Non-débat à l'Assemblée Nationale

9 janvier 2012

Plus bas, un dossier sur la guerre avec des drones

Je suis assailli de messages de lecteurs, me demandant de parler de ceci, de cela. Chaque sujet représente un paquet d'heures de travail. Pour le moment je me suis concentré sur le nucléaire.

Là, il y a urgence, car notre avenir est entre les mains de fous complets.

Le 17 novembre 2011 s'est tenu à l'Assemblée Nationale un audit, piloté par deux pro nucléaire patentés : les députés Christian Bataille (Nord-Calvados, socialiste, 65 ans) et Bruno Sido (Sénateur UMP, de Haute Marne, 60 ans, ancien ingénieur agronome vice-président de l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Technique) .

On peut se demander pourquoi je précise les noms de ces gens. On comprendra plus loin.

 

Faites l'effort de visionner ces deux vidéos, qui constituent ces auditions d'une commission parlementaire sur le thème " l'Avenir du Nucléaire" ( 5 ou 6 heures d'écoute ! ). Vous pourrez apprécier le ton patenôtre du député Christian Bataille, et le ton également apparemment objectif et désengagé de Bruno Sido. Mais vous détaillez la composition du groupe des intervenant, vous verrez que tout est arrangé pour parvenir à la conclusion "hors du nucléaire, point de salut !"

 

Christian Bataille

Le député du Nord Christian Bataille

 

Sido

Bruno Sido, sénateur, coprésident de la séance
Vice président de l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Techniques

 

Absence totale de contestation scientifique et technique. Un pseudo débat. C'est lamentable, choquant.

.

Sylvain David

Sylvain David, du CNRS : le déploiement des réacteurs de génération IV serait achevé en 2100 (...)

 

Pascal Garin

Pascal Garin, directeur adjoint pour la France du projet ITER

 

C'est vraiment la réunion d'un club du 3° âge. La présentation d'ITER par Garin est au ras de pâquerettes. Si j'avais été là et lui avais demandé ce qu'était une disruption, il aurait sans doute ouvert des yeux ronds. Mais ce sont ces bonshommes qui nous gèrent.

Les participants de ce "débat"

http://www.assemblee-nationale.tv/chaines.html?media=3012&synchro=0

http://www.assemblee-nationale.tv/chaines.html?media=3013&synchro=0

 

Au cours de cette journée (où le député Yves Cochet a été le seul "contestataire", qui a émis pendant 10 minutes quelques protestations vis à vis des projets envisagés. Les présents, essentiellement des représentants du CEA, d'ITER-France (Pascal Garin), d'Edf, d'AREVA, ont tiré leurs conclusions. C'est simple. Les énergies renouvelables ne pourraient en aucun cas permettre de faire face aux besoins en énergie de la Terre. Mais la France a une solution. Elle dispose d'une réserve de

300.000 tonnes d'uranium "appauvri", issu des opérations d'enrichissement depuis le début du nucléaire en France

Cette réserve, à condition de pouvoir l'utiliser, représenterait de l'énergie pour 5000 ans.

La formule est alors le bon vieux surgénérateur à neutrons rapides. On charge le coeur d'un réacteur avec cet uranium 238 et du plutonium, et on fait fonctionner celui-ci sans modérer les neutrons, sans les ralentir (actuellement, dans les REP, nos réacteurs à eau pressurisée, avec de l'eau légère).

Pour garder aux neutrons de fission leur énergie d'émission ( 2 MeV ) il faut un fluide caloporteur qui soit "transparent", vis à vis de ce flux neutronique, en l'occurrence du sodium.

On connait les mésaventure de Superphénix, installé à Creys Malville, en dépit de la manifestation désespérées de 60.000 militants anti-nucléaires (un mort, deux blessés graves). Mais le CEA projette de construire un nouveau générateur à neutrons rapides, ASTRID, qui devrait être installé à Marcoule, dans le Gard. Décision en 2012, achèvement en 2020.

On voit donc que cette idée tient toujours.Nos chers nucléopathes n'ont pas abandonné. Ce suit est extraordinaire c'est de comprendre dans quel contexte elle s'inscrit.

- Les réacteurs de génération I sont les premiers installés en France, avant les années 1970.

- Ceux de la génération II sont les machines actuelles, à uranium et eau pressurisée (REP Réacteurs à Eau Pressurisée, à 155 bars ).

