La construction des Grandes Pyramides

Jean-Pierre Petit, ancien directeur de recherche au Cnrs

Quatrième partie :

Deux millions cinq cent mille blocs ?

 


     Il existe une maquette, dans le musée du Caire qui ne doit pas dater d'hier. Elle se trouve à l'étage, sous une vitrine et représente une coupe d'une des pyramides d'Abousir. Celle-ci est comme fendue en deux parties égale, qui sont légèrement séparées. La vitrine ne porte aucune étiquette, même pas un numéro. Ceux qui ont visité le musée du Caire et qui le connaissent un peu savent qu'on y trouve des stèles "muettes" sans la moindre mention, et bien d'autres choses de ce genre. Quand j'ai vu cette maquette, dont j'aimerais bien connaître l'auteur, s'il vit encore, et discuter avec lui, j'ai retrouvé une complète identité de vies vis-à vis de la façon dont je conçois la structure de ces objets. Comme j'ai eu ces idées en 2003 il est fort probable que cet archéologue pourrait arguer d'une priorité en la matière.

     Une pyramide est "un gros tas de pierres qui protège une salle sépulcrale où repose le corps d'un pharaon". Certains prétendent avoir percé tous les secrets de cette symbolique de l'embaumement, mais je ne suis pas sûr que nous en comprendrons un jour tous les aspects, tout ce qui est recherché à travers cet ensemble et ces rituels fort complexes. Pendant longtemps on a cru qu'il s'agissait de simples tombes, à la gloire exclusive d'un seul homme, au service duquel des milliers d'esclaves devaient se dévouer. Mais, au fil des découvertes successives il semble que le pharaon était en quelque sorte déifié par son peuple et que les ouvriers travaillant à l'édification des pyramides, pas plus que ceux qui édifièrent nos cathédrales médiévales n'étaient des esclaves mal traités et mal nourris. Les cantines récemment retrouvées à Giseh en témoignent. . Ce n'était plus un homme que ses sujets mettaient dans une tombe, mais un être en train de devenir divin, moitié homme, moitié dieu. En honorant le pharaon les Égyptiens honoraient leur panthéon tout entier.

     Nous devrions parfois réfléchir aux croyances qui servent de pivots à nos religions. Les Catholiques Romains ont des prélats qui disent des messes. Se déroule alors sous les yeux des "fidèles" un rituel que certains chrétiens dits progressistes interpréteront comme une suite de gestes symboliques mais qui fut pendant des siècles une croyance bien ancrée. Lorsque le prêtre communie, il utilise une hostie de plus grande taille que celles qu'il distribuera par la suite aux fidèles ( et qu'on recommandait alors, quand j'étais enfant, de ne pas croquer "parce que c'était le corps du Christ" ). . La liturgie catholique romaine prône la consubstantiation. Au cours du rituel l'hostie que manipule le prêtre "devient le corps du Christ", tandis que le vin qu'il boira "deviendra son sang". Il faut savoir s'étonner du contenu de rituels modernes et parfaitement institutionnalisés, intégrés à des pans importants de notre société.

     Si les Catholiques Romains croient, ou ont pu croire très longtemps à la magie de la transformation de produits alimentaires en parties du corps de leur homme-dieu, pourquoi douterait-on que des Égyptiens aient pu croire que, dans le secret de ses sarcophages en poupées russes, dans le silence de son sépulcre que le corps de leur roi, momifié, ne puisse pas se transformer en un corps d'un nouveau dieu et prendre son envol vers les étoiles dans sa "barque solaire" ? .

     Visiblement, les Égyptiens tenaient à ce que leurs pyramides soient éternelles. Sur le plan architectonique, c'est une réussite. Ca l'est moins s'agissant des momies qu'elles contenaient. L'histoire nous apprend que les tombes furent violées relativement rapidement, en dépit des précautions qu'avaient pris leurs concepteurs pour en interdire l'accès. Il est vrai que l’Égypte, si elle connaissait des années de vaches grasses connut aussi des disettes effroyables ( jusqu'à ce que le barrage d'Assouan ne régularise définitivement le cours du Nil, supprimant ses crues, le lac Nasser servant de tampon ).

