat. Mais je me serais refusé à avaler une conclusion, disons "revisitée", qui aurait été en contradiction flagrante avec son contenu.

Sans prévenir, les trois ne vinrent pas au rendez-vous. le journaliste filma donc une interview où seuls Michèle Rivasi et moi-même pûmes nous exprimer, en l'absence de contradicteurs. On trouvera cette vidéo à cette adresse :

 

Rivasi JPP 16 nov 2011

http://www.enquete-debat.fr/archives/michele-rivasi-et-jean-pierre-petit-a-propos-diter

 

Le lendemain de cette séance, c'est à dire le 17 novembre 2011 le CEA, e, sans prévenir le moins du monde les intéressés, à savoir Michèle Rivasi, la revue Nexus et moi, le CEA installa dans son site un commentaire de 10 pages en anglais, et sa traduction en français, se référant à la note diffusée au sein de la commission Energie du Parlement Européen. Un texte dépourvu de toute signature, assorti de propos assez appuyés, comme :

 

Nous sommes affligés de constater la légèreté avec laquelle des informations scientifiques publiées dans des revues de renommée internationale, leurs auteurs, mais également les lecteurs de l’article lui-même, y sont manipulés à des fins partisanes étrangères à la recherche et aux progrès des connaissances.

Par un tel comportement intellectuellement malhonnête, Mr J.P Petit se disqualifie lui-même ipso facto du débat, qu’il soit scientifique ou sociétal.

La réponse logique à une telle diatribe aurait été un débat filmé avec l'auteur du dit texte. Le journaliste qui avait filmé l'interview avec Michèle Rivasi téléphona donc au CEA pour s'enquérir de son identité. Mais il lui fut répondu que ce texte émanait d'un groupe de personnes, dont aucune ne souhaitait que son nom soit mentionné, ni ne souhaitait débattre avec moi.

Déconcerté, il se tourna donc vers celui qui, in fine, se trouve être le responsable au plus haut niveau de ce qui se dit, s'écrit ou se fait au CEA, à savoir Bernard Bigot, administrateur général, qu'il ne put contacter que par personne interposée. La réponse, téléphonique, finit par lui parvenir. Une face à face entre Bigot et moi n'était simplement pas envisageable. L'interlocutrice répercuta la réaction de Bigot en disant :

- La seule chose qui soit possible, et qui tient toujours, est que madame Rivasi rencontre monsieur Bigot au CEA, seule, sans monsieur Petit, et en l'absence de journaliste. Ainsi monsieur Bigot, qui a l'habitude de s'adresser à des politiques, serait à même de lui fournir toutes les informations nécessaires et de répondre à ses questions.

Je crois que monsieur Bigot ne se rend pas très bien compte dans quoi il a mis les pieds et ce qu'entraînera sa réponse arrogante. Ce que montre cette situation, c'est que nos "nucléocrates" se situent au dessus de toute critique et remise en cause possible. "Informer", oui. Débattre ? Hors de question !

Dans cette réponse du CEA je suis décrit comme un lamentable amateur, accumulant les erreurs et les confusions. Je vous laisse le soin de découvrir ce texte. Il faut se référer à la page :

http://www-fusion-magnetique.cea.fr/en_savoir_plus/articles/disruptions

pour trouver en bas de page cette "réponse" du CEA, suivie de sa traduction en anglais.

http://www-fusion-magnetique.cea.fr/en_savoir_plus/articles/disruptions/analyse_critiquearticle_petit_nexus_vf.pdf

Sa version anglaise :

A rebuttal prepared by the French Commission of Atomic and Alternative Energies in reply to an article entitled "ITER: Chronicle of an Inevitable Failure" published by Mr. Jean-Pierre Petit in the November 12th issue of the review Nexus

C'est bien la toute première fois que le CEA commente un document quelconque, doublé d'un article paru dans la presse (Nexus) et cela, non sur quelques lignes, mais au long de plus de dix pages. Il faut vraiment que ce texte les aient touchés pour que cela provoque une réaction d'une telle ampleur.

Dixit Michèle Rivasi, au moment où il devint évident, le 16 novembre 2011, que la rencontre se tiendrait sans les sieurs Bigot, Becoulet et Reux :

- Il faut vraiment que tu leur foutes une sacrée trouille pour qu'ils se déflent à ce point !

C'est le cas. Car quand on est sûr de soi, et de la nullité d'un adversaire, on l'affronte publiquement, on le défait et on le ridiculise aux yeux de tous, en particulier des citoyens du pays. Seulement voilà, si Bigot, Becoulet et Reux étaient venus à l'Assemblée Nationale le 16 novembre, pour un débat filmé, qui aurait été défait et ridiculisé ???