- Les EPR (European Presurized Reactors) constitueraient la génération III. Ce sont toujours des réacteurs à eau pressurisée, mais plus puissants (1600 MW électriques) à double enceinte de confinement et récupérateur de corium (en cas de fusion du coeur, de percement de la cuve et de chute du combustible fondu sous le réacteur).

 

EPR

L'EPR et son récupérateur de corium, en jaune

 

- Les surgénérateurs la génération IV

Le MOX (mixed oxydes) est un passage discret au combustible plutonium, issu du retraitement des "combustibles usés". En effet le combustible de base des réacteurs est à la base de l'uranium 235, extrait par raffinage (au centre de Tricastin). Le minerai naturel contient 0,7% de 235 et 99,3 % de 238.

Le raffinage, par ultracentrifigation en phase gazeuse d'hexafluorure d'uranium (dans des centrifugeuses, tournant sous vide,sur paliers magnétiques, à plus de 1000 tours seconde ) du minerai permet d'obtenir de l'uranium enrichi avec 3 à 5 % de 235. Alors le réacteur peut fonctionner en utilisant l'eau légère (de l'eau "normale") comme modérateur, comme ralentisseur de neutrons.

Les premiers réacteurs ont fonctionné avec le minerai brut, ce qui nécessitait un passage à un modérateur constitué par de l'eau lourde (où les atomes d'hydrogène sont constitués de deutérium).

Quand les réacteurs à eau pressurisée sont chargés avec ces éléments combustibles, la fission crée des déchets à haute toxicité. Certaines collisions de noyaux avec des neutrons ne créent pas de fissions, mais transforment des atomes en isotopes radioactifs. Certains neutrons, assez rapides, provoquent la transmutation de l'uranium 238 en Plutonium 239. Même dans un réacteur "normal" il y a toujours production de plutonium (le plutonium représente 1% de sa charge résiduelle).

On peut alors extraire ce plutonium chimiquement, puisqu'il n'a pas les mêmes propriétés chimiques que ses voisins. Alors qu'on ne peut pas séparer les deux isotopes de l'uranium chimiquement. (Ayant les mêmes cortèges électroniques, ils sont dotés des mêmes propriétés chimiques).

L'obtention d'uranium de qualité militaire ( 90 % de 235 minimum ) nécessitait des opérations d'enrichissement laborieuses et coûteuses. Par contre il était plus facile d'obtenir un mélange à haute teneur en plutonium 239, par simple extraction chimique. C'est la raison pour laquelle c'est l'explosif-type des bombes.

Dans les réacteurs militaires, la fabrication du plutonium est une priorité. Il n'y a aucune différence fondamentale, de principes de fonctionnement, entre les réacteurs à neutrons lents et les réacteurs à neutrons rapides. Tout dépend du "tirage de poêle", du régime où fonctionne cette "chaudière". Tout cela est expliqué dans ma BD Energétiquement vôtre, gratuitement téléchargeable dans le site de Savoir sans Frontières.

Les réacteurs actuels, à eau pressurisée, ne sont pas conçus pour pouvoir fonctionner en régime de neutrons rapides. Mais 50 % de nos réacteurs voient leur coeur dotés d'un certain pourcentage de MOX, du futur combustible : 94 % d'U238, 6% de Pu239.

L'EPR est conçu pour fonctionner avec 100 % de MOX.

Il suffira de passer au système du surgénérateur pour que le MOX se comporte comme combustible de ces nouveaux engins. Dans ce mode de fonctionnement, les neutrons rapides transformeront l'uranium 238, faisant office de "couverture fertile", en Plutonium 239. Celui-ci pourra être récupéré chimiquement. Ainsi "le surgénérateur fabriquera autant, ou plus de combustible qu'il n'en consomme". Dans cette situation "de rêve" la France deviendrait totalement indépendante au plan de l'énergie électrique, n'ayant plus qu'à exploiter cette "mine" que représentent ses 300.000 tonnes d'uranium 238, qui lui assure 5000 ans d'autonomie.

On passe évidemment sur la dangerosité des ces installations, sur la dégradation de l'environnement et le problème d'une masse de déchets toxiques.