     Comment subir ces coups du sort quand on sait que non loin de là dorment des richesses si aisément monnayables ? Les sarcophages de Kheops, de Kephren et de Mykérinos fuirent trouvés vides. Le cas Toutankhamon est une exception brillante. Quand on voit la masse des richesses qui accompagnérent ce jeune pharaon on imagine le flot d'or (cette "chair des dieux") qui a du accompagner Ramsès II et Séti I lors de leur départ pour l'au-delà. Mais rien ne fut épargné au plus connu des pharaons égyptien. Sa tombe fut rapidement violée. Les voleurs coupèrent les bandelettes qui entouraient son corps pour récupérer des amulettes précieuses qui constellaient la surface de celui-ci et qui avaient des fonctions rituelles protectrices. Ils arrachèrent des mains de la momie ses gantelets d'or. Son marque d'or, semblable à celui de Toutankhamon dut être décollé sans ménagements. Bien plus tard les prêtres, constatant ces dégradations regroupèrent les momies mutilées, souillées et les cachèrent dans une grotte située au dessus de la vallée de rois, où elle furent découvertes bien des siècles plus tard. La momie de Ramsès II fut transférée au musée du Caire. Pendant longtemps elle servit, debout, de décoration à la pièce où se tenait le gardien. Mais un jour, et cela se voit très bien sur la momie, l'un des bras de celle-ci bougea. Une vieille crampe, sans doute. Alors qu'initialement les deux bras du pharaon étaient joints, collés d'un contre l'autre et plaqués sur son ventre, l'un des bras s'écarta soudain du corps de 5 ou 6 centimètres avec un craquement. Le gardien en défaillit d'émotion.

     Il existe peut être des tombes inviolées où des pharaons ou des dignitaires peuvent poursuivre leur voyage immobile vers les étoiles, mais pour combien de temps ? Dans la vallée des rois et des reines le radar offrent une chance nouvelle de détecter des cavités. Ramsès finit son temps exposé à la curiosité des touristes.

     A part Toutankhamon, les dépouilles des pharaons ont connu de bien tristes destins. Ironie : la seule effigie connue de Kheops, celui qui laissa au monde la plus grande tombe, mesure à peine cinq centimètre de hauteur et se trouve au musée eu Caire.

 

La seule statue existante du pharaon Kheops. Hauteur : 5 centimètres.

 

     Il nous reste leurs tombes et nous nous disons que nos civilisations auront peut être totalement disparu des mémoires humaines alors que ces montagnes de pierres assemblées continueront à traverser les siècles et les millénaires. Dans dix mille ans, vingt mille ou plus il ne restera sans doute plus pierre sur pierre de tout ce que nous avons construit. Le béton se sera complètement désagrégé et ses armatures de fer seront détruites par l'oxydation. Mais les Grandes Pyramides seront probablement toujours debout. Ce sont des machines faites avant tout pour défier les millénaires.

     Elles ne craignent ni l'érosion éolienne ni les intempéries qui, en Egypte, sont rares. La sécheresse du climat les protège, comme celle-ci assure la conservation des pièces de bois qui jonchent les sites de fouille et qui ont été amenées là il y a près de cinq mille ans. Dans des pyramides comme la Rouge ou la rhomboïdale on trouve de solides madriers, intégrés à la structure qui ont visiblement servi à descendre plus commodément des charges. La dessication les a rendus durs comme du fer. Ces éléments ligneux permettent des datations au carbone 14 qui rendent un peu dérisoires certaines assertions fantaisistes quant à l'époque où ces constructions ont été édifiées. Ceci étant, pour certaines d'entre elles les archéologues ont eu des surprises : les bois trouvés en hauteur se sont avérés plus vieux, de nombreux siècles, que ceux découverts dans les fondations. Était-ce à dire qu'on commençait à construire les pyramides ... par le haut ? Non, simplement que les Égyptiens amassaient d'énormes quantités de bois, importés de Syrie et du Liban, qu'ils pouvaient entreposer en plein air sans risque de voir pourrir leur trésor. La construction des pyramides étaient une activité qui se déroulait probablement sans interruption. Il fallait donc amasser du bois en plein air pour les constructions à venir. Quand un stock s'épuisait, on le reconstituait. Ainsi le tas montait, descendait puis remontait encore, au fil d'arrivages de nouvelles cargaisons. C'est ainsi que des poutres situées sous la pile virent passer les siècles sans s'en apercevoir, puis finirent par être utilisées pour finir des étages supérieurs.