Le fait est qu'en explorant simplement les tenants et aboutissants d'ITER, qui est le premier tokamak de grande taille, j'ai mis la main sur une masse croissante de documents, de plus en plus éclairants. Il y a eu d'abord, très vite, outre la thèse de Cédric Reux, celle de l'Anglais Andrew Thornton (janvier 2011) :

http://etheses.whiterose.ac.uk/1509/1/AT_thesis_FINAL.pdf

puis un retour vers l'audit scientifique mené par l'Académie des Sciences de Paris, en 2007, sous l'égide de l'académicien Guy Laval, consacré aux perspectives d'exploitation de la fusion pour produire de l'énergie :

http://www.bibsciences.org/bibsup/acad-sc/common/articles/rapport6.pdf

Dans ce rapport j'ai trouvé, au chapitre 2, page 69 la confirmation qu'il existait effectivement un parallèle étroit entre les disruptions, se produisant dans les tokamaks, depuis les premiers essais menés sur ces machines et les ... éruptions solaires, dont connaît la violence inouïe. L'une des signataire de cet article était précisément madame Pascale Hennequin, directrice de la thèse de Cédric Reux !

 

Eruption solaire

Des disruptiuon naturelles : les éruptions solaires

Si on revient au texte mis en ligne par le CEA le 17 novembre 2011, soit le lendemain même de la date qui avait été prévue pour une rencontre avec Michèle Rivasi et moi, on est tenté de se dire que ce texte, en deux langues, avait été conçu pour pouvoir être remis en mains propres à la députée européenne, afin que celle-ci puisse diffuser cette mise au point aux 124 membres de la Commission Information Recherche Energie, après que Bigot et Bécoulet aient pu la convaincre de la nullité des propos que j'avais tenus dans le document que j'avais conçu pour elle.

Mais tout ne s'est pas passé comme le CEA l'espérait. Visiblement, la maison peine à trouver un champion susceptible de venir à bout de l'amateur-trublion que je suis, qui ne cherche qu'à mettre ces gens face à leurs propres érits et déclarations.

J'avais déjà été confronté à une telle dérobade durant l'été, au moment des sessions de la Commission d'Enquête Publique auxquelles j'ai participé. A l'automne André Grégoire, animateur et président de l'Enquête publique diligentée par le préfet des Bouches du Rhône m'avait dit :

- Il faut se rendre à l'évidence : les responsables scientifiques locaux du projet ITER semble tenir à leur anonymat (...).

Le 16 novembre 2011 Bigot et Bécoulet déclarèrent donc forfait. Ne parlons pas de ce pauvre Reux, qui dans tout cela n'y est pour rien et n'est coupable que... d'avoir fait son travail avec un peu trop de conscience et de clarté d'exposition de ses résultats.

Forfait lamentable également devant mes demandes de débats filmés, en réponse aux attaques insultantes dont j'ai été l'objet.

La "Grande Presse" reste silencieuse. Le mot " disruption " n'est pas encore apparu dans ses colonnes. Tout est donc pour le mieux dans les meilleurs des plasmas instables possibles. Mais ce problème finira bien par s'imposer et faire tache d'huile. Il est dommage que cette information n'ait pas été reprises avant que ne soit prise la décision, positive, par le Parlement Européen, d'approuver l'extension du budget d'ITER, de 5 à 15 milliards d'euros, avec une quotte part européenne se montant à 1,3 milliards d'euros, ce qui n'est pas rien (sans qu'on ait apporté de précision sur les budgets dans lesquels cette rallonge serait prélevée).

La décision définitive sera prise Lundi 12 décembre 2011, en séance plénière, à l'issue d'un vote. Une décision qui sera prise par des parlementaires non-informés, ou plutôt désinformés, "enfumés", pour reprendre l'expression favorite de Michèle Rivasi, laquelle, lors d'une visite estivale du site de Cadarache, au sein d'une délégation parlementaire venue pour se faire expliquer pourquoi le budget du projet avait soudain triplé, avait découvert que celui-ci ne faisait l'objet ... d'aucune assurance !

En poussant son enquête plus loin, elle reçut la réponse suivante : "Vous touchez là un point sensible, car les Etats ne veulent pas en supporter le coût ".

D'autres voix lui répétèrent qu'il n'était pas nécessaire d'assurer une telle machine, vu que "si un disfonctionnement survenait, les réactions de fusion s'arrêtaient d'elles-mêmes". Dans de telle conditions, assurer la machine aurait dû représenter une charge des plus modestes et une bonne affaire pour une commagnie d'assurance. Mais alors, dans ces conditions, pourquoi aucune ne s'était-elle présentée pour asurer un engin par essence aussi rassurant ? Pourquoi aucun pays n'avait-il accepté d'en supporter un coût a priori aussi modeste?

De facto, si quoi que ce soit survient, ce sont les collectivités locales, et l'Etat français qui payera ces nucléopots cassés.