Un paramètre important, concernant la toxicité des substances radioactives concerne leur capacité à se fixer dans les tissus humains. Sur ce plan, le plutonium est redoutable car il peut se fixer dans des tissus humains, par inhalation ou ingestion, et rester dans le corps pendant un temps qui dépasse la vie humaine. Il s'agit alors d'une contamination, qui n'est absoluement pas détectable, ou localisable. Un grain d'un millligramme peut ainsi exercer son action pathogène pendant des années et provoquer des cancers.

Ce ce fait, un accident du type Fukushima, avec des réacteurs chargés au plutonium pourrait avoir des conséquences catastrophiques et irrémédiables sur les populations. La seule réponse donnée par nos " nucléopathes " consiste à affirmer que les réacteurs français fonctionnent avec un haut niveau de sureté.

En Bref il faudra attendre que se produise en France un accident majeur pour que les mentalités évoluent.

Et encore.....

Quand on entend parler les intervenant dans ces vidéos, on se demane s'ils ont des enfants ou des petits enfants. Leur aveuglement semble sans faille. Ils n'ont à la bouche que les mots " exportations, balance des paiements, emplois ".

La visite effectuée à Fukushima par certains ne semble nullement avoir changé leur point de vue.

Pour passer à ce nouveau redéploiement, il faudra, dit Sylvain David, "expert du CNRS", intervenant lors de cette audition d'experts à l'Assemblée Nationale, 1000 tonnes de plutonium. En effet le chargement de démarrage serait de 16 à 20 tonnes de Plutonium. La France ne disposerait donc actuellement que de quoi assurer le chargement de 15 à 18 réacteurs. Pour déployer 60 réacteurs il faudrait effectivement 1000 tonnes de plutonium.

Et Sylvain David d'ajouter, qu'en vue d'un tel redéploiement, il faut considérer le plutonium produit, non comme un déchet, mais comme une matière précieuse, qu'il ne faut donc pas "vitrifier", mêler à du verre pour stockage "de longue durée".

Passons sur les dangers que représente un tel stock ( 60 tonnes à la Hague, 240 ailleurs ). Ce qui est fabuleux, c'est le "timing", qui figure à la fin du rapport produit par Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Techniques, en 2011.

 

deploiement nucléaire 2100

Figure extraite de la page 69 du rapport :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-oecst/rapport-final-surete-nucleaire-20111215.pdf

Voici donc, concotés par nos "experts", le futur de notre industrie nucléaire pour les 90 ans à venir !!!

 

Vous remarquerez que le déploiement des réacteurs de génération IV, les surgénérateurs, ne débuterait qu'en 2061, dans un demi-siècle, et qu'à cette date, aucun des participants à cet audit ne sera vivant. C'est surréaliste. Mais peu leur importe. Le calcul a montré que c'est le temps qu'il aura fallu pour constituer ce stock de 1000 tonnes de plutonium ( de quoi tuer tous les êtres humains vivant sur cette planète )

Qui pourrait imaginer que la science et la technologie n'évolueront pas pendant une telle tranche de temps ! Imaginez des experts qui, en 1900, envisageraient le déploiement des machines à vapeur de IV° génération, à l'horizon 2000. Y compris des avions à vapeur, des sous-marins à vapeur, des automobiles à vapeur.....

 

Nous sommes vraiment gouvernés par des irresponsables.

 

La Cour des Comptes pointe les nombreuses incertitudes concernant la facture du nucléaire

http://fr.news.yahoo.com/co%C3%BBt-nucl%C3%A9aire-cour-comptes-pointe-incertitudes-importantes-selon-212019946.html

Pour ITER, ces incertitudes son carrément surréalistes....

Reuters :

Loin de clore le débat actuel sur le nucléaire en France, le rapport que va publier fin janvier la Cour des comptes sur les coûts de cette industrie ne fera que le lancer. Les conclusions - d'une version non définitive - de ce rapport, que La Tribune s'est procurées, sont sans ambiguïté.

Prolixe sur les coûts du passé (construction du parc, recherche) et actuels (maintenance, exploitation), la Cour fait part des "incertitudes importantes" sur les coûts à venir, liés en particulier au démantèlement des centrales et à la gestion des déchets de longue durée. Confortant ainsi l'un des principaux arguments des opposants au nucléaire (voir ci-contre).

Quant aux coûts de la sûreté, voués à une flambée certaine depuis la remise, la semaine dernière, par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de son rapport sur les travaux à effectuer sur le parc français pour tirer les leçons de Fukushima, ils seront à peine évoqués.