     Le volume de la pyramide de Khéops atteint deux millions cins cent mille mètres cubes. Si le volume moyen des blocs auxquels on a eu à ce jour accès est de l'ordre du mètre cube, est-ce à dire qu'on ait dû tailler deux millions et demi de blocs ? Dans ce cas, où sont les débris de taille, sachant que de nombreuses pierres étaient taillées et extraites sur place ?

     Quand les Arabes se rendirent maître du pays ils cherchèrent à pénétrer dans ce qu'ils savaient être des tombes dans l'espoir de mettre la main sur "d'immenses trésors". On a vu la monstruosité du voussoir signalant l'entrée de la pyramide de Khéops. A droite, en contrebas, mais un peu au dessus du sol se trouve l'entrée qui fut creusée par les Arabes désireux de s'enfoncer au coeur de ce sanctuaire de roc.

 

 

     Comme on le verra plus loin, la galerie d'accès au sépulcre était obstruée par plusieurs bouchons de granit, disposés dans la Grande Galerie puis lâchés au moment où tout était accompli. Les Arabes préfèrèrent donc se ménager un accès complètement indépendant.

 

L'accès ménagé par les Arabes

 

     Quand on visite les entrailles de la pyramide de Khéops c'est donc cet étroit couloir que l'on emprunte. Un chose frappe alors le visiteur. On trouve une alternance de blocs ajustés et de ce qui ressemble à des débris plus grossiers, à de la "blocaille". Borchart, égyptologue Allemand imagina alors une sutructure " en oignon ", avec des pans de pierre s'appuyant les uns sur les autres.

 


Le modèle de Borchart


     Mais l'auteur de la maquette de la pyramide d'Abousir est allé plus loin en imaginant que les pyramides possédaient une charpente de pierre soigneusement ajustées, disposées selon des surfaces prismo-coniques, de section carrée. Entre ces pans de pierre : de la blocaille, du "tout-venant", dans lequel on balançait éventuellement un semblant de liant, sorte un remplissage, destiné à combler les vides, à base de mauvais plâtre.

     Reprenons la question de cette structure interne des pyramides en nous centrant une fois de plus sur le thème central de la résistance aux phénomènes sismiques. Nous avons vu que les pyramides étaient bâties sur une assises sculptée, à étages, jouant le rôle de "pion de centrage". L'angle que font les parois avec l'horizontale fait qu'une pyramide ne pourrait être "une simple dune de blocaille". On trouverait en son sein des contraintes qui tendrait à la faire éclater. Si je voulais illustrer cela je construirais une pyramide en papier fin, avec quatre triangles scotchés sur une base carrée. Puis j'introduirais du sable par un orifice situé au sommet. Les flanc de ma pyramide se gonfleraient et si le papier est assez mince celle-ci finirait par éclater.

     Il faut donc pouvoir résister à ces contraintes tendant à faire éclater l'édifice, des contraintes horizontales, dirigées de l'axe vers l'extérieur. Une "charpente interne" fera effet. Il faudra que ses blocs soient parfaitement joints le long de leurs faces horizontales. Pour les autres, c'est moins important. Or on sait que les pierres extraites du plateau de Giseh présentent naturellement ce parallélisme parfait. Voici donc la structure interne d'une pyramide, telle que l'a imaginée l'auteur de la maquette du Caire et que j'ai retrouvée il y a trois ans :

 

 

Hypothèse concernant la structure interne des pyramides : une charpente interne en pierre

 


     En coupe, cela donne ceci :



 

     En montrant la partie postérieure de ce revêtement interne nous obtenons :

 



 

     Si maintenant on comble l'espace interstitiel avec un granulat correspondant aux débris de taille, on obtiendrait :

 

 

La pyramide "composite" avec une structure de pierres jointives constituant sa "charpente interne" et un remplissage par du tout-venant ( en jaune )

 

     Imaginons maintenant que quelque pharaons en quête de matériaux de qualité se mette à déshabiller cette pyramide, en enlevant son revêtement de calcaire de Tourah.

 



La pyramide "déshabillée", première version.