Un jour on entendra des gens poser la question " faut-il arrêter le projet ITER ?"

En intervenant avant la construction de cette maudite machine, il aurait été moins coûteux de suspendre ces travaux, en attendant que cette question de la maîtrise des disruptions ait pu être réglée (si elle peut l'être un jour, ce qui n'est franchement pas évident). On évalue à 3 milliards d'euros les indemnités qu'il aurait fallu verser aux entreprises qui avaient investi pour pouvoir faire face à de nombreuses commandes qui avaient déjà été passées.

Mais 3 milliards, c'est quand même le cinquième de 15.

Comment évoquer en quelques mots ce problème des disruptions ? Laissons à d'autres le soin de s'en charger.

Ce fut le thème central d'un colloque qui s'est récemment tenu, en septembre 2011, à Princeton, US (la Mecque de la Fusion).

 

Princeton sept 2011

http://advprojects.pppl.gov/ROADMAPPING/presentations.asp

Dans ce colloque, une communication d'un "senior researcher", Wurden. Titre de sa communication :

Dealing with the Risk and Consequences of Disruptions in Large Tokamaks:

Examen des risques et des conséquences des disruptions dans les grands tokamaks


http://advprojects.pppl.gov/ROADMAPPING/presentations/MFE_POSTERS/WURDEN_Disruption_RiskPOSTER.pdf

 

Ci-après, une des pages de ce pdf, au contenu des plus explicites :

 

Iter plus bonhomme

ITER sera-t-il le dernier tokamak construit ?

 

La même page, traduite en français :

 

Iter plus bonhomme en français

 

Nous avons fait effectuer une traduction de ce pdf en langue française, et cette traduction a été revue avec attention par un spécialiste des tokamaks. Ce texte peut sembler assez sommaire. Il ne s'agit pas d'un article, mais de la traduction pdf, faite par son auteur dans la version anglaise, d'un powerpoint dont il s'est servi pour sa présentation (qui est l'équivalent d'une série de diapositives, de "slides"). Afin de coller le plus possible au texte, beaucoup de passages ont été transcrits au mot à mot.

Il ne s'agit pas de présenter un document "en bon, français", mais de bien noter le contenu de cette communication qui, d'une certaine façon reflète la position américaine, vis à vis du projet ITER.

La traduction en français du pdf de Wurden

Les Américains sont, avec les Russes, les grands spécialistes des plasmas chauds. Ils ont une vaste expérience des tokamaks. Wurden insiste bien pour dire que les disruptions représentent le verrou de cette technologie. Ce sont des phénomènes qui ne sont absolument pas maîtrisés. Comme le notait un spécialiste des tokamaks dans un forum : "quand les concepteurs d'ITER se sont mis sur leurs planches à dessin, ils ont sous-estimé le problème".

Le premier design d'ITER remonte à une vingtaine d'années, et démarra peu après la percée effectuée, en 1997, sur le tokamak JET, situé à Culham, où la fusion put être obtenue pendant une courte seconde avec un rapport Q = puissance thermique produite sur puissance injectée, de 0,67.

Quand ce design fut lancé, les concepteurs pensèrent peut être que ces problèmes pourraient être maîtrisés. Or il n'en a rien été. Le 24 octobre 2011 le CEA a mis sur son site une page montrant l'atténuation d'une disruption par injection de gaz froid. Une technique initiée il y a une dizaine d'années, poursuivie à travers les thèses de Reux et de Thornton.

Ce que le CEA s'abstient de dire c'est que les expériences réalisées à ce jour l'ont été en opérant sur des plasmas stables, ce qui est dit explicitement dans la thèse de Reux. Ce qui revient à tester un extincteur sur un "non-incendie".

Mais la disruption survient cependant. Parce qu'une fuite de gaz, un envahissement par un polluant provoquent immanquablement une disruption. C'est une cause parmi de nombreuses autres possibles. Mais, stricto sensu, ces essais ne peuvent être considérés comme concluants. D'où les mots employés dans le texte du CEA me critiquant :

- Les résultats actuels sont encourageants, et on peut raisonnablement penser qu'une ou même plusieurs de ces méthodes innovantes, au delà de celle déjà disponible, seront au point en 2019-2020 pour le premier plasma d'hydrogène, et à plus forte raison en 2026 avec le premier plasma deutérium-tritium.

Il s'agit d'un simple acte de foi, d'un pari risqué. L'histoire de la physique des plasma abonde de situation où l'espoir n'a pas suffi (exemple : la production d'électricité par des générateurs MHD, entre 1960 et 1980, jusqu'à abandon final, après l'échec de dizaines d'équipes, de milliards de dollars dépensés, dans une dizaine de pays, mobilisant des milliers de chercheurs).