Comment la Cour des comptes peut-elle, ainsi que le précise le Premier ministre dans sa lettre de mission de mai dernier, "expertiser les données fournies par les opérateurs" avant le 31 janvier alors qu'EDF a jusqu'en juin pour réaliser son devis des travaux exigés par l'ASN ?

D'évidence, le gouvernement ne voulait pas retarder après la présidentielle la publication de ce rapport, dont il espère qu'il confortera ses positions en faveur du nucléaire.

André-Claude Lacoste, président de l'ASN, a néanmoins été auditionné mardi 10 janvier rue Cambon. En l'absence de chiffrage détaillé d'EDF, il s'est contenté de donner son avis sur le devis avancé par l'électricien la semaine dernière, autour de 10 milliards d'euros. "Ces chiffres lui semblent un peu optimistes", avance une source proche.

Dès le lendemain, mercredi 11 janvier, les douze experts qui "assistent" la Cour dans ce travail recevaient le projet de rapport final, avant une dernière réunion programmée lundi 16 janvier. Ce qui laisse décidément très peu de temps pour intégrer dans ce rapport les conséquences de Fukushima dans la facture nucléaire française.

Après avoir - longuement - établi que la seule construction du parc nucléaire actuel avait coûté 96 milliards d'euros (sur des dépenses nucléaires civiles totales - recherche, usines Areva, réacteurs arrêtés... - de 227,8 milliards d'euros), soit 1,5 milliard le mégawatt (MW) installé (contre 3,7 milliards le MW pour l'EPR, souligne la Cour), le rapport scrute les investissements à consentir en matière de démantèlement et de gestion des déchets. Et ces deux questions clés restent sans réponse, faute d'avancées concrètes de la part des opérateurs.

Les charges liées au démantèlement sont estimées à 22,2 milliards d'euros. Mais la Cour recommande la plus grande prudence sur ces chiffres qui "doivent être regardés avec précaution, l'expérience en la matière, tant d'EDF [centrales de première génération] que du CEA ou d'Areva, ayant montré que les devis ont très généralement tendance à augmenter quand les opérations se précisent, d'autant plus que les comparaisons internationales donnent des résultats très généralement supérieurs aux estimations d'EDF" (voir l'exemple britannique). La Cour demande d'ailleurs qu'EDF change de méthode pour le calcul de ses provisions de démantèlement. L'actuelle "ne permet pas un suivi suffisamment précis des évolutions de ces provisions".
Chiffrer l'hypothèse d'un stockage

Surtout, la Cour des comptes "confirme la nécessité et l'urgence de faire réaliser, comme l'envisage la DGEC [aux ministères de l'Énergie et de l'Écologie], "des audits techniques par des cabinets et des experts extérieurs afin de valider les paramètres techniques" de la nouvelle méthode de calcul préconisée. "Nul doute qu'il n'y a rien de nouveau depuis le précédent rapport de la Cour sur ces coûts en 2005-2006, souligne un expert. On en saura plus seulement lorsqu'EDF aura avancé dans le démantèlement du réacteur de Chooz A, à l'arrêt depuis 1991, qui sera le premier réacteur à eau pressurisée à être déconstruit." Les réacteurs précédemment stoppés appartenaient à une autre technique (graphite-gaz), les méthodes ne sont donc pas comparables. Les coûts non plus.

Quant aux provisions sur les coûts de la gestion des déchets de longue durée, "elles ne sont pas stabilisées", affirme la Cour. Elles reposent sur un devis de l'Andra de 2003 qui a, depuis, plus que doublé, passant de 15 à 35 milliards d'euros, "il y a donc un doute manifeste sur le bon niveau des provisions d'EDF, d'Areva et du CEA", écrit la Cour. Elle recommande que "soit rapidement fixé le nouveau devis sur le coût de stockage géologique profond, de la manière la plus réaliste possible, c'est-à-dire en tenant compte des résultats des recherches menées sur ce sujet mais sans anticiper sur leurs résultat".

Enfin, au détour de sa deuxième recommandation sur les déchets, la Cour pointe les limites du credo français en matière de retraitement des combustibles. Elle demande en effet à l'Andra d'étudier, en la chiffrant, l'hypothèse d'un stockage, dans son futur centre souterrain, des combustibles usés mox et uranium (déjà retraité une première fois) sortant des centrales. Le mythe du recyclage continue de s'effondrer.
 