 

     Nous trouvons une structure de ce genre : la pyramide dite de Houny ( père de Snéfrou, lui-même père de Khéops ), située à Meïdoum :

 

La pyramide de Meïdoum

 

     Une autre photo qui montre également l'importance de l'éboulis ( que des auteurs décrivent comme les restes d'une ... rampe ). :

 

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La pyramide de Meidoum, surgissant en plein milieu du désert

 

     Cette pyramide est effectivement entouré d'un immense cône d'éboulis, de faible granulométrie. Cette image est empruntée au livre de Siliotti. Sa hauteur primitive est estimée à 93,5 m. Le scénario classique, qu'on trouve dans différents ouvrages me paraît des plus fantaisistes. Mais les schémas du livre de Siliotti ne le sont pas :

Vue schématique de la pyramide de Meidoum

 

     Dans son livre ( 2003 ) Alberto Siliotti donne une coupe de la pyramide de Meidoum "attribuée à Houny" :

 

La pyramide de Meidoum, par Alberto Siliotti

 

     Je ne sais pas si l'italien cherche à travers ce croquis a exprimer l'idée selon laquelle cette pyramide aurait été complètement achevée, mais si c'est le cas je le rejoindrais complètement.

     Selon les égyptologue, la pyramide de Meidoum aurait été d'abord une pyramide à degrés. Puis des premiers travaux ( f ) auraient étendu cette structure à degré. Enfin ( f ) on aurait essayé de doter cette pyramide d'un revêtement, sans succès. Les débris qui l'entourent seraient les restes des rampes ayant été utilisés pour ces différents travaux. Il est en tout cas exact que le cône d'éboulis laisse apparaître, comme je l'ai montré dans mon schéma une partie du revêtement, parfaitement taillé, qui pointe effectivement vers un sommet situé bien au dessus des actuels vestiges, à 93 mètres de hauteur.

     Je pense que la pyramide de Meïdoum fut complètement achevée, mais qu'elle a été pillée. l'éboulis qui l'entoure devrait alors représenter ce que les voleurs de pierres n'ont pas emporté : la garniture sous forme de débris de taille. On voit mal comment un matériau aussi instable aurait pu servir de rampe (...). Il y aura une façon simple d'y voir plus clair. Jean-Stéphane Beetschen, 24 ans, est en train de nous composer des images de synthèse destinées à illustrer ces nouvelles idées concernant la structure des pyramides. On choisira une certaine structure avec alternance de flancs constituant la charpente interne et de remplissage de tout venant. On évaluera les volume. Puis on simulera un déshabillage en règle et nous verrons si le cône de débris à faible granulométrie cadre alors avec ce qu'on trouve sur le site de Meïdoum.

     Du déshabillage de pyramide, on en trouve partout, à des degrés divers et variés. A Giseh les trois pyramides les plus importantes : Khéops, Kephren et Mykérinos ne furent "qu'à peine écorchées" étant donnée leurs masses colossales. Sous le revêtement en calcaire de Tourha, dont seule la pyramide de Kephren a gardé une partie se trouvait une seconde couche, de forme pyramidale. La pyramide de Mykérinos, ci-dessous, a également été consciencieusement dépouillée de son revêtement. Pour les pyramides satellites, plus faciles d'accès, les pilleurs sont simplement allés un peu plus loin. Elles aussi on été pillées, à des degrés divers. On le voit très bien sur la photo ci-après, toujours empruntée au livre de Silotti ( mais j'ai d'autres photos personnelles ).

 

La pyramide de Mykérinos et ses trois pyramides satellites

 

     La pyramide satellite de gauche a conservé grosso modo sa forme. On voit même apparaître au ras du sol le départ de son revêtement.

 

La pyramide-satellite de Mykérinos la mieux conservée

 

     Vue de loin ou de près cette pyramide-satellite, la mieux conservée n'est pas une pyramide à degrés. Par contre, voici les deux autres :

 

Les deux autres pyramides-satellites... à degrés !