Wurden critique ce pari, en allant même jusqu'à dire que si l'entreprise ITER est un fiasco, ou s'enlise, cet échec rejaillira en jetant le discrédit sur l'idée même d'extraction d'énergie par la fusion. Il martèle l'idée que, toutes affaires cessantes, toutes les équipes travaillant sur les tokamaks doivent se concentrer sur ce problème des disruptions, "before ITER".

Le lecteur traduira ce "before" comme il le voudra. La simple sagesse, étant donné que dans le monde entier, toutes les équipes piétinent sur cette question des disruption depuis des décennies, serait de suspendre le projet en attendant que le problème soit maîtrisé.

Comme le note Reux dans son préambule, ces disruptions ont jusqu'ici été la cause de dégâts relativement minimes. A l'échelle de machines comme ITER, ceux-ci prendraient, note-t-il, une toute autre envergure.

Quant à Thornton, il écrit, page 14 de sa thèse :

- The disruptions will case severe damage to future tokamaks and would be a catastrophy in power plants tokamaks.

Traduction :

- Les disruptions seront la cause de dommages sévères sur les futurs tokamaks (dont ITER est le chef de file). Sur des "tokamaks de puissance" ( à l'échelle de machine sursceptibles de produire plus d'un millier de mégawatts électriques ) un tel phénomène serait simplement catastrophique.

J'ai été, dans la critique du CEA, taxé de malhonnêteté intellectuelle, sans même pouvoir connaître le nom, ou les noms de ceux qui avaient écrit ces mots.

Jamais, dans ma carrière, dans toute mon existence, je n'ai été insulté de cette façon par des gens qui sont censés occuper des postes de responsabilités. Je suis au quotidien traité de tous les noms possibles, dans des forums, par d'illustres inconnus, dont on ne coinnaît ni le nom, ni les états de service, ni la formation à laquelle ils sont censés appartenir.

Là, je ne connais pas les auteurs de ce texte dirigé contre moi. Mais une chose est sûre : ce sont des gens du CEA.

En face à face, mano a mano, jamais de tels imbéciles n'auraient pu lancer de telles critiques sans que je ne réponde avec fermeté. Je n'ai pas la réputation de mâcher mes mots. Et c'est peut être à cause de cela, et du fait que l'ensemble aurait été filmé et mis sur la place publique que les sieurs Bigot et Becoulet on préféré s'abstenir de venir au rendez-vous du 16 novembre, à l'Assemblée Nationale. Et c'est toujours pour la même raison que les auteurs du texte qui me salit ne souhaitent ni se découvrir, ni me faire face dans un débat filmé.

Car en fait on est en droit de se demander de quel côté se situe la malhonnêteté intellectuelle. Les auteurs anonymes prétendent que le CEA n'a jamais cherché à dissimuler le fait que les tokamaks souffrent d'une instabilité chronique. Le document de référence cité est "ITER Physics Basis" où "plus de 35 pages sont consacrées au sujet". Un texte publié en 2007 dans le journal Nuclear Fusion.

Mais qui a eu accès à ce document ? Le public ? Les politiques ? Les décideurs ?

Allons donc ! Jusqu'à ce que je mette en ligne des dossiers sur ce sujet qui, à part les spécialistes d'une discipline soigneusement sanctuarisée connaissait le mot ... disruption ?

J'adresserai au CEA, et plus particulièrement à son Administrateur Général, Monsieur bernard Bigot, un texte, avec prière d'inserrer, au titre d'un légitime droit de réponse. Mais cet envoi sera-t-il suivi d'un écho quelconque ? On peut en douter. C'est la raison pour laquelle ce texte figurera dans une des annexes du livre que Michèle Rivasi et moi-même sommes en train d'écrire, et qui sera publié le plus vite possible. Un ouvrage qui se voudra lisible par le plus large public possible.

Le drame de Fukushima nous a appris que le monde du nucléaire pouvait comporter d'immenses pans d'irresponsabilité et d'incompétences. La position française consiste à se réclamer d'une excellence dans ce domaine de techno-science qu'est le nucléaire. L'affaire ITER, qui ne fait que commencer, révélera qu'en France ce projet est géré par des gens qui ne sont pas à la hauteur des responsabilités dont ils sont les détenteurs, par une constellation de spécialistes, pointus dans tel ou tel domaine, mais dont aucun n'a une vision d'ensemble du projet. Et qu'en fait :

ITER est un corps sans tête

A titre de conclusion de cette page, je regrette de ne pas avoir été en position de pénétrer dans cette connaissance des tokamaks et de découvrir au passage leurs failles, ce qui m'aurait permis d'informer le public et les politiques-décideurs. Je ne sais pas quand la "Grande Presse" reprendra le ballon , ni même si elle le fera.

 


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