Marie-Caroline Lopez et Valérie Segond - 12/01/2012, 07:13 

 

 

 


 

Comment tuer, assis dans son fauteuil

Passons aux drones. Les images qui vont suivre son extraites de cette vidéo :

Pilotage de drones de combat.

Il s'agit s'une patrouille de deux Predators, pilotés depuis un centre situé aux Etats Unis et opérant, pilotés par relais satellitaire, dans quelque lointain théâtre d'opération (Afghanistan ?)

Drone Predator

6000 km de rayon d'action. Plafond : 15.000 m. Vitesse 480 km/h

 

Deux jeunes pilotes, un homme et une femme, de moins de trente ans, sont aux commandes.

 

Confortablement installés

Trois écrans : vision frontale, droite et gauche. Manche de droite : pilotage.
Manche de gauche : orientation de la caméra de "regard" et du système d'illumination laser
Pour le guidage des bombes et des missiles. Tuer dans le confort.

 

pilote drone

Regard impassible, concentration

 

femme pilote

Etats d'âme : néant

 

Ces deux pilotes de drones sont basés au Nevada ou au Dakota, en plein centre des Etats Unis. Ils pilotent des appareils qui opèrent sur des terrains d'opération en Irak ou en Afghanistan. Ils " tuent les bad guys " (les "sales types"). Si vous lisez l'anglais, vous en saurez plus sur ces étranges missions.

http://www.airforcetimes.com/news/2008/08/ap_remote_stress_080708/

Les missions se font en général avec deux drones. A gauche, le chef de la mission. C'est lui qui possède, sur son manche, le petit bouton rouge avec lequel il peut déclencher le tir. Le personnage de droite est chargé de la "désignation laser". C'est la tache de cette jeune femme, qui maintiendra sa croix de visée sur l'objectif. L'article dit que certain de ces opérateurs n'ont pas plus de 18-19 ans.

Après quelques heures passées, confortablement assis devant une console de pilotage, ils peuvent rentrer à la maison. S'ils ont un foyer, ils pourront jouer au babyfoot avec leurs enfants. Les dégâts qu'ils causent sont strictement identiques à ceux que pourrait causer un chasseur bombardier. Les images reçues du sol, transmises par satellites, sont assez précises pour que les pilotes puissent distinguer les êtres humains, faire la différence entre un homme et une femme.

L'article dit qu'il est tout à fait possible de faire effectuer par le drone un survol de sa cible pour évaluer les dommages causés. En fait, dans la mesure où le risque pour les "pilotes" sont alors nuls et que le coût d'un tel drone est bien inférieur à celui d'un chasseur bombardier, un survol à basse altitude et altitude moédérée serait tout à fait envisageable. On imagine les images auxquelles ces jeunes gens pourraient alors être confrontés.

 

6 janvier 2013.

Source :

http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2013/01/04/drones-on-vient-de-tuer-le-gamin/

C'est un glaçant récit de guerre, mais dont les acteurs n'ont jamais foulé les champs de bataille.

Pendant plus de cinq ans, Brandon Bryant a combattu enfermé dans un container de la taille d'une caravane, au fin fond des Etats-Unis. "Il suffisait qu'il presse un bouton au Nouveau-Mexique pour qu'un homme meure à l'autre bout de la planète" résume le journaliste du quotidien allemand Der Spiegel dans cette captivante enquête sur les pilotes de drones dont Courrier international propose une version française cette semaine.

On y découvre l'autre visage de la guerre moderne, "invisible", à qui "la distance ôte de sa gravité". "La guerre nouvelle se veut plus précise que l’ancienne, écrit le journaliste. Pour cela, beaucoup la disent 'plus humaine'." C'est cette conception qu'interroge le témoignage, rare, du jeune soldat.

Agé de 27 ans, Brandon Bryant revoit encore précisément les montagnes afghanes avec ses sommets enneigés et ses vallées verdoyantes qui lui rappelaient son Montana natal. Il les observait à 10 000 kilomètres de distance. Extrait :

- Ce jour-là, dans le réticule du drone, une maison aplatie en terre, avec une étable pour les chèvres, se rappelle-t-il. Lorsque l’ordre de faire feu tombe, Brandon presse un bouton de la main gauche […]. Le drone lance un missile de type Hellfire. Il reste alors seize secondes avant l’impact.