 

     Quelle est la conclusion logique ? Que sous une pyramide "normale" se cache "une pyramide à degrés". L'examen des trois pyramides-satellites du complexe de Mykérinos le démontre à l'évidence. Elles sont simplement dans des états de déshabillage différent. Je suis convaincu que si on démontait les pyramides de Mykérinos, de Khéops et de Képhren, ce qu'on ne peut évidemment pas faire, on verrait apparaître ces structures à degrés (comparables alors à celles de la pyramide de Meïdoum, qui ne sont que des éléments de la charpente interne que j'évoque plus haut. Lors de mon avant-dernier voyage à Giseh j'ai pu monter sur une de ces pyramides satellites de Mykérinos. Ceux qui connaissent l'Egypte savent que les interdits peuvent être aisément assouplis en mettant la main au porte-feuille. Le préposé à la surveillance de ces pyramides ne m'opposa ainsi guère de résistance lorsque j'exprimais mon souhait de monter sur une de ces pyramides satellites. Son commentaire fut :

     - Oui, mais faites vite .....

     Quelle ne fut pas sa surprise de me voir alors me diriger vers celle qui était la plus abîmée, qu'on voit sur la photo ci-dessus à l'arrière-plan. De plus, au lieu de gravir le sommet je me suis arrêté au premier étage et me suis mis à creuser rapidement, à la manière d'un chien cherchant un os, sous le regard stupéfait de l’Égyptien qui a dû me prendre pour un malade mental.

     En peu de temps j'ai pu vérifier ce que je cherchais, à savoir qu'en dessous de cette surface horizontale il n'y avait pas de blocs durs, mais du tout-venant, à faible granulométrie, ce qui confirmait ce que j'avais imaginé pour la structure des pyramides.

     Dans le livre de Georges Goyon on trouve une photographie prise par Lauer, exumant une pyramide " à degrés " à Sakkarah, où ceci est également bien visible.

 



 

     Cette structure est exactement ce que j'ai trouvé en creusant dans un des embanquements de la plus délâbrée des pyramides-satellites de Mykérinos. Lauer considère cette pyramide comme "inachevée". Je n'en serais pas aussi sûr que lui. Sinon, selon ses critères les pyramides satellites de Mykérinos seraient, elles aussi "inachevées". Il est à noter que cette alternance de composants dans la structure de la pyramide avait été ébauchée par Goyon dans son livre. Témoin l'illustration :

 

La conception ébauchée par Georges Goyon dans son ouvrage : une alternance de revêtements et de "libage"

 

Dictionnaire Quillet : Libage, gros moellons utilisés pour la construction des fondations d'un édifice.

 

     Je crois que les égyptologues lisent les faits ... à l'envers. Leur obsession est de trouver dans les différents constructions "un progrès". Aunsi la pyramide à degrés de Djozer, la plus ancienne, aurait traduit une technique dérivée du mastaba. Les tombes les plus anciennes, avant qu'Imothep ne se mette à construire cette fantastique pyramide pour son patron, le pharaon Djozer, étaient soit des tombes souterraines, soit des constructions constituées d'un simple rez-de-chaussée, avec une ou éventuellement plusieurs pièces adjacentes. Mastaba en arabe signifie " table ". Les égyptologue imaginent donc que les pyramides à degrés sont construites comme des superpositions de mastabas :

 

Schéma classique de la pyramide à degrés : un empilement de mastabas

 


     Ci-après, la "pyramide à degrés" de Sakkarah :

 



La pyramide du pharaon Djozer, construite par Imothep


     Cette vue aérienne donne une meilleure idée de la géométrie de cette pyramide. Pris en photo, de près et au ras du sol elle semble plus "tassée" que les autres. En fait, non, si on se base sur cette élévation, extraite de l'ouvrage de Siliotti :

 

 

     Je ne sais pas comment les égyptologues ( et le Français Lauer, responsable du site pendant un demi-siècle ) ont fait pour le déterminer, mais cette vue montre que la pyramide aurait été édifiée en deux temps, la partie gauche représentant un modèle plus petit. A Sakkarah les tombes se situent toutes à vingt et quelques mètres de profondeur. La tombe de Djoser est au fond d'un vaste puis central. Le complexe funéraire souterrain forme un semble de galeries très compliqué. Une des étrangetés de l'endroit est constituée par des milliers ( Siliotti parle de même de dizaines de milliers ! ) de vases de pierre.