"Les secondes s’écoulent au ralenti'", se souvient Brandon aujourd’hui. […] A cet instant, Brandon peut encore détourner le missile roquette. Trois secondes. Brandon scrute le moindre pixel sur l’écran. Soudain, un enfant qui court à l’angle de la maison. […] Brandon voit une lueur sur l’écran – l’explosion. Des pans du bâtiment s’écroulent. L’enfant a disparu. Brandon a l’estomac noué.

"On vient de tuer le gamin ?" demande-t-il à son collègue assis à côté.

"Je crois que c’était un gamin", lui répond le pilote. […]

C’est alors que quelqu’un qu’ils ne connaissent pas intervient, quelqu’un qui se trouve quelque part dans un poste de commandement de l’armée et qui a suivi leur attaque :

"Non, c’était un chien."

Brandon Bryant sort de son container ce jour-là, le cœur de l’Amérique profonde s’étale devant lui : l’herbe drue de la steppe à perte de vue, des champs, l’odeur du lisier. […] Une guerre est en cours.

Le responsable de la force d'intervention drones au sein de l'US Air Force préfère évoquer l'usage humanitaire des drones après le tremblement de terre en Haïti, les succès contre les forces de Kadhafi en Libye et l'appui aérien aux troupes terrestres en Afghanistan, affirmant :

"Nous sauvons des vies." Devant le journaliste, le commandant jure "n'avoir vu mourir que des combattants". 

Brandon, lui, affirme qu'en six ans dans l'US Air Force il a "vu mourir des hommes, des femmes et des enfants" et que jamais il n’aurait imaginé tuer tant de gens.

Marqué par les scènes terribles auxquelles il assiste en direct, malgré la distance, il finit par ne plus supporter son "cockpit" du Nouveau-Mexique. Il rêve en "infrarouge", ne dort plus la nuit, répond à ses supérieurs. Dans son journal intime, il écrit : "Sur le champ de bataille, il n’y a pas de belligérants, juste du sang, la guerre totale. Je me sens tellement mort. Je voudrais que mes yeux se décomposent." 

Un jour, il s'effondre au bureau, crache du sang. Les médecins du département des anciens combattants diagnostiqueront un syndrome post-traumatique. "L’espoir d’une guerre confortable, sans séquelles psychologiques, a fait long feu", écrit le journaliste.

 

Peut-on dire que la guerre ait quelque chose d'humain ? Ces jours-ci je regardais la vidéo d'un colloque sur la guerre robotisée, qui se tenait à Coetquidan, à Saint-Cyr. Cette école militaire est situé en Bretagne, et elle forme les futurs officiers de l'armée française.

http://www.dailymotion.com/video/xmybwu_bapteme-du-4e-bataillon-de-l-ecole-speciale-militaire-de-saint-cyr-promotion-cba-barek-deligny_news

Tout y est. La cérémonie se joue de nuit.

 

 

Sur un podium, une brochette de généraux chamarrés. Sur quel théâtre d'opération ont-il glané leurs décorations. Profil de carrière ?

La ciel nocturne ajoute à la magie de la cérémonie

 

Traditions d'un autre âge. Quelles pensées, dans ces têtes-là, à ce moment ?

 

Amazones guerrières, peut être futures pilotes de drones ?

 

Innocente chair à canon. Général alourdi de médailles.

- Comme maman et papa vont être fiers....

 

Le genou en terre, survivance de rituels chevaleresques.

- A genoux, les hommes. Debout les officiers !

Sabre étincelant et talons hauts.

 

- Mon général, quel nom donnerez-vous à cette nouvelle promotion .....

 

La réponse tombe. Cette promotion portera le nom d'un membre du contingent, tombé en Afghanistan en 2010, l'officier Barek-Deligny

 

 

On nous explique qu'ainsi, devenus "filleuls de ce "parrain", tombé au champ d'honneur, les jeunes membres de cette nouvelle promotion " auront à coeur de marcher sur les traces de celui-ci ".

Sur quelle traces ? Pour aller où ? Pour ... servir ? Servir quoi ? Qui ? Pourquoi ?

 

Tout cela est d'une tristesse insondable.