     On remarquera cette alternance de murs de pierre et de matériau pulvérulent. Personnellement je ne serais pas étonné que la structure de cette "pyramide à degrés" correspondent au dessin ci-après :

 

Schéma non-classique de la structure interne de la pyramide à degrés de Sakkarah

 

     Ainsi la "pyramide à degrés" de Sakkarah pourrait avoir été une pyramide complète, munie de son revêtement, qui aurait été volé par la suite.

 

Sakkarah : Rien ne ressemble plus à une pyramide complète qu'une pyramide à degrés

 

     Pour tirer cela au clair il faudrait sonder la pyramide. Ce qui bloque les égyptologues et les empêche de considérer un thèse de ce genre c'est que si la première pyramide avait porté un revêtement c'est que le peuple égyptien serait brutalement passé en quelques dizaines d'années des cabanes en torchis et des maisons de brique crue à des édifices comparables .. à la cathédrale de Chartes, et cela simplement parce qu'Imothep aurait décidé un beau jour"de remplacer le bois par la pierre". Une accélération technologique fantastique au point d'en être .. suspecte. On a l'impression d'avoir "manqué un épisode".

     Dans les textes égyptiens on ne trouve rien concernant le mode construction des pyramides, aucun croquis sur un mur, aucun bas-relief, aucun texte inscrit sur un papyrus. Les prêtres mentionnent seulement que cette structure permet seulement à l'âme du pharaon de monter au ciel, à ... grande enjambées.

     Il ne faut pas s'étonner de cette rareté de la documentation. Le papyrus est un support périssable. Rien à voir avec les tablettes cunéiformes, considérées comme exemptes de toute valeur marchande par des pilleurs de sites archéologiques jusqu'à une date très récente. Comme disait un auteur :

-     Quand nous voulons nous débarasser d'un courrier, on le jette au jeu. Chez les Assyrio-Babyloniens cette démarche correspondait à une motiovation diamétralement opposée. Le document qui partait au four était au contraire celui qu'on souhaitait conserver.

     Le papyrus ... brûle. C'est un bon combustible dans un pays où le bois fait cruellement défaut. Il peut pourrir. Bien sûr les gens s'étonnent de ne pas trouver de descriptions détaillées sur les murs des temples. Mais leur fonctions étaient toutes autres. On peut le comparer aux murs de couloirs du métro. Ils sont constellés d'inscriptions dont on souhaite qu'elles se gravent dans la tête des gens et des visiteurs. Le pharaon est puissant. Il éclate les têtes de ses ennemis avec sa massue, les met en déroute en conduisant son char. Il est aimé des dieux, qu'il côtoie. Aimez et craignez pharaon ! Les inscriptions figurant sur les murs des temples ressemblent aux murs des mairies aux époques des campagnes électorales.

     Imaginez un seul instant que Paris soit rasé par un terrifiante guerre nucléaire. En surface, tout est rasé. Dix mille ans plus tard nos lointains descendants découvriraient les traces de notre cvilisation en pénétrant dans les couloirs du métro. Que liraient-ils sur ces murs ? En déduiraient-ils que notre culture était indigente ?

     Il existe un ouvrage qui me paraît être un sommet d'imbécilité, c'est celui, publié chez Albin Michel, de l'encyclopédant Caratini, intitulé " l'égyptomanie, une imposture ". Dans ce livre il décrit les Egyptiens de l'Ancien Empire comme de vrais imbéciles, reproduisant pendant mille ans des stéréotypes, sur tous les plans. Preuve majeure de leur indigence culturelle, selon Caratini : ces gens n'avaient pas accédé au stade de l'habitat citadin, n'avaient pas songé à conquérir les pays voisins, se contentant de contenir au nord le Sémite et au sud le Nubien. Un pays linéaire, un pays " tunnel " où on ne craignait point d'attaques venant de l'ouest ou de l'est. Leur médecine ? un mythe. Leurs mathématiques ? Une imposture. Pour construire des pyramides ? Simple ; beaucoup de main d'oeuvre et des fouets. Quand je pense à cet ouvrage je me remémore la phrase d'un de mes amis, au sortir d'un colloque particulièrement nul :

     - Je connais maintenant les bas-fonds de la pensée.

     Notez, c'est à acheter et à conserver dans son bêtisier personnel. Dans le genre c'est ... insondable.