 

Eh oui, la guerre est un mauvais théâtre, un théâtre costumé. Je regardais hier le film Avatar au cours de ma séance quotidienne d'aquagym, dans mon bassin. Première images du Marine en fauteuil roulant, qui dit, en désignant ses camarades " ce sont des Marines, des chiens de guerre qui défendent la liberté. Ici, ce ne sont plus que des mercenaires ".

Qu'on m'explique la différence, aujourd'hui. Mes idées se brouillent un peu.

Il y a trois ans j'avais fait une page sur l'héroïsme. Je retrouve dans celle-ci une image qui me paraît à elle seule représenter les deux visages de la guerre. A droite, ceux qui "mènent les opérations", à gauche ceux qui payent l'addition.

 

Bush visitant les "gueules cassées de la guerre en Irak"

Quelle courage : Bush n'a pas fui devant le résultat de ses choix.

 

Eh voilà, le dernier soldat américain s'est retiré après cette brillante campagne. Que lui restera-t-il à celui-là ? Une médaille, une pension et une aide psychologiques, peut être fournie aux vétérans ? Mais le rideau est tombé, sur ce "théâtre d'opérations-là". Les comédiens ont quitté la scène. Les sociétés privées fournissant des approvisionnement aux troupes (Halliburton) ont bien fonctionné. L'industrie de guerre a tourné.

- On croit mourir pour la Patrie et on meurt pour les banques....

Cette phrase d'Anatole France ne date pas d'hier.

Il y a un an je dînais avec le cousin d'un ami, ancien militaire. qui avait fait carrière dans le service des sports des Armées. Un emploi non exposé. Pompes et jogging. Il me disait que son fils s'était engagé dans le Chasseurs Alpins et partirait bientôt en Afghanistan. Je lui ai demandé comment il percevait la présence française, là-bas. Sa réponse :

- Il faut voir les choses en face. L'industrie de l'armement, en France, a besoin de tester ses matériels sur le terrain. C'est la démonstration de l'efficacité de ceux-ci qui pourra garantir le succès des exportations.

- En somme, votre fils, là-bas, est un cobaye humain, pour test de matériel militaire ?

- Ben oui. Mais c'est son choix, et je n'aurais su m'y opposer.

L'héroïsme n'est plus ce qu'il était. Mais il faut maintenir l'apparat, les "traditions". Voir les images précédentes, écouter la mâle virilité du chant entonné par les présents.

Comment être soldat, de nos jours, si on se donne le droit simplement de penser ?

Quand on entre sous les armes, comme on entre en religion, penser devient un luxe qu'on ne peut plus s'offrir.

Je pense à la phrase du sergent recruteur, dans le film Fanfan la tulipe :

- Si vous voulez ne penser à rien, et que l'armée s'en charge pour vous....

- Si vous voulez ne penser à rien et que Nicolas Sarkozy s'en charge pour vous....

De facto, ça n'est rien d'autre. Cela revient à se mettre sous les ordres d'un nain de jardin, modulo toute une interface de ministres et d'officiers supérieurs chamarrés.

 

Revenons à nos héroïques pilotes de drones.

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Sur l'écran frontal, une "vue plongeante" montrant les deux drones, sur la gauche de l'écran

 

Les deux drones, le 105 et le 107

 

Le 107 est moins armé que le 105

 

Voici la cible : un camion qui est sorti d'un entrepôt.
La croix indique le point visé par le laser à infrarouge, qui guidera la bombe

 

Feu !

 

L'image de l'impact sur la cible

 

Excellent job !

 

Il n'y a pas la phrase sacramentelle " ... et maintenant, on rentre à la maison ".

Il n'y aura pas la chaude ambiance d'un mess, l'émotion d'un risque partagé. Il n'y aura pas d'évocations du genre :

- Et maintenant, je demande une minute de silence à la mémoire de nos pilotes de drones, tombés en service commandé. Au lieutenant Brown, qui a glissé dans l'escalier fait une chute mortelle, à la capitaine Nelly White, victime d'une indigestion, au restaurant du mess ...

Ces images consacrent le passage sans heurt du jeu vidéo à l'acte de guerre réel. Ces jeunes " Chevaliers du Ciel "ne verront peut être jamais une goutte de sang, recevront des médailles pour "faits d'armes".

Il me fait penser à un voisin, qui vit dans une riche exploitation vinicole, près de chez moi.

 

Et voilà. Encore quelques heures passées ... à informer.

 


 

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