     Simple remarque en passant. Les pylônes des temples ne sont pas dotés de murs verticaux. Normal dans des régions aussi vulnérables aux secousses sismiques. Ces façade présentent un "fruit" (terme de construction désignant leur inclinaison). Techniquement on retrouve un revêtement et un libage intérieur :

 

Coupe du pylône d'un temple

 

     Pendant que nous y sommes à évoquer des constructions autres que les pyramides, signalons que des murs d'enceinte, en brique crue, présentaient une sinuosité. Bien sûr, là encore on peut y voir une simple symbolique, celle du serpent. Les briques crues ne peuvent encaisser que les contraintes de compression, pas le cisaillement. Un mur plan présenterait des risques de basculement, en cas de secousse tellurique. Alors, que faire ?

     Déployez une tôle ondulée sur le sol en la disposant verticalement. Elle sera a priori plus rigide qu'une tôle plate. Eh bien les murs de brique crue des anciens Égyptiens ne sont rien d'autre que de la tôle ondulée.

Le mur d'enceinte en brique crue des Egyptiens exploite la rigidité de la tôle ondulée

 

     Continuons de jouer à ce petit jeu consistant à déshabiller une pyramide. On sait que la partie sommitale de la pyramide de Meidoum a exactement la même pente que celle de la pyramide Rouge, de Snefrou. Supposons que ces pyramides aient eu une structure très voisine, qui serait :

 



Structure interne de la pyramide Rouge ( conjecturé )


     Supposons que, plus tard, un pharaon-pilleur entreprenbe un début de démontage de cette pyramide, pour récupérer ses pierres :

 

 

     Sur ce, un descendant de celui pour qui cette pyramide de avait été conçue entreprend de la réparer. Mais, voyant que la pyramide tient bien debout en l'absence de renforts latéraux il décide simplement de refaire son revêtement. On obtient alors ceci :

 

La pyramide ... réparée, qui acquiert alors une forme rhomboïdale.

 

     En nous basant sur les photographie on pourrait reconstituer ce projet :

 

Le "projet initial"

 

     Selon la thèse officielle les architecte auraient d'abord envisagé une pente de 52°27' . Arrivés à un peu plus du tiers de la hauteur de ce projet initial ils réalisent que cette pyramide ne tiendra pas. Des fissurations sont constatées. Ils révisent leur position et optent pour un angle, 43° 22', qui se trouve être identique à celui de la pyramide Rouge de Snéfrou.

 

 

La pyramide rhomboidale et, à droite, la pyramide Rouge de Snéfrou ( hauteur 104 mètres )
Toutes deux sont équipées de chambres sépulcrales à encorbellements.

 

 

Selon la thèse classique les architectes auraient projeté d'atteindre la même hauteur que celle de la pyramide Rouge, avec une base plus étroite.

 

Pourquoi pas. Le lecteur a maintenant les deux thèses sous les yeux.

 

     A propos des "fissurations" il est possible que les égyptologues aient attribué des dégradations liées à des séismes à l'effet d'une trop grande surcharge. Or on a vu depuis le début de ces pages que le phénomène sismique était omniprésent en Egypte, bien que les égyptologues ne semblent guère s'en soucier. Revoyons cette image du monstrueux linteau de la pyramide d'Ounas, pourtant fort modeste au regard des monstres que nous venons d'évoquer.

 

Grand linteau de la pyramide d'Ounas ( Sakkarah ) : complètement fracturé

 

     On ne peut pas attribuer cette fracture à une "surcharge", d'autant plus que le toit à voussoir est là pour soulager les éléments du sépulcre en redistribuant les charges latéralement. C'est typiquement une fracture en cisaillement, imputable à des secousses horizontales. J'ai essayé d'illustrer ce concept en reconstituant, à gauche les efforts sur le linteau liés à une contrainte de cisaillement, qui fournit une fracture oblique ( faites l'essai en cisaillant une feuille de papier ). A mon avis les ruptures que j'ai pu observer à l'intérieur des pyramides étaient dues à des contraintes de cisaillement, à la déformation générale de la pyramide due à des ondes sismiques. Le "linteau fendu" peut, lui, jouer. Il "joue et ne romp pas".

 

 

Taille comparées des deux pyramides ( la Rhomboïdale est à Dashour, celle d'Ounas à Sakkarah )

 

 

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